Les Houara sont une tribu arabisée de la région majoritairement amazighophone du Souss, reconnue pour son folklore unique qui mêle des paroles arabes à des rythmes et à des chorégraphies amazighs. Leur danse emblématique se distingue par de grands sauts, des applaudissements synchronisés et une narration poétique, souvent comparée au flamenco pour son expression scénique et sa précision. Sa localisation, son histoire et ses racines sont aussi uniques que son folklore. Les Houara sont une tribu arabophone située au cœur de la région majoritairement amazighophone du Souss, nichée entre Agadir—la capitale de la région—et Taroudant. Enracinée dans la plaine du Souss, cette tribu arabisée—décrite autrefois par Ibn Khaldoun et de nombreux autres érudits comme étant à l'origine amazighe—est également considérée par certains comme ayant des ascendants arabes, installée dans le Souss après avoir migré à travers le Sahara. Elle incarne la dualité des influences amazighes et arabes dans son folklore. Puisant dans les danses Ahwach du Souss et présentant des paroles en arabe, les Houaris ont donné naissance à un art de la performance distinctif : la danse Houara. La danse, accompagnée de rythmes typiques de la région du Souss, inclut des performances spectaculaires qui mêlent sauts élevés et rythmes complexes. Chaque spectacle est une leçon magistrale de précision, où danseurs et danseuses sautent en rythme avec des claquements de mains synchronisés et un style de percussion unique. La danse des gazelles Une des danses Houara est la «danse des gazelles» (ou «danse des cerfs»). Elle est guidée par un concept appelé mizân haouari, signifiant équilibre. Chaque mouvement doit s'aligner parfaitement avec la percussion. Régie par le mizân, la performance repose sur le rythme et inclut l'utilisation du tara, un petit tambour sur cadre qui guide les danseurs, signalant les transitions à travers des pauses musicales, comme le décrit l'ethnomusicologue, écrivain et journaliste marocain Abdelkader Mana dans son reportage intitulé Rythme HOUARA. Les danseurs—hommes et femmes—se relaient, chacun exprimant son style personnel et sa chorégraphie dans un format qui permet une touche individuelle tout en préservant le rythme collectif, explique Mana. La performance n'est pas seulement un concours du plus haut saut ou du mizân réussi. C'est aussi une fenêtre sur la narration, où des vers connus sous le nom de tagrar sont chantés. Ces intermèdes lyriques tissent poésie, mythe et récit dramatique : «Je suis l'hôte de Dieu, ô braves hommes de cette terre!» Avec ces mots, les danseurs commencent la compétition. Un thème récurrent dans les tagrar Houara est le mythe de la gazelle tatouée—un conte poétique et tragique d'amour, de perte, de résurrection et de trahison, écrit Mana. Raconté sous forme chantée et théâtrale, il narre l'histoire d'un homme dont l'amante (comparée à une gazelle tatouée) meurt et est ressuscitée à sa demande. Après son retour, elle l'abandonne pour une vie luxueuse avec des chasseurs royaux. À la fin, elle nie l'avoir jamais connu. Quand il retourne à sa tombe, celle-ci éclate en flammes—une punition divine pour sa trahison. «Ô gazelle tatouée! Celle qui a trahi ma confiance!» Houara, la mère du flamenco Mais ce qui reste le plus frappant dans le folklore Houara est sans aucun doute leur chorégraphie. Tandis que les hommes portent des djellabas à capuche et des babouches, les femmes sont parées de foulards à franges et de caftans ceinturés, tenant leurs dfinas alors qu'elles s'élancent dans les airs avec autant de hauteur et de grâce qu'elles peuvent rassembler. La singularité de leur danse—en particulier le claquement de mains staccato synchronisé et l'utilisation d'un centre de pneu en métal joué avec deux clous en métal ou un bâton—établit des parallèles avec d'autres styles folkloriques, voire le flamenco. «Une danse qui ressemble au flamenco est exécutée par la tribu Houara du Maroc. Leurs danseurs sont principalement des hommes, bien que parfois des solistes féminines talentueuses se produisent. La danse est purement une démonstration de compétence», écrit la chorégraphe et auteure Barbara File Marangon dans son livre Passion and Elegance: How Flamenco and Classical Ballet Met at the Ballets Russes. Elle compare la danse Houara aux bulerías du flamenco, un rythme rapide en cycle de 12 temps. «Un groupe forme un cercle et chante à haute voix, accompagné de claquements de mains rythmés comme dans le flamenco. Un soliste entre dans le cercle, exécute des jeux de jambes rapides avec des sauts, puis se retire rapidement dans le groupe. Les sauts en hauteur sont souvent plus mis en avant dans la danse Houara. Des tours en tonneau semblables au flamenco—vuelta quebrada—émergent aux côtés du pas de caída, où le danseur tombe sur un genou et se relève immédiatement. Les tours vuelta sont marqués par des jeux de jambes rapides», explique-t-elle. Cette fusion de chant et de danse est caractéristique des bulerías du flamenco. Il en ressort que le folklore Houara n'est qu'une facette de leur positionnement unique au sein de la région du Souss. Une autre est leur dialecte distinct, qui mélange le tachelhit et l'arabe, leurs produits agricoles renommés comme les olives, et leurs fêtes locales vibrantes—telles que l'Achoura, qu'ils célèbrent avec musique et folklore sur trois à quatre jours.