N'atant pas réussi à normaliser les relations avec le Maroc, le gouvernement espagnol a fini par solliciter l'appui du roi Felipe VI. Le roi Felipe VI a présidé, ce matin, la traditionnelle et annuelle réception en l'honneur du corps diplomatique accrédité en Espagne. Une cérémonie marquée par l'absence de l'ambassadrice du Maroc, Karima Benyaich, rappelée le 18 mai pour consultations. Néanmoins, le Maroc était fortement présent dans le discours du roi, une véritable main tendue à Rabat pour tourner définitivement la page des tensions. «Avec le Maroc, nos gouvernements respectifs ont convenu de redéfinir ensemble une relation pour le 21ème siècle, basée sur des piliers plus forts et plus solides. Maintenant, les deux nations doivent marcher ensemble pour commencer à concrétiser cette nouvelle relation. Il s'agit de trouver des solutions aux problèmes qui préoccupent nos peuples», a-t-il souligné en présence du chef du gouvernement, Pedro Sanchez, et le ministre des Affaires étrangères, José Manuel Albares. Des propos largement relayés par la presse ibérique. Sanchez a déjà joué la carte Felipe VI sur le dossier de l'immigration L'appel de Felipe VI marque un tournant dans le lent processus de la reprise des relations entre Rabat et Madrid, initié en juillet avec le limogeage d'Arancha Gonzalez du gouvernement. Il atteste aussi que l'exécutif de coalition de gauche, dans son entreprise de se réconcilier avec le Maroc, a fini par se résoudre à solliciter l'intervention royale. Pour mémoire, le quotidien El Mundo a révélé, en mai, que le cabinet Sanchez n'a pas donné des «instructions» à Felipe VI pour entrer en contact avec le roi Mohammed VI afin de résoudre l'exode de milliers de Marocains vers Ceuta. Le même exécutif aurait rejeté une proposition de l'ancien roi Juan Carlos, de mener une médiation entre Rabat et Madrid. Il est lieu de souligner que les liens entre la monarchie marocaine et la famille des Bourbons qui règne au voisin ibérique, ont réussi à rester à l'abri des fréquentes tensions politiques maroco-espagnoles. En témoigne la réponse rapide du roi Mohammed VI à la demande de Felipe VI, exprimée en février 2019 à Rabat, d'intensifier l'engagement marocain à lutter contre l'immigration irrégulière. Une année marquée, selon les chiffres du ministère espagnol de l'Intérieur, par la baisse de 50% des embarcations de migrants qui échouent sur les côtes espagnols en Méditerranée, par rapport à 2018. Par cet appel, Felipe VI, avec la bénédiction du gouvernement, apporte sa propre pierre au projet de «redéfinir» les relations avec Rabat. Une volonté déjà exprimée par le roi Mohammed VI à l'occasion de son discours du 20 août. «J'ai suivi personnellement et directement le processus de dialogue ainsi que l'évolution des discussions. Le but n'était pas seulement de trouver une issue à cette crise, mais aussi de saisir l'opportunité pour redéfinir les bases et les paramètres qui régissent ces relations», avait-t-il souligné. Les déclarations du monarque espagnol interviennent presque deux semaines après le message du président allemand, Frank-Walter Steinmeir, adressé au souverain marocain. Une initiative de la part du chef de l'Etat, même si ses pouvoirs sont limités comme celles de Felipe VI, qui donne un coup de pouce à la détermination du gouvernement d'Olaf Scholz d'ouvrir une nouvelle page avec le Maroc. En conséquence, Rabat a saisi la portée du message et annoncé l'agrément du ministère marocain des Affaires étrangères à l'ambassadeur allemand, proposé depuis sept mois. Hasard du calendrier, ce lundi, Scholz effectue une visite en Espagne et s'est réuni avec Pedro Sanchez.