Dans un récent rapport, Oxfam Maroc son rapport intitulé « Financement des TPME au Maroc : Où en est le programme Intelaka ? », Oxfam Maroc estime que le dit programme fait face à de nombreux obstacles liés à la pandémie, au porteur de projet, au projet lui-même et à son déploiement. Les résultats sont le fruit d'une étude qui a été menée auprès de 28 entrepreneurs et porteurs de projets ainsi que 11 acteurs de l'écosystème entrepreneurial dans dix villes issues de quatre régions à savoir Casablanca-Settat, Tanger-Tetouan-Al Hoceima, Rabat-Salé-Kenitra ainsi que Beni Mellal-Khenifra. Des obstacles majeurs En effet, le lancement du programme Intelaka s'est fait à la veille du déclenchement de la crise du covid-19. Oxfam estime que ceci a largement impacté son déploiement. Comment ? «Plusieurs demandes ont été approuvées lors du lancement de l'initiative sauf qu'à l'arrivée de la pandémie, certains secteurs d'activités ont été largement touchés par la crise et ainsi certains dossiers ont été revus à l'instar des projets relevant du secteur touristique ou encore la restauration », détaille Oxfam. Aussi, la pandémie a eu des conséquences pour les entrepreneurs qui ont eu l'accord pour le financement de leurs projets mais qui ont rencontré des problèmes de retard d'arrivée de leurs équipements suite à la fermeture des frontières. Concernant les porteurs de projets, Oxfam met l'accent d'abord sur la difficulté pour certains de justifier leur expérience s'ils ont exercé dans le secteur informel et sur la problématique de la confusion entre prêt et subvention chez un bon nombre de candidats. Sur le volet projets, on cite particulièrement un problème lié à l'absence du statut juridique d'entreprise sociale puisque les entreprises sociales qui ont voulu un crédit Intelaka se sont retrouvées dans l'obligation de choisir l'un des statuts éligibles tels que la SARL, la coopérative ou l'auto-entrepreneur. Mais, dans le cadre du déploiement du programme, Oxfam déplore l'exigence d'un apport en numéraire par certains établissements bancaires dont le montant peut varier entre 10 et 20% du total demandé. "Pour les entrepreneurs, cette exigence les décourage à postuler et donc finissent par abandonner la démarche", note l'étude. Autre hic majeur relevé, la lenteur dans le traitement des dossiers sachant que lors du lancement du programme les banques se sont engagées à ce que les délais de réponse ne dépassent pas les trois semaines. A l'issue des entretiens menés lors de l'étude, certains entrepreneurs évoquent des délais pouvant dépasser une année ! Certains banquiers, comme le souligne Oxfam, justifient ce retard par le flux important que connaissent certaines agences bancaires. D'autres, renvoient cela à la centralisation de la décision au niveau du siège. Parallèlement, le paiement direct des fournisseurs serait également un frein. Le rapport souligne que le fait que la banque octroie des chèques au nom des fournisseurs les oblige à travailler avec ces mêmes fournisseurs même si la qualité de leurs services ou produits change au cours de la période du traitement du dossier. Sur les motifs de rejets, les auteurs de l'étude expliquent qu'ils sont très nombreux mais citent en particulier l'historique en matière d'incidents de paiement du porteur de projet, l'incompatibilité entre le couple profil et projet, l'absence d'une bonne étude de projet, la fausse documentation (devis de sociétés fictives avec des montants surdimensionnés, faux engagements de collaboration, faux contrats de bail...). Oxfam relève aussi que c'est tout un marché informel qui s'est créé autour de ce programme. Recommandations phares Afin de dépasser ces freins, Oxfam livre ses recommandations. Pour les porteurs de projets, il est préconisé de procéder à une vraie étude du projet au lieu de sous-traiter la procédure à un prestataire de service et de disposer d'un dossier solide appuyé par des devis réalistes. Pour les pouvoirs publics et les gestionnaires du programme, Oxfam insiste sur l'importance de l'accompagnement non-financier et post-création. Et afin d'accélérer les délais de traitement des dossiers, Oxfam recommande qu'il est important de décentraliser la prise de décision et de définir des montants plafonds pour lesquels les agences bancaires peuvent statuer sans recourir au siège. Il serait judicieux aussi, d'après le rapport de lancer des incubateurs ruraux pour accompagner les projets à caractère agricole, de faciliter l'accès à l'information, et de réaliser des études d'évaluation mi-parcours ce qui permettra de relever les challenges et barrières que rencontrent les entrepreneurs et pouvoir y remédier.