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A la veille de l'ouverture de la campagne, Le pouvoir agite le spectre de la guerre civile
Publié dans L'opinion le 15 - 08 - 2024

A 48 heures de l'ouverture de la campagne électorale algérienne, sous l'impulsion du ministère de la défense nationale, les Algériens sont conviés à un scénario auquel ils se sont habitués depuis de nombreuses années : le danger de la guerre civile et du terrorisme
Alors que la campagne électorale était sur le point de s'ouvrir sans, vraiment, emballer le corps électoral, les médias algériens, à leur tête les chaînes de télévision publiques et privées diffusent les images d'un jeune homme avouant son appartenance au Mouvement pour l'Autodétermination de la Kabylie (MAK), résident en France et arrêté au port de Bejaïa le 4 août, à bord d'un véhicule chargé d'armes et d'explosifs en provenance de Marseille.
Dix jours plus tard, soit le 14 août et à la veille du lancement de la campagne électorale des trois candidats à la magistrature suprême, le Ministère de la Défense Nationale livre à l'opinion publique les détails de cette affaire qui a pour objectifs de « semer le trouble et l'insécurité » et « perturber le bon déroulement de l'élection présidentielle algérienne du 7 septembre » comme précisé dans le communiqué du MDN. Voilà, tout est dit. L'élection présidentielle est menacée et la stabilité du pays, avec. C'est une guerre civile qui se profile à l'horizon. On appelle à « la mobilisation du peuple autour des ses dirigeants ».
L'affaire est loin de convaincre l'opinion publique algérienne tant la ficelle est grosse. Un véhicule transportant « 46 armes à feu de différents calibres, une quantité importante de cartouches, de balles et de projectiles de divers calibres, 12 jumelles, 10 armes blanches, un ensemble de pièces et accessoires pour armes à feu, des équipements et des matières premières pour la fabrication de munitions, un appareil de géolocalisation GPS, des ordinateurs et téléphones portables et divers autres objets. », traverser la méditerranée à partir du port de Marseille.
Peu importe, pour les décideurs et leurs scénaristes, ce que pourrait penser le citoyen algérien. « Il doit se convaincre que l'Algérie est menacée dans sa stabilité et dans son intégrité. Par conséquent, tout le monde doit approuver et soutenir les mesures répressives prises à l'encontre des citoyens de cette région frondeuse qu'est la Kabylie. Ainsi, l'on n'a enregistré nulle condamnation de l'arrestation et l'emprisonnement de 21 citoyens, dont une femme, accusés d'appartenir à un réseau commandité par des services secrets étrangers ». Des services secrets étrangers dont on ne cite pas le nom dans le communiqué du ministère de la Défense Nationale.
Bien que la campagne électorale s'ouvre de manière très timide et rien n'indique qu'elle sera plus animée dans les jours à venir, les décideurs ne se soucient guère de la compétition qui met aux prises les trois candidats choisis. Les résultats sont connus d'avance et aucun doute n'est permis quant à l'issue finale de la joute électorale dont le vainqueur n'est autre que Abdelmadjid Tebboune qui succèdera à lui-même. Le pari des décideurs est tout autre. Il porte sur le taux de participation et surtout sur celle de la Kabylie. Dans les hautes sphères du pouvoir algérien, on n'est pas prêt d'oublier l'historique boycott de la Kabylie en 2019. Les deux principales wilayas de la région, celles de Tizi-Ouzou et de Bejaïa, n'ont pas vu tomber un seul bulletin dans une seule urne dans les bureaux de vote restés fermés sous la pression populaire.
Pour atteindre l'objectif d'un important taux de participation, il n'y a pas mieux que de brandir la carte de la guerre civile pour mobiliser la population appelée à répondre aux « ennemis de la nation » par une forte participation à la présidentielle pour démontrer l'alliance sacrée entre les tenants du pouvoir et la population.
Quant au défi de briser le boycott kabyle on use de deux armes. D'abord, celle de choisir un candidat du plus vieux parti de l'opposition, né au lendemain de l'indépendance en 1963, sous la direction de l'un des historiques du déclenchement de la guerre de libération, Hocine Aït Ahmed. Même si ce parti a beaucoup perdu de sa superbe et n'est plus que l'ombre de lui-même, il servira, tout de même, à briser le boycott ne serait-ce que par la participation d'une infime parti de la population kabyle. A cela s'ajoute la deuxième arme, celle de la répression. Cette arme a commencé à servir avec l'arrestation de 21 personnes accusées de terrorisme.
Il est à rappeler que l'appel au boycott est passible de sanctions judiciaires. C'est ce qu'a appris, à ses dépens, le journaliste Merzoug Touati placé depuis quelques jours sous contrôle judiciaire après avoir frôlé de justesse la case prison. Il est accusé d'atteinte à la personne du président de la république et incitation au boycott des élections.
Youcef Aouchiche (40 ans), le candidat du FFS, sa seule ambition est de se voir à la tête de l'un des trois pôles politiques qui animeront, dorénavant, la scène politique algérienne telle que pensée par le cerveau de la présidence, le colonel Mohamed Chafik Mesbah, conseiller à El-Mouradia.
Le troisième candidat, évoluant sous la bannière islamiste, Abdelaali Hassani Cherif (57 ans), président du Mouvement de la Société pour la Paix, n'a aucune prétention de bousculer le candidat des décideurs. Il ne manque pas de rappeler à son entourage que pour lui « c'est un honneur que de se trouver dans une compétition électorale avec le président Tebboune ».

In Atalayar


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