Changer de (couleur) de peau est devenu la hantise de nombreuses filles à la peau foncée, au grand bonheur des spéculateurs qui inondent le marché de produits «éclaircissants». La demande s'accroit, l'offre lui emboîte le pas. Résultat de nombreuses adeptes se retrouvent plus que déçues du résultat. Les effets sont encore plus catastrophiques quand il s'agit d'une crème bon marché en vente libre. “Shirley” est un produit autour duquel la controverse est animée. Taxé de véritable danger pour la peau, et donc pour la santé, il a été, il y a belle lurette, dénoncé par le Centre National de Pharmacovigilance. Se présentant en petit tube blanc de la forme d'un rouge à lèvre, la crème qu'on retrouve sur tous les étalages de produits cosmétiques et d'hygiène bon marché, ainsi que dans les souks et marchés populaires, exposée au soleil et défiant toutes les intempéries, est made in Taiwan. Sa vente à un prix très bas la rend accessible aux bourses les plus dégarnies. En 2008, le Centre National de Pharmacovigilance a reçu un nombre impressionnant de plaintes concernant les effets cutanés indésirables engendrés par l'utilisation de ladite crème. Pas moins de 174 cas de toxidermies de femmes âgées entre 16 et 45 ans ont été décelés par quelque 25 dermatologues, dont 60% suite à l'utilisation de la crème “Shirley”, sans compter les cas non déclarés. Les dermatologues estiment que ce produit est nocif et soulignent le non assujettissement aux normes sanitaires. L'étiquetage du produit ne contient aucune indication ni sur sa composition, ni sur les modes d'emploi et encore moins sur les risques d'effets indésirables éventuels. La crème incriminée contient de l'hydroquinone, comme l'ont démontré les résultats préliminaires de son analyse chimique, entreprise par le Centre National de Pharmacovigilance. Il s'agit d'une solution utilisée dans le traitement des films photographiques. Elle réduit les sels d'argent exposés, invisibles, en argent métallique. En médecine, l'hydroquinone est utilisée sur la peau pour en réduire la couleur sans risque de dermatoses. Toutefois, cet usage est interdit par l'Union européenne depuis février 2001. Interdiction qui trouve sa justification dans la crainte d'effets cancérigènes et de «complications graves». La réglementation européenne interdit, depuis, l'importation et la production de tout produit comportant plus de 2% d'hydroquinone car cette substance favorise le cancer de la peau. Les crèmes éclaircissantes permettent en général la diminution de la quantité de mélanine, un élément protégeant la peau des rayons ultra-violets et pouvant favoriser indirectement le cancer. La substance est interdite d'utilisation dans les produits cosmétiques par les autorités sanitaires marocaines depuis 2004 après la découverte des effets fâcheux de l'hydroquinone sur la peau: irritation, allergies de contact, dépigmentations en confettis des zones induites de crème, et plus rarement à distance, de l'acné et des atrophies cutanées. Pour pallier ce problème médical ardu, une campagne de sensibilisation au profit des professionnels de la santé a été entreprise par la Société Marocaine de Pharmacovigilance en décembre 2008. Une procédure administrative a été mise en cours afin d'obtenir le retrait de la crème en question du marché et d'imposer une sanction pénale aux vendeurs clandestins. Le Centre National de Pharmacovigilance a émis certaines recommandations à l'attention de tous les professionnels de la santé afin que ces derniers sensibilisent les utilisatrices aux risques encourus par l'utilisation de ladite crème. Le centre conseille également la déclaration de toutes irruptions cutanées suspectes et recommande aux pharmaciens de ne pas délivrer des dermocorticoïdes aux patients sans prescription médicale. A chaque carnation son charme. Les mines laiteuses cherchent un hâle à coups d'expositions prolongées au soleil ou, pire, de bronzage artificiel ; les brunettes cherchent la pâleur dans les crèmes blanchissantes. Les unes et les autres faisant fi des dangers qu'elles font encourir à leur santé. Elles oublient que la perfection n'existe pas et que c'est l'essence de leur être qui habille leur extérieur.