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Tourisme oasien : Des écosystèmes fragiles, à développer sans dénaturer [INTEGRAL]
Publié dans L'opinion le 23 - 07 - 2023

Un nombre croissant de touristes découvrent les expériences uniques que les zones oasiennes marocaines peuvent offrir. Zoom sur un potentiel à exploiter avec précaution.
Au cœur de l'oasis de Tinghir, dans une petite auberge nichée à la lisière des palmiers, quelques touristes européens coulent des jours heureux. « Je viens en famille passer quelques semaines de vacances au Maroc depuis 2003. Nous avons tout fait : les villes impériales, le moyen Atlas, la façade méditerranéenne... Mais depuis que nous avons visité les oasis au printemps dernier, c'est un véritable coup de foudre », raconte Xavier Nicollier, entrepreneur belge qui est de retour à la région afin de prendre le temps de mieux découvrir cette nouvelle catégorie de destination. « C'est très différent. Comme d'autres régions du Maroc, les gens sont très accueillants, mais il y a une authenticité très particulière », commente le touriste qui passe ses journées « à lire, à flâner et à apprécier la Dolce Vita des oasis ». D'autres clients de l'hôtel s'apprêtent pour leur part à entamer une journée plus chargée avec une randonnée préparée à l'avance, avec à la clé, une nuitée en bivouac en plein désert.
Un patrimoine particulier

Si les oasis marocaines ont depuis très longtemps attiré les visiteurs nationaux et internationaux, force est de constater que l'offre d'expériences diverses et variées s'est étoffée ces dernières années. « Au-delà du tourisme de détente ou d'aventure, on voit beaucoup de visiteurs qui s'intéressent particulièrement au patrimoine local, notamment les modes ancestraux d'utilisation et de partage de l'eau », explique Brahim Bakass, guide spécialisé dans le tourisme de nature. Ainsi, en plus des paysages à couper le souffle, les oasis offrent aux visiteurs des expériences d'immersion dans des communautés qui se sont construites autour du partage et de l'adaptation à la rareté et à l'adversité. Des expériences sociales où la solidarité et le savoir vivre-ensemble sont au cœur des relations et des interactions. Cette richesse naturelle est culturelle a d'ailleurs justifié la classification par l'UNESCO des provinces de « Ouarzazate », « Errachidia » et « Zagora » comme composantes de la « Réserve de Biosphère des Oasis du Sud Marocain »

Offre touristique du Drâa-Tafilalet
En capitalisant sur ce patrimoine naturel et humain, le ministère du Tourisme continue de développer des filières touristiques dédiées. Lors d'une récente tournée dans la région de Drâa-Tafilalet, le Chef du gouvernement Aziz Akhannouch avait par ailleurs présidé la signature d'une série de conventions régionales relatives au développement du tourisme de montagne et des oasis dans la province, pour un coût global de 283 millions de dirhams. Ces projets portent notamment sur la mise à niveau des sites touristiques locaux à renommée mondiale, l'aménagement de circuits de tourisme sportif dans les oasis, la valorisation de l'artisanat et le développement de circuits de tourisme autour du patrimoine géologique et minier. Cette visite a été également l'occasion pour Aziz Akhannouch de suivre l'évolution des programmes relatifs à la promotion des offres touristiques à Ouarzazate, à la valorisation du tourisme dans la Kasbah de Taourirt, au soutien du tissage artisanal du Tapis à Tazenakht, en plus du programme relatif à l'industrie cinématographique dans la ville.

4 filières touristiques
« Dans la feuille de route du tourisme, nous retrouvons Drâa-Tafilalet dans 4 filières touristiques, à savoir : « Desert & Oasis Adventure », « Nature, Trekking & Hiking », « Circuits culturels » et enfin la filière « Nature et découvertes » pour les touristes nationaux qui bénéficieront évidemment des 3 trois autres filières », avait pour sa part déclaré Fatim-Zahra Ammor, ministre du Tourisme, de l'Artisanat et de l'Economie sociale et solidaire. Afin de développer les prérequis nécessaires à la valorisation de cette offre en matière d'infrastructures, d'hébergement, d'animation et de services, la ministre avait appelé les diverses parties prenantes concernées à « l'importance de libérer les synergies et travailler ensemble dans le but de faire un vrai saut quantitatif et qualitatif dans la région ». Une dynamique qui apportera certes une valeur ajoutée économique à la région, mais qui devra cependant respecter les spécificités et les fragilités des zones oasiennes, tout en bénéficiant aux populations locales qui sont les premières à donner leur attrait aux oasis du pays.


