La diplomatie marocaine agit avec prudence à l'initiative demandant une intervention du Maroc dans la guerre au Mali. Les auteurs de la requête n'ont été reçus par aucun fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères. Certaines voix au sein de la communauté des Touaregs installée au Maroc critiquent la demande. Comme annoncé sur Yabiladi, des représentants Touaregs ont déposé, ce vendredi 1er décembre, une lettre au siège du ministère marocain des Affaires étrangères, demandant une médiation du royaume dans la guerre au Mali. «En tant que citoyens Touaregs résidant au Maroc et possédant la nationalité marocaine, les signataires de cette lettre» espèrent une intervention du Maroc «pour sauver notre peuple des crimes génocidaires auxquels il est quotidiennement exposé de la part de l'Armée malienne, appuyée par les milices russes de "Wagner", dans la région de l'Azawad», lit-on dans la missive parvenue à notre rédaction. «Ce sont des crimes contre l'humanité qui visent spécifiquement les civils de la région de l'Azawad (nord du Mali), ce qui a entraîné l'exode de milliers de femmes, d'enfants et de personnes âgées vers la Mauritanie, après avoir été empêchés d'entrer sur le territoire algérien et dans le reste des pays voisins». Et de conclure leur requête en demandant au Maroc «d'intervenir de toute urgence pour aider les réfugiés azawadiens en Mauritanie sœur, en leur apportant une aide humanitaire et attirer l'attention des instances internationales sur les souffrances de la population de l'Azawad». Demande de soutien politique et humanitaire «La Mauritanie ne peut pas faire face, toute seule, à cet exode massif de Touaregs. Le Maroc a une tradition dans l'assistance humanitaire au profit de peuples africains. Notre action bénéficie de l'appui de la population locale» au Mali, affirme auprès de Yabiladi Meftah Agtaher, un Touareg qui a fait le déplacement d'Agadir à Rabat pour remettre la lettre. Et de rappeler que les Touaregs avaient contribué à la guerre contre le Polisario durant les années 70 et 80. «Le but de notre initiative est d'abord humanitaire. En 2013, l'ancien ministre des Affaires étrangères, Saad-Eddine El Othmani, avait répondu à l'appel d'acteurs amazighs d'apporter une aide aux réfugiés touaregs, en transmettant le message aux plus hautes autorités du royaume. Notre action a aussi un objectif politique, à savoir dénoncer les accords d'Alger de 2015», a reconnu Rachid Raha, président de l'Assemblée mondiale amazighe. Dissensions au sein du peuple de l'Azawad Cependant, des membres d'autres courants Touaregs, ayant la nationalité marocaine, ont pris leurs distances avec l'initiative. «La région connait un conflit entre l'Occident et la Russie. La partie qui déclare la guerre au Mali sert d'abord les intérêts de la France», affirme Ali Ansari, président du Centre Tombouctou des études. «Nous les Azawadiens au Maroc, nous sommes conscients que le Maroc n'a pas les moyens d'intervenir dans ce problème (…) En revanche, nous demandons au Maroc d'apporter des aides aux réfugiés qui ont fui la guerre et sont installés dans des camps en Mauritanie et dans d'autre pays». «Les Touaregs sont en contact quotidien avec le Maroc, y compris les dirigeants de la Coordination des mouvements de l'Azawad. Ils sont capables de demander directement une intervention du Maroc sans médiation ou instrumentalisation de certaines parties.» Un signe vient soutenir les dissensions au sein des peuples de l'Azawad, la prudence du Maroc quant à l'initiative. En effet, aucun fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères n'a reçu les auteurs de la lettre, déplore Rachid Raha. Pour rappel, le roi Mohammed VI avait reçu, le 31 janvier 2014 à Marrakech, Bilal AG Cherif, secrétaire général du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA), qui était accompagné du porte-parole du mouvement, Moussa AG Attaher.