Le président de la Cour pénale internationale a demandé samedi aux autorités libyennes la remise en liberté immédiate de quatre membres du personnel de la CPI arrêtés dans le sud du pays pour avoir tenté, semble-t-il, de remettre des documents à Saïf al Islam Kadhafi. Selon un avocat libyen et la milice qui détient le fils cadet de Mouammar Kadhafi, une délégation de la CPI s'est rendue dans la ville de Zentane, où Saïf al Islam est détenu depuis sa capture en novembre. «Lors d'une visite (à Saïf al Islam), l'avocate (australienne Melinda Taylor) a tenté de lui remettre des documents, des lettres qui constituent un danger pour la sécurité de la Libye», a déclaré Ahmed al Jehani, l'avocat libyen qui fait office d'intermédiaire entre le gouvernement libyen et la CPI, basée à La Haye. A La Haye, le président de la CPI, le juge Sang-Hyun Song, a publié dans la soirée un communiqué dans lequel il se déclare «très préoccupé par la sécurité de notre personnel en l'absence de tout contact avec lui». «Ces quatre fonctionnaires internationaux bénéficient de l'immunité (diplomatique) lorsqu'ils sont en mission officielle pour le compte de la CPI. J'appelle les autorités libyennes à prendre sur le champ toutes les mesures nécessaires pour garantir leur sécurité et pour les remettre en liberté». Ahmed al Jehani a déclaré que les documents émanaient notamment de l'ancien bras droit de Saïf al Islam, Mohammed Ismail. «Elle n'est pas en prison. Elle est détenue dans une résidence et ses collègues sont avec elle», a-t-il ajouté, précisant qu'il espérait qu'elle serait libérée dans la journée. Mais le chef de la brigade à l'origine de la capture de Saïf al Islam n'a pas confirmé cette information, ajoutant que «du matériel d'espionnage et d'enregistrement» avait été découvert lors de la fouille des délégués de la CPI. Ahmed al Jehabi a mentionné la saisie d'un stylo équipé d'un appareil photo et d'une montre dotée d'un enregistreur. «Nous les avons interrogés et nous avons reçu un certain nombre d'appels du gouvernement nous ordonnant de les relâcher. Mais nous sommes nationalistes et nous avons refusé», a déclaré le chef de la milice Alajmi Ali Ahmed Al Attiri. Le sort de Saïf al Islam fait l'objet d'un bras de fer entre la CPI et Tripoli. La Libye veut le juger pour meurtre, corruption et viol et refuse de le remettre à la CPI, qui l'a inculpé de crimes contre l'humanité en juin 2011. Xavier-Jean Keita, qui dirige le bureau de conseil public pour la défense (OPCD) de la CPI, pour lequel travaille également Melinda Taylor, a indiqué dans un message texte que la CPI avait convoqué une «réunion de crise». L'OPCD représente les intérêts des personnes inculpées par la CPI avant la nomination formelle de leurs avocats. Keita a déjà critiqué les conditions de détention de Saïf al Islam, soulignant que ses services n'avaient pas pu le rencontrer sans la présence de ses gardiens. Al Attiri a déclaré que la CPI avait demandé à voir seule le fils de Mouammar Kadhafi (tué en octobre 2011), mais que la requête avait été rejetée. «Nous avons piégé l'équipe de la CPI en leur présentant un de nos hommes. Nous leur avons dit qu'il était sourd et illettré mais c'est en fait un sage qui parle quatre langues dont l'anglais», a-t-il expliqué. «C'est là que nous avons découvert que l'avocate possédait une lettre écrite en anglais qu'ils voulaient le voir signer, admettant qu'il n'y a pas de loi en Libye et demandant son transfert à la CPI. Quand nous avons fouillé cette femme, nous avons trouvé qu'elle avait une lettre de Mohammed Ismail pour Saïf et une autre écrite en réponse à Ismail.»