• Pour Meryem, la vie est devenue monotone dans cet appartement où elle doit supporter chaque jour les commentaires de Lalla Fatma et les réactions nerveuses de Zoubida. Elle essaie de sortir le soir avec Karim pour respirer un peu d'air frais mais, le plus souvent, quand il revient de son travail, il est fatigué ! Il s'allonge sur un matelas pour regarder la télévision et ne cesse de réclamer, tantôt un verre d'eau, tantôt un café avec quelque chose à grignoter. Le fait de le voir allongé et de le servir donne l'impression à Meryem d'être une esclave ou une servante. Mais, murmure-t-elle, « c'est mon mari et je dois le servir ». Ce mot réveille en elle le démon révolutionnaire qui l'a toujours agitée depuis son enfance. Elle veut que la femme soit l'égale de l'homme. « Pourquoi cette supériorité masculine ? » « Pourquoi notre société donne-t-elle une place privilégiée à l'homme et condamne la femme à une position de subalterne ? » Elle suit de temps à autre ce que font les mouvements féministes mais, dit-elle, ils n'arrivent pas à changer le monde et à briser le carcan des tabous. A propos de télévision justement, dans la soirée, un incident a eu lieu entre Meryem, Zoubida et Hatim, frère benjamin de Karim. Chacun voulait voir l'émission qui lui plaisait. Meryem voulait suivre un documentaire sur la civilisation arabe. Pour Zoubida, c'est le feuilleton turc dont elle ne veut rater aucun épisode. Quant à Hatim, ce qui l'intéresse, c'est le match de football. Hatim trouve la solution mais avant de sortir, il va donner une bonne claque à Zoubida et se dépêche pour aller suivre le match dans un café qui se transforme, le temps de la retransmission, en un stade avec les encouragements des uns, les critiques des autres, voire des insultes. Parfois, ça peut donner lieu à des bagarres entre les supporters de chaque club. En fin de compte, c'est Zoubida qui a eu le dernier mot. Meryem se retire dans sa chambre pour pleurer amèrement. Karim, constatant, à son arrivée, l'état dans lequel était Meryem, il la console et lui demande de se préparer pour sortir dîner dehors. Cette fois-ci, sans demander l'autorisation à Lalla Fatma. Dans cet appartement, il n'y avait qu'un seul poste de télévision. Le petit poste qui se trouve dans la chambre à coucher des parents était réservé à Haj Brahim et était branché sur deux stations : « Ikrae » et « Al Jazira ». Le soir, il suivait les informations sur la première chaîne nationale qui se prolongeaient parfois comme un feuilleton égyptien.