Peu courant en Europe, le mariage entre cousins est très fréquent sur le grand Maghreb et chez les arabes en général. En 2010, le Maroc comptait 19,87% de mariages consanguins, un chiffre important, mais faible comparé à l'Algérie avec 38,3%, et à l'Arabie Saoudite avec 50% ou aux champions, Jordanie et Pakistan ex-æquo avec 55% de mariages entre cousins. Au-delà du qui, du pourquoi, le souci le plus important reste la santé des enfants issus de ces mariages. Beaucoup de jeunes maghrébines choisissent un mariage avec un cousin. Un mariage parfois arrangé depuis leur plus tendre enfance, comme le dit un adage marocain : «khayrna mayddih ghirna» (Notre bien ne doit pas revenir à d'autres). Malgré les risques, les traditions ont la vie dure ! Y a plus d'hommes sur terre ? C'est la question que se poseront les étrangères à cette culture maghrébine. Mais dans certaines régions, des familles ne comprennent toujours pas pourquoi leur fils épouserait une fille d'un autre village, alors qu'il dispose de beautés familiales. Dans certaines régions d'Algérie ou de Tunisie par exemple, on perpétue le système tribal «al aarch». Fatema est la cousine de son mari. On ne lui a pas forcé la main, mais sa mère disait que «Sidi Ahmed était connu pour sa beauté et sa générosité» raconte Fatema. Ses parents ne la voyaient pas mariée à un étranger qui la maltraiterait. Il est vrai qu'épouser un cousin peut consolider les liens familiaux, être plus facile à vivre, mais le contraire peut également se produire… «Au moindre conflit ou prise de tête avec mon ex-mari, ma mère et ma tante se prenaient le bec», raconte Kheira. Aujourd'hui divorcée, elle trouve dommage que ce divorce ait éclaté sa famille en plus de son couple. Les études démontrent que ces mariages entre cousins sont plus courants dans les milieux ruraux. Manque de sensibilisation, mais surtout par manque de moyens d'aller demander la main de la fille de X, du village voisin. Ce n'est pas une règle absolue, l'amour est aveugle comme on dit. Cupidon peut aussi planter sa flèche pas loin. C'est le cas de Sami et Nawal, des cousins mariés par amour. «Il habitait en France quand nous étions petits. Je l'ai vu au Maroc une ou deux fois». Ce n'est que passé la vingtaine qu'ils se revoient et s'aiment…sous le regard approbateur des familles. «Je voulais que mon fils épouse une bent bladou (fille de son pays), mais pas une femme qui ne verrait en lui que des papiers français. Nawal est l'épouse idéale» témoigne la mère de Sami. Par amour ou par obligation, peu importe, mais qu'en est-il des enfants issus de mariages consanguins ? Des chiffres alarmants ! Nous sommes tous porteurs, au fond de nous, de gènes défectueux, mais nous n'en souffrons pas, car le taux est faible. Si ces gènes rencontrent leurs semblables dans le sang du conjoint, le risque de maladies s'accentue chez les enfants. Donc, plus les parents sont apparentés, plus ils ont de gênes en commun. Chez les enfants issus de couples consanguins, le risque d'hydrocéphalie est 13 fois plus élevée, l'hémophilie 11 fois plus fréquente, la maladie de Duchenne 8 fois, les maladies neurologiques 7 fois et les anémies congénitales trois fois. Le risque est plus élevé aussi pour le bec de lièvre et la trisomie 21. Sans parler des fausses couches à répétition. Alarmant, non ? «Ma mère a fait deux fausses couches, a perdu trois bébés à la naissance avant de m'avoir» raconte Halima, issue de cousins. Si la jeune femme n'a pas de problème physique ni mental, elle ne voudrait, pour rien au monde perpétuer cette «ridicule» tradition familiale. D'autant plus qu'elle a deux cousins trisomiques. Il est vrai que beaucoup de cousins se marient en ayant une progéniture tout à fait normale, mais il est conseillé de procéder à des examens sanguins, surtout si une maladie génétique circule dans la grande famille. Et, surprise, une étude islandaise n'est pas du tout d'accord avec ces risques. On démontre que les couples consanguins ne sont pas si désastreux pour leur progéniture que cela. Plus encore, se marier entre cousins éloignés augmente la fertilité du couple et de ses enfants, et c'est un signe d'une excellente santé ! Un argument biologique : le risque de rejet du fœtus par le système immunitaire de sa mère est pratiquement nul. Mais l'étude insiste sur le fait que ces avantages ne s'appliquent qu'aux cousins relativement éloignés. Les cousins germains ou au second degré ont plus de bébés, mais rarement en parfaite santé. Si les études entre cousins n'ont pas vraiment diminué depuis les années 40 sur le grand Maghreb, nous sommes plus conscients des dangers que cela représente. La science ne cesse d'évoluer, alors, profitons-en !