La 3ème réunion de haut niveau, cette semaine à Rabat, s'est attachée à réduire le fossé existant toujours entre les principes et la réalité en matière de protection des droits des populations migrantes. Foi d'Ahmed Herzenni, le président du CCDH instigateur de ce forum euroméditerranéen du 6 au 9 mai, en partenariat avec l'Institut danois et le Centre national jordanien pour la même cause des droits de l'homme, le Maroc est bien armé pour se muer en «un modèle de référence en tant que terre d'accueil et de transit, voire de leadership régional en matière de respect et de protection des droits des migrants». Selon les protagonistes nationaux et étrangers, la protection des droits de l'homme migrant passe impérativement par «l'échange des expériences et les actions de plaidoyer aussi bien au niveau national que régional». Remarqué pour l'une de ses premières grandes sorties officielles depuis sa nomination à la présidence du CCME (Conseil de la communauté marocaine à l'étranger), Driss El Yazami a mis en avant le constat inspiré d'une faible représentativité statistique des flux migratoires qui ne représentent que 3% de la population mondiale, en relevant que «la question migratoire est devenue, malgré sa relative faiblesse démographique, une des questions essentielles de l'agenda politique et social international, mais aussi national». Même son de cloche chez Herzenni qui insiste également sur la dimension nationale à ne pas négliger : «les causes de la migration et les dangers et violations auxquels sont confrontés les migrants interpellent les institutions nationales des droits de l'homme qui ont un rôle à jouer pour contribuer à la protection des droits de ces personnes». L'évènement de ce début de semaine en valait la chandelle, avec un plateau relevé de participants représentant les organisations et institutions de leurs pays respectifs en charge des droits de l'homme, venus de France, du Danemark, d'Irlande, de Suisse, de Norvège, d'Allemagne, de Grèce, des Pays-Bas et de Suède, côté Nord de l'hémisphère qui ont croisé la réflexion avec leurs partenaires de la rive Sud parmi lesquels ont répondu présents, outre le Maroc, la Tunisie, l'Egypte, l'Algérie, la Jordanie, le Qatar, l'Arabie Saoudite, la Mauritanie, la Palestine et le Yémen. Il faut bien souligner que ces initiatives politiques et sociales viennent en renfort aux recommandations prononcées dans la Déclaration de Rabat à l'issue de la première Conférence ministérielle Europe-Afrique de juillet 2006 entièrement consacrée à la problématique de la migration et du développement. L'on se souvient bien encore de la résolution centrale invitant les pays de la rive occidentale à s'engager dans une véritable dynamique de co-développement en aide aux formations socioéconomiques en difficulté avec la gestion des trafics migratoires en territoire d'origine ou de transit. C'était une première dans les annales pour que le Vieux continent se libère de son obsession sécuritaire afin de s'engager dans les projets de développement durable et le transfert des technologies facilitant le développement endogène des pays du Sud. Pas de co-développement sans droits humains C'est pourquoi les recommandations du dialogue euroméditerranéen de Rabat ont leur importance sur un volet aussi sensible que la dignité de l'homme, le droit à l'insertion professionnelle, le regroupement familial… Bref, tous les aspects auxquels est quotidiennement confronté le migrant et sur lesquels ses droits fondamentaux doivent être garantis et préservés. Rappelons que cette troisième rencontre a pris le relais des précédentes sessions organisées en Jordanie et au Danemark dédiées respectivement aux questions du terrorisme et de la discrimination. En particulier, les débats ont été focalisés sur les deux grandes thématiques livrées à la réflexion des délégués et des participants. Il s'agit des thèmes liés à «la législation internationale, régionale et nationale relative à la protection des migrants : état des lieux, opportunités et défis» d'une part, et «la mise en application des droits des migrants et le rôle des institutions nationales dans la promotion et la protection de leurs droits», d'autre part. Si le Directeur de l'Institut danois, Morten Kjaerum a mis l'accent sur l'utilité d'échange des expériences entre pays dans le domaine du rôle exercé par leurs institutions nationales ad hoc, en revanche le Commissaire général jordanien du Centre d'Amman, Chaher Bak a insisté sur la nécessité de privilégier le dialogue entre les pays d'origine et d'accueil dans la recherche du consensus autour de la gestion de la problématique migratoire. C'est la voie qui s'impose aux acteurs des deux rives en vue de mettre un terme à la détérioration des conditions d'émigration où les ressortissants sont victimes de discrimination, de racisme, de ségrégation culturelle ou en proie aux problèmes d'intégration.