Entre sécheresse persistante, pression sur la production nationale et volatilité des marchés mondiaux, le Maroc revoit sa copie en matière de soutien aux importations de blé. En toile de fond : la volonté d'assurer la sécurité alimentaire du pays, sans perdre de vue les équilibres budgétaires ni la diversification des partenaires commerciaux. C'est un signal fort envoyé par le Maroc aux marchés internationaux : en pleine recomposition de ses circuits d'approvisionnement, le Royaume affine sa stratégie céréalière. Alors que la sécheresse persiste depuis plusieurs années et que la production nationale reste insuffisante, les autorités du Royaume ont revu à la baisse les subventions accordées à l'importation de blé tendre. Pour la période du 1er au 30 avril 2025, l'ONICL (Office National Interprofessionnel des Céréales et Légumineuses) a fixé l'aide à 7,02 dirhams par quintal, contre 14,77 dirhams en mars, soit une division par deux en un mois. Ce changement intervient alors que les dernières pluies, bien que significatives, sont arrivées trop tard pour compenser les pertes déjà enregistrées dans les champs. La sécheresse, installée depuis six campagnes agricoles consécutives, continue de faire peser une lourde pression sur la filière. Et malgré un retour de la pluie depuis mars, le mal était déjà fait pour les semis les plus précoces. Lire aussi : Le gouvernement décide de suspendre l'importation de viandes rouges congelées Confronté à une production nationale structurellement insuffisante, le Maroc a clairement opté pour le maintien de ses approvisionnements sur le marché mondial. Un choix assumé : au cours de la campagne 2024-2025, le Royaume s'est hissé au deuxième rang des importateurs de blé en provenance de l'Union européenne, avec près de deux millions de tonnes réceptionnées. Seule l'Egypte fait mieux sur le continent africain. Mais la stratégie marocaine ne s'arrête pas aux frontières de l'Europe. Le Royaume joue désormais la carte de la diversification des origines, un levier essentiel dans un monde soumis à des tensions géopolitiques et des fluctuations de prix imprévisibles. La Russie est aujourd'hui le premier fournisseur de blé tendre du Maroc, reléguant les fournisseurs traditionnels, comme la France, au second plan. Derrière, la Pologne et l'Ukraine complètent le peloton de tête, illustrant le recentrage du Royaume vers des marchés de l'Est aux prix plus compétitifs. Un dispositif prolongé jusqu'à fin 2025 Pour garantir un approvisionnement stable et maîtriser les coûts sur le marché local, les ministères de l'Economie et de l'Agriculture ont entériné, via une décision conjointe, la prolongation du soutien à l'importation de blé tendre jusqu'au 31 décembre 2025. L'objectif est clair : répondre à une demande nationale estimée à environ 5 millions de tonnes par an, tout en assurant la continuité des flux logistiques et la stabilité des prix à la consommation. Ce dispositif témoigne de la vigilance du gouvernement face aux défis croissants que pose la souveraineté alimentaire. Dans un contexte où le climat devient un facteur de plus en plus imprévisible, le Maroc cherche à bâtir une stratégie céréalière résiliente, capable de conjuguer sécurité des approvisionnements, maîtrise budgétaire et anticipation des risques. En baissant les subventions à l'import, Rabat envoie également un signal de normalisation après des mois de soutien exceptionnel. Ce rééquilibrage pourrait indiquer que les autorités misent sur une relative détente des prix sur les marchés mondiaux, ou sur une capacité accrue des opérateurs à s'adapter à des conditions moins favorables.