3 questions à Brahim Bakass « La nature des milieux oasiens impose de concevoir le développement des filières de tourisme local sous le prisme de la durabilité »
Quels sont les types de touristes qui fréquentent les oasis marocaines ?
-Il existe au moins trois types de tourisme qui peuvent être actuellement constatés au niveau des destinations oasiennes marocaines. Il y a d'abord les adeptes de randonnées et des grands espaces désertiques qui trouvent dans les zones oasiennes les paysages et défis sportifs qu'ils espèrent justement trouver. Il y a ensuite les personnes qui cherchent des expériences de dépaysement et que ces espaces font rêver pour la qualité des expériences culturelles et humaines qu'on peut y trouver. Enfin, il y a les visiteurs qui ont des profils de scientifiques et qui visitent les milieux oasiens pour mieux découvrir les patrimoines naturels, hydrauliques, anthropologiques et immatériels.
Selon vous, de quelle manière convient-il de développer le tourisme oasien au Maroc ?
-Je pense que la nature des milieux oasiens impose de concevoir le développement des filières de tourisme local sous le prisme de la durabilité. Il convient ainsi d'adapter les structures d'accueil à la petite taille des zones oasienne, tout en puisant pour cela dans les patrimoines existants, notamment en termes d'architecture. Le développement de l'offre touristique au niveau des oasis doit également ne jamais perdre de vue les spécificités intrinsèques des oasis afin de ne pas les altérer.
Comment s'assurer justement que le développement du tourisme oasien ne contribue pas à la dégradation de l'environnement ou du patrimoine local ?
-Les écosystèmes oasiens sont fragiles et les équilibres écologiques instaurés notamment par les savoir-faire des populations sont également délicats. On voit parfois des structures touristiques qui s'installent au cœur de certaines zones oasiennes, ce qui est, je pense, un mauvais exemple à suivre. Afin de trouver le bon équilibre entre développement générateur de revenus et protection du patrimoine oasien, il faut absolument construire une filière touristique durable et non-invasive, qui s'adapte au milieu oasien et à ses capacités d'accueil, sans chercher à y implanter des structures et services qu'on peut trouver dans le tourisme de masse et qui ne sont pas du tout adaptés aux particularités et aux fragilités des zones oasiennes.

UNESCO : Une réserve de biosphère pour les zones oasiennes marocaines
En reconnaissance de leur richesse naturelle et culturelle, les zones oasiennes marocaines ont été classées en novembre 2020 par l'UNESCO dans le cadre de son Programme mondial de l'Homme et de la Biosphère (MAB). Ainsi, cette zone (voir infographie) a été reconnue comme « Réserve de Biosphère des Oasis du Sud Marocain ».
Le concept de réserves de biosphère a été développé à l'origine en 1974 et totalise actuellement plus de 480 sites dans plus de 100 pays. Le Réseau des réserves de biosphère offre l'occasion de tester, dans des contextes particuliers, des approches qui, en alliant connaissances scientifiques et modalités de gouvernance, visent à réduire la perte de biodiversité, améliorer les moyens de subsistance des populations et favoriser les conditions sociales, économiques et culturelles essentielles à la viabilité du développement durable. A noter que le Royaume compte trois autres réserves de biosphère de ce genre : l'arganeraie, la cédraie et la Réserve de biosphère intercontinentale de la Méditerranée.

L'info...Graphie
Patrimoine architectural : La valorisation des ksours et kasbahs mise en avant à Copenhague
Pierres angulaires des régions oasiennes, les ksours et kasbahs constituent un patrimoine architectural autour duquel s'est structurée la vie sociale et culturelle des communautés locales. Les efforts et l'expérience du Royaume en matière de valorisation durable de ces bâtisses ont été mis en avant, le 4 juillet 2023 à Copenhague, à l'occasion de la 28ème édition du Congrès mondial des architectes de l'Union internationale des architectes (UIA). Ainsi, lors d'une présentation organisée au stand du Maroc, le directeur du Programme national de valorisation des Ksours et Kasbahs au ministère de l'Aménagement du territoire national, de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Politique de la ville, Bouazza Barka, a passé en revue les résultats du programme qui a contribué à l'amélioration des conditions de logement des populations locales et au traitement des différentes formes d'habitat insalubre au profit de 23.000 habitants de 22 ksours pilotes.
Au volet économique, M. Barka a expliqué que le programme contribue à l'amélioration des conditions des populations locales à travers la promotion d'activités génératrices de revenu liées aux travaux de rénovation et le renforcement des capacités des coopératives et des associations actives au sein des ksours ciblés. Le responsable a également souligné la vocation environnementale du programme de valorisation durable des ksours et kasbahs qui préconise le recours aux matériaux écologiques reconnus pour leur efficacité énergétique, pour la réalisation des travaux de réhabilitation ou de restauration.


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