La décision marocaine de retirer la confiance en Christopher Ross n'a pas eu, jusqu'à présent, l'effet escompté. Il semble qu'elle vient de donner au Polisario l'occasion de mener des contre-attaques à partir de Johannesburg et Madrid. Une offensive diplomatique qui intervient après des mois d'isolements. Le 17 mai, Rabat annonce officiellement qu'elle souhaite le départ du médiateur onusien au Sahara, l'américain Christopher Ross. Une initiative précédée de contacts avec Paris et Washington. Dix jours après cette décision, le ministre des Affaires étrangères, Saad Eddine El Othmani, a reconnu, dimanche lors d'une réunion interne du PJD, que l'administration américaine n'a pas accepté que le royaume ait retiré sa confiance en Ross. Une position que le chef de la diplomatie a due nécessairement entendre le 11 mai de la propre bouche de William Burns. Le n°2 au département américain, à l'issue de ses entretiens avec El Othmani, a déclaré à la presse que «les Etats-Unis continuent d'appuyer les efforts visant à trouver une solution pacifique, durable et mutuellement acceptable au conflit du Sahara occidental, y compris le processus de négociation des Nations unies dirigé par l'envoyé personnel du secrétaire général pour le Sahara occidental, l'ambassadeur Christopher Ross». Devant les membres du PJD, Saad Eddine El Othmani a également rappelé que l'organisation des Nations Unies ne s'est pas montrée, elle aussi, enthousiaste à la demande marocaine de changer l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU. Pour mémoire, le même jour, le 17 mai, jour de l'annonce de la décision de Rabat, Ban Ki-moon a publié un communiqué dans lequel il dit avoir «pleinement confiance en Christopher Ross». Une position parfaitement en phase avec celle de l'administration Obama. Offensive diplomatique du Polisario Cette décision du Maroc n'a jusqu'à présent pas eu l'effet escompté. Certes, il y a ce soutien français au plan d'autonomie mais Paris a appelé «à un règlement rapide du différend» opposant Rabat et Ross. Contrairement aux Américains, les Français ont savamment évité de se ranger du côté du médiateur de l'ONU. En revanche, et sans le vouloir, l'initiative de Rabat a donné à la direction du Polisario une nouvelle occasion pour se mobiliser à l'étranger. Mohamed Abdelziz est en déplacement en Afrique du sud, grand soutien du Front, et membre non-permanent au Conseil de sécurité. A des milliers de kilomètres de Johannesburg, le représentant du Polisario auprès de l'ONU, Ahmed Boukhari, a estimé, vendredi à Madrid, que Rabat ne pourrait prendre ce genre de décision «sans l'appui de quelqu'un : Madrid ou Paris», s'est-il interrogé. Ce proche de Mohamed Abdelaziz a lancé, d'ailleurs et depuis la capitale espagnole, un ultimatum à l'équipe de Mariano Rajoy, avertissant que sur la question du Sahara «le Polisario est en train de mesurer la température du gouvernement de Madrid auquel nous accordons du temps jusqu'à la fin de l'été pour nous donner une réponse définitive à notre question : l'Espagne est-elle intéressée de voir un Etat sahraoui indépendant ou elle le considère contraire à ses propres intérêts ?» L'arrivée de la droite au pouvoir était très fortement saluée par la direction du Polisario mais elle a vite déchanté. Février dernier, Mohamed Abdelaziz effectuait une visite dans certaines régions en Espagne sans rencontrer Rajoy même en sa qualité de président du parti populaire (PP).