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Faut-t-il protéger la céramique marocaine ?
Publié dans L'observateur du Maroc le 24 - 01 - 2011

L'accroissement de 60% des importations de carreaux en céramique entre 2008 et 2010, l'arrivée à échéance des mesures de sauvegarde le 31 décembre 2010, et l'augmentation de 70% du coût du gaz entre 2009 et 2010, sont autant d'éléments qui constituent une véritable menace pour l'industrie nationale de la céramique. Les opérateurs manifestent leur inquiétude et souhaitent la mise en place d'autres solutions pour sauver un secteur économiquement créateur de valeur ajoutée et socialement générateur de revenu. Bien que jeune, ce secteur a réalisé des investissements importants pour produire une panoplie de produits céramiques diversifiés répondant aux standards internationaux. Il compte une quinzaine d'usines, employant 25.000 personnes et contribue à hauteur de 3 milliards de dirhams à la production industrielle nationale. Cependant, ce secteur à forts capitaux marocains est à la croisée des chemins. Il est confronté, encore plus qu'avant, à une concurrence farouche tant au niveau local qu'international. Les céramistes sont inquiets face à l'arrivée à échéance des mesures de sauvegarde, mais surtout à la montée en puissance des importations en provenance surtout d'Egypte. Ce pays n'est pas concerné par les mesures de sauvegarde mises en place suite à l'exacerbation de la concurrence avec les fournisseurs étrangers (en particulier l'Europe, la Tunisie, la Chine et les Emirats Arabes Unis). Selon Fouad Benzakour, le président de l'Association des producteurs (APIC), les importations massives en provenance de certains pays mettent en danger les quelque 20.000 emplois directs et indirects générés par le secteur. Pire encore, dit-il, certains opérateurs importent de Chine et d'Espagne des carreaux non commercialisables sur le marché européen et américain, où les normes sont obligatoires. Ils importent des carreaux composés de petits lots ou de fins de série et des carreaux de 2e et 3e choix, dont la qualité est défaillante (défaillance démontrée par des analyses faites par des laboratoires nationaux indépendants). Selon le président de l'APIC, les prix déclarés par ces importateurs sont de moins d'un euro, ce qui ne représente même pas le coût de la matière première, et un poids de 3 Kg/m2, sachant qu'un carreau dans le monde ne peut avoir un tel poids, étant donné que le poids reconnu par les experts du secteur est de 13 Kg/m2; ce qui ne laisse aucun doute sur les fausses déclarations de certains de nos importateurs. D'après F. Benzakour, ces pratiques de sous-facturation et les déclarations frauduleuses nuisent à l'intérêt national: pertes de recettes fiscales (droits de douane, TVA …) et portent préjudice au consommateur marocain en mettant en danger sa sécurité et celle des constructions. Ce n'est pas tout. La crise immobilière en Espagne et aux Etats Unis a fortement touché l'industrie des carreaux de céramique dans ce pays où la production s'est contractée d'au moins 20%. Ainsi, du fait de sa proximité géographique et du dynamisme de son marché, le Maroc pourrait être inondé de carreaux de céramique de bonne qualité et à des prix très bas. Malgré ces différents obstacles, les industriels marocains gardent leur optimisme et comptent sur le partenariat avec l'Etat pour faire sortir le secteur du tunnel. «Pour sortir de la crise, nous demandons l'application, dans le cadre de l'OMC, des mesures de sauvegarde pour mettre fin au préjudice que subit notre secteur. Des négociations entre le gouvernement et l'association des producteurs sont en cours pour tenter de sortir le secteur de ses difficultés actuelles.
«Sans les solutions adaptées, le secteur court à la ruine.»
Fouad Benzakour, président de l'Association professionnelle de l'industrie de la céramique (APIC)
Les mesures de sauvegarde du secteur céramique sont arrivées à terme. Es-ce une menace pour le secteur de la céramique ?
Suite à la demande des industriels de la céramique, les mesures de sauvegarde ont été mises en place pour une période de 5 ans, c'est-à-dire la période 2006 -2010. Or le secteur est fortement menacé par les importations massives. Le 28 décembre 2010, les professionnels ont tenu leur assemblée générale pour étudier la situation et ont constaté que les mesures de sauvegarde n'ont pas empêché une augmentation de 60% des importations. Le 2e point important retenu par les professionnels est l'augmentation vertigineuse du coût de l'énergie : 70% en deux ans.
Y a-t-il d'autres problèmes autres que l'énergie ?
L'énergie constitue 38% du coût de revient, sachant que le Maroc, à la différence des autres pays producteurs qui utilisent le gaz naturel, utilise le propane. En outre, sur le pourtour méditerranéen, le Maroc est le pays le plus handicapé par ce poste de charges. Le prix du gaz au Maroc est 4 fois plus cher qu'en Europe, 8 fois plus que la Turquie et 40 fois plus que l'Egypte.
La masse salariale, elle, représente 11% du coût de revient, tandis que les matières premières et les frais généraux représentent respectivement 30% et 21%. L'objectif en 2012 est de réduire le coût unitaire moyen par mètre carré de 2% annuellement en moyenne, contre un coût unitaire moyen de 48 DH/m2 en 2003.
Qu'en est-il de la concurrence ?
La concurrence, dans un cadre légal, ne nous dérange pas. Ce qui est grave c'est la concurrence déloyale des produits importés. Par exemple, nous avons constaté que pendant le 1er trimestre 2009, les importations ont presque doublé par rapport à la même période de 2008 et les prix ont baissé, c'est inacceptable. Nous sommes un secteur qui a souffert auparavant des importations sauvages, qui ont failli mettre le secteur à genou. Je rappelle que l'Espagne, qui passe par une crise immobilière sans précédent, dispose d'un stock de carreaux très important, résultant d'une part de la mévente sur le marché interne, à cause de l'arrêt de la construction et d'autre part, de la chute des ventes à l'export à cause de la crise aux Etats Unis et en Europe. De ce fait, sans les solutions adaptées, le secteur court à la ruine.


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