Impossible de résister à ce raz-de-marée époustouflant de grâce et de sensualité ! Le public casablancais en a fait l'agréable expérience la semaine dernière, au théâtre Mohammed VI, lors du 3e festival des Deux rives qui se tiendra jusqu'au 29 janvier à Rabat, Casablanca, Marrakech, Tétouan, Tanger et El Jadida. «Pluie» de son nom, le spectacle interprété par la fameuse chorégraphe espagnole Eva Yerbabuena a attiré vendredi dernier une belle foule. Promesse tenue ! Le déplacement en valait la peine et ce spectacle de flamenco ballet s'est avéré une étonnante surprise. D'Eva et de mélancolie Sur une scène sobrement décorée par une porte géante, des êtres solitaires traînent leur mélancolie et leur indifférence comme un appendice noir. L'arrivée lumineuse de la danseuse étoile à travers les rangs des spectateurs ne fait que conforter cette sensation pesante de tristesse, de solitude ! Les gesticulations désespérées du personnage rajoutent à son mal-être. La fébrilité des mouvements flamenco, la lenteur du geste profondément classique et la modernité franche de la danse contemporaine cohabitent dans cette «Pluie» dûment interprétée par Yerbabuena. Une rencontre, un métissage artistique que la chorégraphe a réussi au bout de plus de vingt ans de danse. «Durant ma carrière, j'ai eu le temps de pratiquer plusieurs styles en parallèle avec ma passion première qui est le flamenco. J'ai ainsi emprunté le meilleur de la danse contemporaine et de la danse classique pour en alimenter mon flamenco originel», nous explique l'artiste. Une manœuvre réussie, puisque le fruit est un savant mariage chorégraphique. Si le flamenco conserve ses allures fières et orgueilleuses, il s'accorde toutefois quelques répits avec des mouvements gracieux directement inspirés du ballet classique. L'esthétique franchement moderne, quant à elle, rappelle les influences contemporaines. Bien épaulée par une troupe complète de danseurs, de musiciens et de chanteurs aux voix envoûtantes, Eva Yerbabuena occupait la scène par sa présence charismatique. Happés, hypnotisés, décidément sous le charme, les spectateurs ne pouvaient pas échapper à tant de grâce. Talon talentueux, la Eva sillonne la scène avec cette véhémence propre au flamenco. Sans le moindre signe d'hésitation ou de faiblesse, la danseuse au pas ferme malmenait sans pitié la scène, pour en extraire une musicalité insoupçonnable. C'est que la danseuse a fait sa rencontre très tôt avec le flamenco ! A l'âge de 12 ans seulement, Eva Yerbabuena s'est lancée dans une carrière artistique des plus réussies. Prix national de la danse en 2001, Prix flamenco Hoy la même année, Prix national de danse pour «Flamenco de la Cava»..., l'interprète de «5 Mujeres 5» est considérée par la critique comme la Représentante du flamenco (avec un grand R).