Après la grève du mardi 10 décembre, nouveau débrayage annoncé par les médecins internes et résidants pour ce jeudi. Réclamant une réponse à leurs doléances, ils déplorent le silence du Ministère de la santé et celui de l'Enseignement supérieur face à leur main tendue. « Au-delà de nos revendications légitimes, ces grèves sont une conséquence du silence des deux ministères de tutelle. Le dialogue est interrompu depuis septembre dernier et la situation est en stand by alors que la conjoncture nécessite l'action et en urgence », nous explique au téléphone Dr Ali Farissi, coordinateur de la Commission nationale des médecins internes et résidents (CNIR). Silence radio Ce dernier rappelle par ailleurs la chronologie du mouvement qui s'est déclenché en février 2024 et ses différentes étapes ayant mené aujourd'hui à cette série de grève. « Nous avons eu quelques audiences avec le ministère de la Santé dont la dernière remonte au 3 septembre et au terme de laquelle on a reconnu la légitimité de nos revendications. Mais sans aucun engagement. On a réitéré une demande d'audience en novembre avec l'arrivée du nouveau ministre de la Santé, pour renouer le dialogue, mais notre demande est restée lettre morte », s'insurge le coordinateur de la CNIR contre le mutisme gouvernemental. En ultime recours, les internes et résidants observent donc une nouvelle grève dans l'ensemble des hôpitaux universitaires du pays (CHU), à l'exception des services d'urgence, de réanimation et de soins intensifs. Le volet humanitaire (caravanes médicales) et pédagogique ne sont pas non plus concernés. Une manière de faire entendre leur voix et de « provoquer » une interaction avec la tutelle. Leurs revendications ? Axé sur la valorisation, la formation, la qualité des soins prodigués et l'indemnisation, le dossier revendicatif de la CNIR insiste sur l'amélioration des conditions de travail. Statut et formation Tout comme le Syndicat indépendant des médecins du secteur public (SIMSP), la commission rejette « les réformes » touchant au statut de fonctionnaires publics des médecins et appelle à la préservation des acquis et de la stabilité sociale et financière. Ils rejettent de ce fait les affectations « forcées » et s'opposent au transfert automatique vers les groupements sanitaires territoriaux sans garanties sur leurs droits et salaires. S'opposant à la délocalisation de la formation des médecins des CHU vers des établissements régionaux, la CNIR estime que ces structures ne disposent guère des infrastructures et des conditions pédagogiques nécessaires. Dans ce même sens, les résidents et les internes demandent un cahier des charges pédagogique unifié pour assurer une formation de qualité pour tous. « Nous réclamons l'harmonisation et le renforcement de la qualité et l'homogénéité de la formation académique et professionnelle dans les spécialités médicales et pharmaceutiques et en médecine dentaire au niveau des différents CHU », explique Dr Farissi. « Une manière de garantir un service et des soins de qualité pour les citoyens marocains », insiste le coordinateur. Indemnités et assurance maladie Soulevant la question de revalorisation financière, ce dernier affirme que « Les résidents bénévoles tout comme les internes se chargent de toutes les tâches et les missions des autres « médecins » au niveau des différents services aux CHU. Or leur rémunération actuelle est loin d'être en adéquation avec leurs responsabilités réelles. Ils ne touchent que 3500 dhs ». Une aberration en comparaison avec le salaire perçu par les médecins contractuels (12.000 dhs) qui disposent du même diplôme et exercent les mêmes fonctions. Dans son dossier revendicatif, la CNIR réclame par ailleurs une augmentation de l'indemnité de garde pour passer de 186 à 500 dirhams et celle d'astreinte à 200 dirhams. Les médecins soulèvent également la question des conditions de travail en particulier la nécessité de l'instauration d'un repos obligatoire au lendemain des gardes de nuit pour préserver leur santé, leur bien être et leur efficacité. La CNIR revient à la charge par rapport à l'exclusion de ses affiliés de l'Assurance maladie obligatoire. Elle réclame leur intégration en tant qu'étudiants dans ce système leur permettant ainsi une prise en charge médicale. Ceci tout en éliminant la condition de l'âge-limite pour continuer d'en bénéficier. « Les internes et les résidents doivent bénéficier de la gratuité des services et des soins dans les CHU et dans les Groupements sanitaires par la suite, eux et leurs proches de premier degré », ajoute la CNIR. Pour conclure, cette dernière évoque le point délicat du service obligatoire et plus précisément sa durée. Les grévistes souhaitent en effet passer de huit à deux ans. Ils jugent la période actuelle trop contraignante et la pénalité en cas de démission disproportionnée. « Les résidents contractuels sont obligés de rendre à l'Etat le double de l'ensemble des sommes perçues durant leur résidanat, ce qui est une aberration » conclut Dr Farissi. La tutelle saura-t-elle tendre l'oreille ? A suivre !