Le projet d'union régionale maghrébine sans le Maroc, voulu par Alger, vient encore de prendre du plomb dans l'aile. Au tour de Tunis de reconsidérer la définition du projet algérien, alors que la Libye avait fait un pas en arrière et que la Mauritanie n'a jamais répondu à l'invitation. Quelques jours après le soutien algérien apporté au nouveau secrétaire général de l'Union du Maghreb arabe (UMA), la Tunisie de Kaïs Saied se veut rassurante sur le devenir du groupe régional, plus que jamais miné par les différends diplomatiques depuis le froid entre Rabat et Tunis. Le ministre des Affaires étrangères, de la migration et des Tunisiens à l'étranger, Nabil Ammar, a ainsi déclaré que les réunions tripartites entre la Tunisie, la Libye et l'Algérie revêtaient «un caractère consultatif visant à améliorer les relations et à activer la coopération conjointe, en vertu de nouveaux plans d'action valorisant le développement et le partenariat stratégique», sans pour autant se substituer à l'UMA. Dans un entretien au média tunisien Assabah News, Nabil Ammar a fait savoir que ce mécanisme était «consultatif» et ne constituait pas «une alternative à l'Union du Maghreb Arabe, qui reste un choix stratégique et un acquis civilisationnel que la Tunisie et le reste des Etats membres frères s'efforcent d'incarner, tout en surmontant les entraves au processus de sa mise en œuvre». Nommé en février 2023 dans un contexte où les propos racistes et xénophobes de Saied ont créé une large polémique, avant le rétropédalage de la présidence, le chef de la diplomatie tunisienne affirme que ces réunions s'inscrivent aussi «dans le cadre de la volonté commune des dirigeants des trois pays de renforcer la coordination sur les défis sécuritaires pour affronter les dangers qui les guettent, en raison du phénomène croissant de migration irrégulière et de crime transfrontalier». «Le mécanisme consultatif tripartite tient à établir des relations avec les pays et autres groupes régionaux et internationaux, dans le cadre du respect mutuel et de la non-ingérence dans les affaires intérieures. Il reste également ouvert à toute volonté politique honnête et sincère qui partage les mêmes priorités, pour une participation constructive à l'avancement et à l'enrichissement de l'action collective, loin de la politique des axes et des risques d'ingérence extérieure.» Nabil Ammar Après le pas en arrière de la Libye, la réserve de la Tunisie En l'espèce, le ministre affirme la volonté de son pays d'«établir une voie de développement fondée sur l'élargissement de la base des partenariats, des coopérations bilatérale et multilatérale, dans le cadre de l'ouverture aux diverses puissances régionales et internationales, indépendamment des politiques des axes». Dans ce sens, Nabil Ammar a soutenu qu'il fallait «retenir les leçons des décennies passées, avec un alignement sur la légitimité internationale comme boussole, un soutien aux causes justes et des positions de principe stables, exemptes d'intérêts ponctuels courtermistes». Ces déclarations ont été rendues publiques trois jours après que le nouveau secrétaire général de l'UMA, le Tunisien Tarek Ben Salem, a reçu le soutien du ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, lors d'une réunion tenue dimanche 21 juillet à Accra (Ghana). Elles sonnent comme un rétropédalage de la Tunisie alors que le projet d'union régionale se limitait à Alger et Tunis ; la Libye ayant rapidemment fait un pas en arrière. Pour rappel, le 27 avril dernier, l'agence officielle de presse en Algérie (APS) a décrété «la mort» de l'UMA, en appui au projet du président Abdelmadjid Tebboune de ressusciter un Maghreb sans le Maroc.