Désert, mer, montagnes… De tout temps, les frontières naturelles ont servi de barrières pour les migrations de population. Aujourd'hui, face au drame migratoire qui se joue devant nos yeux, ces espaces sont devenus les tombeaux où meurent des milliers d'aspirants à la dignité. Triste constat en cette journée internationale du migrant. Museo Atlántico, premier musée sous-marin en Europe a été inauguré en janvier 2017 / DR Museo Atlántico, premier musée sous-marin en Europe a été inauguré en janvier 2017 / DR Museo Atlántico, premier musée sous-marin en Europe a été inauguré en janvier 2017 / DR Au XIXe siècle en Europe, naissait le mythe autour de l'existence de cimetières des éléphants en Afrique. Les chasseurs d'ivoire fantasmaient ainsi sur des lieux cachés, où viendraient s'entasser les vieux pachydermes au crépuscule de leur vie. Cette théorie tirée de l'anthropomorphisme a depuis été démontée par les zoologues. Cette histoire pourrait servir d'allégorie pour illustrer le drame migratoire que vivent des millions de personnes fuyants pauvreté, sécheresse, bombardements, voire génocides et échouent aux portes de l'Europe. Quitter sa famille, son pays pour un lointain incertain, est un déchirement. Quête de dignité pour certains, question de survie pour d'autres, l'exil n'est jamais un chemin touristique pour visiter les guichets des aides sociales, n'en déplaise aux politiciens qui dénoncent le «gaspillage» de l'argent public sauf quand ils en sont les bénéficiaires. Morbide Mare Nostrum Pour ceux qui parviennent à traverser le désert, ils devront échapper aux mafias qui les rançonnent, et parfois les revendent comme esclaves en Libye. Le sable brûlant désormais derrière eux, viennent alors les dangers de l'eau, les vagues, les avaries de leur embarcation de fortune. Nombreux sont les rêves d'Eldorado qui finiront noyés en Méditerranée. Plus de 5 000 morts en 2016 selon l'ONU. Enfin, pour les dizaines de milliers de survivants qui parviendront par miracle à atteindre les côtes italiennes, il leur restera à franchir par -8*C les Alpes comme au col de l'Echelle. Là les attendent les forces de l'ordre françaises pour les renvoyer en Italie, adultes comme mineurs, migrants ou réfugiés, peu importe. Dans ce tableau noir subsistent pourtant quelques lueurs d'espoirs incarnées par les belles âmes pleines d'humanité. De simples citoyens comme ces professionnels de la montagne qui font des rondes la nuit près des cols, ou organisent des cordées solidaires. Ou encore ces sportifs qui organisent des collectes de vêtements pour les distribuer aux migrants à Vintimille en Italie. Des élus font également de la résistance en organisant l'accueil des migrants, malgré le climat politique défavorable. Cordée solidaire avec les migrants dans les Alpes / Ph. B. Dupin - Radio france L'aide aux migrants : Délit ou humanisme ? Ces actes de solidarité sont remarquables, en cette période où les autorités n'hésitent pas à poursuivre et à condamner des Justes comme Cedric Herou, agriculteur, jugé coupable d'avoir aidé des migrants à traverser la frontière par la vallée de la Roya. Dans leur lutte ciblant tous ceux qui viendraient en aide aux migrants, les pays européens sont même prêts à poursuivre les citoyens résidant sur l'autre rive de la Méditerranée. Il en est ainsi des pêcheurs tunisiens, poursuivis en 2007 pour avoir porté assistance à des migrants en mer. Plus récemment, c'est la justice espagnole qui poursuit une de ses ressortissantes résidantes à Tanger, Helena Maleno Garzón, pour un motif similaire. Nous vivons un temps où il ne fait pas bon aider son prochain, surtout s'il est étranger. Dans ces moments de grandes lâchetés, les Justes sont souvent dénigrés, harcelés, poursuivis pour leurs actes de résistance. Criminalisés sur le coup, il faudra probablement des décennies pour prendre conscience de leurs actions héroïques. Car chaque fois qu'ils sauvent une vie, ils contribuent à sauver l'humanisme censé nous guider. Fredric Raddum, plasticien / Ph. F. R.