Le départ des troupes étrangères après vingt années de présence en Afghanistan ayant fait suite aux « accords de paix » conclus à Doha, sous l'égide de Washington, entre le gouvernement de Kaboul et les Talibans, n'a pas l'air d'être « une réussite ». C'est le moins que l'on puisse dire quand on voit qu'en s'emparant de larges portions du territoire afghan, les insurgés talibans font craindre un important assaut contre la capitale ou son aéroport, principale voie de sortie pour les ressortissants étrangers en Afghanistan. Ainsi, à en croire un diplomate occidental en poste à Kaboul ayant requis l'anonymat, en profitant du fait que, du 11 septembre au 4 Juillet dernier, les troupes américaines et les forces alliées ont accéléré leur retrait, les talibans ont opté pour « une tactique de grignotage du pays » ; une tactique qui, à en croire Sahabuddin Delawar, un de leurs représentants en visite la semaine dernière à Moscou, leur aurait permis de prendre possession de plus de 250 des 398 districts que compte le pays. Pour confirmer leur progression, les insurgés talibans qui visent, à terme, à encercler Kaboul, la capitale, et qui, depuis le 22 juin, contrôleraient la principale voie menant vers le Tadjikistan et constituant un axe névralgique pour les relations économiques avec l'Asie centrale, diffusent chaque jour, sur les réseaux sociaux, des vidéos confirmant la reddition des forces de police locales ou de soldats de l'armée régulière afghane. Cette situation inquiète fortement les pays étrangers. Raison pour laquelle l'Inde a annoncé avoir évacué le personnel de son consulat à Kandahar, cette grande ville du sud de l'Afghanistan, naguère berceau et bastion historique des talibans, après que la région ait été le théâtre d'intenses combats à l'issue desquels, au début du mois de Juillet, ces derniers se sont emparés du district de Panjwai situé à une quinzaine de kilomètres de Kandahar. Les combats qui font rage dans le nord de l'Afghanistan ont, également, poussé la Russie à fermer son consulat de Mazar-e-Sharif, capitale de la province de Balkh et un des principaux centres urbains afghans proches de la frontière avec l'Ouzbékistan, mais aussi Pékin à évacuer début-juillet 210 ressortissants chinois et à conseiller aux autres de quitter l'Afghanistan le plus rapidement possible. Face à l'inquiétude grandissante de la communauté internationale, le porte-parole des forces afghanes de sécurité, Ajmal Omar Shinwari, a démenti l'affirmation selon laquelle les talibans contrôleraient 85% du territoire afghan, et le gouvernement de Kaboul a annoncé, ce dimanche 11 juillet, que pour protéger les installations aéroportuaires, il a déployé à proximité de l'aéroport de Kaboul, un important système de défense aérienne qui « s'est avéré utile à travers le monde pour repousser les attaques de missiles et de roquettes » et qui aurait été offert à l'Afghanistan par ses « amis étrangers ». Pour rappel, la Turquie s'était officiellement engagée à assurer la sécurité de l'aéroport de Kaboul après le départ des troupes étrangères d'Afghanistan ; ce qui a été confirmé, ce vendredi, par le président turc Recep Tayyip Erdogan lorsqu'il a rappelé qu'Ankara et Washington se sont mis d'accord sur les « modalités » de la future prise en charge de l'aéroport de Kaboul par les forces turques. Considérant, par ailleurs, que « l'escalade de la violence de la part du groupe terroriste taliban dans le pays et la propagation de la troisième vague du coronavirus ont crée un important désordre économique et social suscitant inquiétudes et défis pour le peuple », le ministère afghan des réfugiés et du rapatriement a appelé les pays européens à cesser d'expulser des migrants afghans durant les trois prochains mois du fait de l'intensification des combats dans le pays et déclaré qu'il n'accepterait plus les « retours forcés » de migrants de pays de l'Union européenne ou de pays européens hors UE avec lesquels Kaboul a conclu des accords de coopération en matière de migration. Est-ce à dire qu'après le départ de l'armée US et des soldats de l'OTAN, ce sont les Talibans qui vont prendre les rênes de l'Afghanistan ? Tout semble l'indiquer, pour l'heure, mais attendons pour voir... Nabil EL Bousaadi