Le Panchir tombé, les Talibans ont appelé les ex-forces armées gouvernementales de l'Afghanistan à se joindre à eux pour former les nouveaux services de sécurité du pays. Pendant 20 ans, les forces armées afghanes ont combattu les Talibans aux côtés des Occidentaux, mais ces derniers ont quitté le pays, et même si le fils du commandant Massoud qui dirige le Front national de résistance au Panchir ne s'avoue pas vaincu, désormais, les Talibans contrôlent tout le pays. « Ces forces de sécurité qui avaient été formées doivent être recrutées à nouveau. Le prochain gouvernement réorganisera l'encadrement avec les cadres qui ont été formés, et ils seront rendus aux organisations de sécurité du pays », a expliqué le porte-parole en chef des Talibans, Zabihullah Mujahid. Nichée dans les imposantes montagnes de l'Hindu Kush, la vallée du Panchir n'a qu'une seule et étroite entrée. Elle n'était tombée ni sous l'occupation soviétique dans les années 1980, ni durant l'ascension des Talibans vers le pouvoir une décennie plus tard. Le fils du commandant Massoud (assassiné par al-Qaïda), Ahmad, avait appelé à la fin des combats dimanche. Le jeune Massoud, qui a fait ses études en Grande- Bretagne, avait déclaré que ses forces étaient prêtes à déposer les armes, mais seulement si les Talibans acceptaient de mettre fin à leur assaut. Tard dans la journée de dimanche, on a vu des dizaines de véhicules chargés de combattants Talibans envahir la vallée du Panchir. Dans une autre déclaration lundi, Massoud a accusé les Talibans d'avoir attaqué et il a promis de continuer à se battre. Il a exhorté les Afghans à se joindre à leur combat contre les Talibans et a fustigé la communauté internationale de donner une plateforme aux Talibans en ouvrant des négociations avec eux. Le porte-parole en chef des Talibans a cherché à rassurer les habitants du Panchir, en leur assurant qu'ils seraient en sécurité, alors que des dizaines de familles auraient fui dans les montagnes avant l'arrivée des soldats du nouveau pouvoir. Un gouvernement qui se fait toujours attendre Sur le plan politique, la composition du nouvel exécutif taliban, initialement escomptée en fin de semaine passée, se fait toujours attendre. Le porte-parole Mujahid a précisé que la formation d'un gouvernement « intérimaire » serait annoncée dans « les prochains jours », une fois les dernières « questions techniques » résolues. Des analystes estiment que les islamistes ont eux-mêmes été pris de court par la rapidité de leur accession au pouvoir et n'ont pas eu le temps de préparer la suite. Le mouvement a promis de mettre en place un gouvernement « inclusif », s'engageant aussi à respecter les droits des femmes, bafoués lors de son premier passage au pouvoir (1996-2001). Mais ses promesses peinent toujours à convaincre. Des universités privées afghanes ont rouvert lundi. Les Talibans ont précisé dans un décret que les étudiantes seraient tenues de porter une abaya noire, assortie d'un niqab couvrant le visage à l'exception des yeux. Ils ont confirmé que l'enseignement se ferait, dans la mesure du possible, dans des classes non mixtes. Le Qatar en partenaire incontournable Depuis les attentats meurtriers à l'aéroport de Kaboul fin août, pendant les évacuations, les dirigeants occidentaux restent sur leur garde avec les Daech de Khorassane. Et c'est justement pour évoquer la réouverture de l'aéroport international et ces évacuations que le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken est arrivé à Doha lundi soir. Cette réouverture est une priorité pour faire parvenir l'aide humanitaire dont le pays a cruellement besoin, et évacuer les ressortissants étrangers encore présents et les Afghans détenteurs de visas qui le souhaiteraient. Diplomatiquement, le Qatar est devenu essentiel depuis la prise de pouvoir des Talibans, l'émirat du Golfe conservant des liens étroits avec le nouveau pouvoir afghan. Antony Blinken doit aussi exprimer la « profonde reconnaissance » de Washington au Qatar pour le soutien apporté aux efforts d'évacuation fin août de dizaines de milliers de ressortissants américains et d'Afghans ayant collaboré avec les Etats- Unis. Il ne devrait pas rencontrer de représentants Talibans à Doha, où ils ont leur bureau politique, bien qu'un tel dialogue ne semble pas totalement exclu à l'avenir.
Washington arrache aux Talibans un nouvel engagement pour des évacuations
Le chef de la diplomatie américaine a obtenu mardi des Talibans, au cours d'une visite officielle au Qatar, un nouvel engagement ferme sur le fait que les Afghans qui souhaitaient quitter le pays pourraient le faire sans entrave. Le Qatar a de son côté réaffirmé que l'aéroport de Kaboul allait rouvrir bientôt, sans pour autant donner de date. Antony Blinken, accompagné du secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, a déclaré lors d'une conférence de presse avoir reçu l'engagement des nouveaux maîtres de Kaboul qu'ils « laisseraient les personnes avec des documents de voyage partir librement ». « Nous les attendrons sur cette question », a-t-il ajouté. « La communauté internationale toute entière attend que les Talibans respectent cet engagement ». L'administration de Joe Biden est sous pression face à des informations parfois confuses sur plusieurs centaines de personnes, dont des Américains, bloquées à l'aéroport de Mazar-i-Sharif dans le nord de l'Afghanistan, selon Marina LeGree, directrice de l'ONG américaine Ascend Athletics. Entre 600 et 1.300 personnes au total tentent de partir, parmi lesquelles 19 Américains, avec l'aide de son organisation et d'autres organismes, a-t-elle affirmé. Sur ce dossier, M. Blinken a expliqué que les Talibans n'avaient pas empêché de partir qui que ce soit muni de papiers en règle, mais que tous les passagers sur les vols charters n'en avaient pas. Il n'y a pas de « situation de type otages » à Mazar-i-Sharif, a-t-il assuré, faisant valoir que les Etats-Unis ne disposaient pas de personnel au sol.