Le cinéma, art populaire par excellence, même quand il est relayé par la télévision, a trouvé, dès ses origines, un terrain d'élection dans cette forme de récit qu'est le mélodrame. Parler du mélodrame comme d'un genre à part entière, au même titre que le Western, le film noir ou la comédie musicale, est sans doute impossible. Le mélodrame paraît échapper à toute tentative de définition qui, quelle qu'elle soit, est tout à la fois trop restrictive et trop lâche. Relever quelques-unes des constantes apparentes conduit très vite à rapprocher des films n'entretenant que bien peu de rapports entre eux. L'origine même du terme ne permet guère de préciser réellement les choses. Qu'y a-t-il entre le mélo cinématographique et le mélodrame, mélange de théâtre et de musique ? Certaines caractéristiques nationales que permet de dégager l'étude des productions indienne, égyptienne, voire même latino-américaine, n'autorisent pas la généralisation. En fait, le mélo cinématographique, dans son acceptation la plus commune, s'apparente surtout au roman et au théâtre populaire du 19ème siècle. En ce sens, le mot du cinéaste Douglas Sirk, définissant le mélodrame comme «L'archétype d'un cinéma qui se rattache au drame», demeure dans son imprécision même le plus satisfaisant. Le mélodrame serait alors au peuple ce qu'est le drame aux classes dominantes, et ce, pas seulement dans le rapport du genre et de son public, mais également dans la définition des personnages et des moteurs de l'action. Par ailleurs, Sirk déclarant que «le cinéma, c'est le sang, les larmes, la violence, la haine, la mort et l'amour», ne se livrait-il pas à un inventaire des principales composantes du mélodrame ? Dans un premier temps, mélodrame est pratiquement synonyme de film destiné à faire pleurer. Le signe de reconnaissance ne serait donc pas dans la nature même de l'œuvre, mais dans l'effet qu'elle est appelée à produire, ce qui distinguerait déjà sensiblement le mélodrame des genres ordinairement reconnus comme tels. Autre expression de cette singularité : Le passage du terme de «mélodrame» à celui de «mélo», qui permet une utilisation indifférenciée comme substantif et comme adjectif. Le mot peut ainsi servir à qualifier l'œuvre au stade même de la dénomination. La confusion du film, de l'effet qu'il est censé produire, et des moyens mis en œuvre est effective. Ainsi donc, la confection apparaît comme tout à fait déterminante. Les caractéristiques essentielles du mélodrame pourraient alors tenir dans le jeu des comédiens, l'utilisation de la musique, la mise en place du récit, la fabrication de l'intrigue. Le mélodrame est extrêmement lié, de façon plus étroite encore que les autres genres, aux conditions de production nationales et chronologiques. La sensibilité du public, sa réceptivité, varient dans des proportions considérables. Tel film apparaissant aujourd'hui comme la relation d'un drame particulièrement poignant peut parfaitement provoquer le rire. Par ailleurs, un mélodrame peut très bien fonctionner comme tel dans un pays donné et laisser indifférent un public étranger. On retrouve logiquement ces particularismes au niveau des structures du mélodrame, qui varient sensiblement suivant la nationalité du produit. Mais au-delà de ces écarts existant entre les différents pays producteurs de mélodrames, il importe surtout pour ce qui nous concerne où la confusion entre mélodrame et mélodramatisme n'est pas encore relevée.