Les communautés religieuses d'Italie sont invitées depuis mardi à signer «la charte des valeurs de la citoyenneté et de l'intégration». Fruit de six mois de travail, le document a été élaboré conjointement par un comité scientifique et des représentants des principales confessions, dont l'Islam bien entendu. En effet, l'Italie appelle à la consolidation de l'Islam italien. En premières lignes, le voile et la polygamie. Les femmes résidant en Italie ne devraient pas se voiler le visage, étant donné que ce type de vêtements «empêche d'identifier la personne et fait obstacle à l'interaction avec les autres», selon le Ministre italien de l'Intérieur, Giuliano Amato. La polygamie est également prohibée par la charte. Celle-ci présente son attachement à la famille monogamique et «veut éviter aux femmes de connaître l'humiliation de la polygamie», précise le président du comité scientifique, Carlo Cardia. Le document, composé de sept paragraphes, condamne par ailleurs le terrorisme, la xénophobie et l'antisémitisme, tout en prônant «le droit à la liberté religieuse» et «l'égalité entre l'homme et la femme». D'autres questions relatives aux droits et devoirs du nouveau citoyen ont été évoquées, notamment les droits sociaux dont le travail, la scolarisation, la santé... Sans valeur juridique pour le moment, la charte «ne pourra être imposée à quiconque» selon le ministre. Il s'agit plutôt d'une entente entre l'état et l'Islam qui marque le début d'un processus. En effet, le document pourrait constituer dans le futur une base de travail afin de discuter des conditions d'obtention de la nationalité italienne par les immigrés. Encore une fois, parmi les communautés religieuses, ce sont les musulmans qui sont visés en premier lieu. Cette proposition de Rome intervient en réponse au débat qui secoue l'Europe depuis quelques temps, concernant les critères d'intégration applicables à la communauté musulmane. Pourquoi donc les musulmans ont-ils toujours besoin d'être contrôlés, de répondre à des critères, de se plier à de nouvelles règles improvisées afin de se faire accepter ? Islam et modernité sont-ils si difficiles à marier ? Aujourd'hui, c'est toute l'Europe qui se sent menacée par ses onze millions de musulmans. Une peur quelque peu fondée, il faut l'avouer. L'Islam est incompris, par certains musulmans eux-mêmes, ce qui ne manque pas de retentir sur la vision qu'en ont les non musulmans. L'Italie, qui compte un million de musulmans, est la scène de nombreux exemples de fanatisme religieux, principalement dans les mosquées. Les imams improvisés sont légion en Italie et leurs prêches sont loin de prôner la tolérance. Les premières victimes en sont les femmes. «Elles sont inférieures à l'homme. Soumettez-les. N'hésitez pas à les battre. Elles fileront droit.».C'est ainsi que s'est exprimé Mohamed Khohaila, imam turinois. Le prêcheur n'a pas oublié d'appeler à la haine contre les juifs et les chrétiens et de sommer les fidèles de ne fréquenter «aucun étranger (à l'Islam)». Son prêche a eu plus de retentissement qu'il ne l'aurait espéré, une caméra camouflée de la télévision italienne a filmé tout son sermon. L'imam extrémiste est même passé à la télé, ce qui n'a pas manqué d'alerter la magistrature qui a ouvert une enquête sur le sujet. Le prédicateur d'origine marocaine risque l'expulsion... La société italienne reste sceptique quant à l'intégration de ses musulmans. Mais devant la haine et la violence prônées par certains, d'autres mouvements viennent contrecarrer cette image. Il s'agit surtout d'organisations de la société civile, comme l'Association des femmes marocaines en Italie (ACMID) et l'Association des jeunes musulmans d'Italie, qui se battent comme elles peuvent pour prouver que l'on peut être musulman, citoyen et italien. La principale organisation musulmane dans le pays, l'Union de la Communauté Islamique en Italie (Ucoii), a participé à l'élaboration de la charte. Cependant l'omission de certains aspects dans le document semble déplaire à l'Ucoii. Son président, Mohamed Nour Dachan, affirme que «le voile n'est pas humiliant pour la femme» et qu'il aurait été adéquat de citer «le rôle positif de l'Islam dans l'histoire de l'Europe». Dachan précise «reconnaître la charte et être prêt à l'étudier». Mais quant au fait de s'y souscrire, il affirme: «Cela n'a pas encore été demandé»...