« L'enquête révèle que la discrimination, le harcèlement et les violences à caractère racial sont beaucoup plus répandus que ce que les statistiques officielles indiquent », a souligné Morten Kjaerum, directeur de l'Agence des droits fondamentaux de l'UE, en présentant cette étude. Cette étude est la première enquête qualitative à grande échelle réalisée sur le sujet, permettant des résultats comparables entre les 27 Etats membres. L'enquête a été menée dans les 27 états membres auprès de 23.500 personnes des minorités et des groupes d'immigrés. En Belgique, les communautés turques et marocaines ont été interrogées. « Il y a un problème de racisme dans toute l'UE et nous présentons des preuves à ceux des pays qui le nient », a abondé Joanna Goodey, une autre responsable de cette agence créée en 2007. « En outre, 5.000 personnes des populations majoritaires vivant dans les mêmes régions que des minorités ont été interrogées dans dix pays européens pour permettre la comparaison de certains résultats », a précisé Mme Goodey. « Ses résultats seront soumis à la Commission européenne. Ils visent à lancer le débat et à permettre l'adoption de mesures », a expliqué M. Kjaerum. « Mais les discriminations et les violences raciales sont rarement signalées et celles qui le sont sont la pointe de l'iceberg », a souligné M. Kjaerum. « Les victimes ont expliqué au cours de l'enquête que porter plainte ne changerait rien, que cela arrivait tout le temps et que porter plainte pourrait leur nuire », a-t-il poursuivi. « Beaucoup évitent de se rendre dans certains endroits par peur d'être victimes d'agressions racistes, ce qui ne va pas dans le sens de l'intégration des minorités et des migrants prônée dans l'UE », a-t-il souligné. La discrimination est très répandue en Belgique Plus des trois quarts (76 %) des Nord-Africains de Belgique estiment que la discrimination sur base de l'origine ethnique est très répandue. En Italie (94 %) et en France (88 %), ce sentiment est plus élevé encore. Il l'est par contre un peu moins aux Pays-Bas (66 %) et en Espagne (54 %). Au sein de la communauté turque, 69 % des personnes établies en Belgique trouvent que la discrimination est très répandue, soit davantage que dans tous les autres pays européens où cette communauté est importante. Cette perception se retrouve à 61 % aux Pays-Bas, à 58 % au Danemark, à 52 % en Allemagne, à 32 % en Autriche et à peine 15 % en Bulgarie, pays voisin de la Turquie. La minorité Rom déplore l'ostracisme dont elle est victime en Hongrie, en République Tchèque, en Slovaquie, en Grèce et en Pologne. Les Roumains, pourtant citoyens de l'UE depuis 2004, ne se sentent pas acceptés en Italie, et les Brésiliens se disent mal aimés au Portugal. (afp, belga) Le Centre pour l'égalité des chances confirme Les résultats de l'enquête indiquent « que les crimes et délits à caractère raciste sont bien plus répandus que ce que les statistiques officielles ne le laissent entendre », selon un communiqué diffusé par le Centre pour l'égalité des chances. Ces crimes restent « largement absents des statistiques policières de criminalité, et pour cause : la plupart (82 %) des personnes qui ont subi une agression ''grave'' n'ont pas rapporté ces faits à la police », souligne le Centre. « Manque de confiance dans les services de police, mais aussi dans les institutions en général : l'étude montre également une très grande résignation des personnes d'origine étrangère », souligne le centre. « Elles n'ont pas confiance dans les mécanismes censés les protéger (64 % pensent que signaler une agression ou une discrimination ''ne change rien'') ou elles ne connaissent pas ces mécanismes (80 % ne connaissent pas d'organisation pouvant les assister dans leurs démarches) », ajoute-t-il. Par conséquent, les auteurs de ces faits restent impunis, les victimes ne peuvent pas obtenir réparation et les pouvoirs publics ne peuvent pas prendre les mesures nécessaires pour briser ce cercle vicieux, poursuit le Centre. « Il faut absolument lutter contre cette résignation de la part des victimes », ajoute Edouard Delruelle, directeur francophone du Centre, « mais aussi contre une certaine usure ou un désintérêt de la part de la société en général ». « Informer les gens de leurs droits et de leurs moyens d'action constitue un travail considérable mais il est indispensable si l'on veut briser ces engrenages qui nuisent à l'ensemble de la société », poursuit-il. C'est la raison pour laquelle le Centre pour l'égalité des chances soutient les initiatives des régions et des communautés pour développer un réseau de services locaux de lutte contre la discrimination.