Le plan quadriennal de droits additionnels sur les importations de céramique se heurte à de vives résistances au sein du gouvernement. Partisans de l'ouverture et supporters d'une industrie nationale forte ont du mal à s'entendre. Le plan quadriennal qui devait sanctionner les résultats de l'enquête réalisée par le ministère du Commerce extérieur sur l'impact des importations sur l'industrie nationale de la céramique serait-il remis aux calendes grecques ? Selon des sources bien informées, les producteurs auraient obtenu une fin de non-recevoir auprès du ministre du Commerce et de l'Industrie, Salaheddine Mezouar. L'APIC par la voie de Fouad Benzakour, directeur général de Super Cérame, nie l'information, tout en précisant que des tractations sont en cours. Pas d'explications pour le moment, du côté du ministère du Commerce extérieur, joint par ALM. Face à la lenteur dans la prise de décision, les producteurs s'agitent. Pour cause, la déclaration préalable à l'importation mise en place en janvier dernier pour certaines importations de la céramique est arrivée à terme. Décidée pour une durée de neuf mois, cette mesure découlait d'une requête présentée au ministère du Commerce extérieur par l'Association professionnelle de l'industrie céramique (APIC). Selon les producteurs, les importations de carreaux en céramique ont presque doublé entre 2002 et 2003. Par rapport à la production nationale, la part des importations est passée de 20% en 2002 a environ 44% en 2004. Cet accroissement massif des importations à causé un préjudice à la branche de production de l'industrie nationale de carreaux en céramique. Compte tenu des éléments présentés dans la requête au sujet de l'accroissement massif des importations et le préjudice subit, le ministère du Commerce extérieur avait entrepris, à compter du 24 janvier 2005, une enquête en matière de sauvegarde conformément à l'article 15 de la loi n°13-89 relative au commerce extérieur et les dispositions pertinentes de l'accord de l'OMC sur les sauvegardes. Comme l'on pouvait s'y attendre, les résultats de cette enquête confirment les estimations des producteurs. L'étude révèle une augmentation massive des importations au détriment de la production. En conséquence, sur la base de ces conclusions, de nouvelles mesures devaient prendre le relais. Courant octobre, l'APIC, l'association regroupant les producteurs du secteur, est venue rappeler l'urgence de telles mesures dans un communiqué, appelant à la prise de décision. L'industrie nationale subit les contre-coups des «importations massives de toute origine, entre autres des produits de bas de gamme de qualité médiocre ne répondant pas aux normes marocaines, dont l'application est rendue obligatoire », explique l'APIC. Certains produits importés de la Chine et de l'Espagne (deux géants qui produisent environ la moitié de la production mondiale en céramique) sont jugés responsables de la crise que traverse le secteur. Pour l'APIC, ces deux pays se débarrassent de leur stock suite à la crise qui a sévi, en pratiquant des prix qui n'ont rien à voir avec le coût réel de la production. Il s'agit aux yeux des opérateurs marocains d' «une nouvelle forme de dumping, faite parfois autour de pratiques illégales (sous facturation, contrebande, fausses déclarations sur le produit…). Bref, les 20 000 emplois que revendique l'industrie marocaine de la céramique sont menacés. Avec une vingtaine d'entreprises, la branche carreaux est particulièrement touchée. A tous ces problèmes, explique Fouad Benzakour, directeur général de Super Cerame et membre actif de l'APIC, s'ajoute celui du facteur énergie représentant 30 à 40% des coûts du secteur. «Les coûts sont prohibitifs, à cause entre autres de l'utilisation du GPL au lieu du gaz naturel». Ce facteur énergico-thermique est 40 fois plus cher qu'en Egypte. Les professionnels marocains préconisent le passage au gaz naturel comme source énergétique. Une reconversion qui permettra la réduction des coûts de production. Pour le moment, l'idée d'un plan quadriennal fait son chemin. L'une des dispositions-phares de ce texte concerne l'application de droits de douane additionnels sur certaines importations. Les taux seront dégressifs sur quatre ans, passant de 1,5 dirham par kilogramme la première année, à 1,25 puis à 0,75 la dernière année. Reste à savoir quand ce train de mesures entrera en application . Tout est suspendu à la publication au Bulletin officiel d'un arrêté du ministère des Finances. En attendant, les lobbies des importateurs d'un côté, ceux des producteurs de l'autre, tentent chacun de faire pencher la balance de son côté. Les importateurs de céramique et sanitaire viennent de saisir à leur tour le Premier ministre et le ministère des Finances.