«Quand Ali Khamenei, le Guide suprême est dans un cercle d'intimes et que Hassan Rohani entre dans la pièce, Khamenei se lève, comme toute l'assistance », assure un Iranien, proche des cercles du pouvoir à Téhéran. Une preuve que non seulement le nouveau président iranien, religieux de 64 ans, est un homme respecté par Khamenei, mais aussi, qu'à la présidence de l'Etat, il pourra compter sur son soutien politique. Or dans ce pays compliqué et opaque qu'est l'Iran, le Guide suprême reste le cœur du pouvoir et les changements politiques ne peuvent aboutir sans un attelage formé du Guide et du président. Les deux hommes ont, dans l'immédiat, un même intérêt : sauver la théocratie iranienne. Ils doivent donc tenter de sortir le pays de son isolement diplomatique en calmant le jeu sur le nucléaire et mettre fin aux sanctions des Etats-Unis et de l'Europe qui ont mis l'économie à genoux. Hassan Rohani, l'homme du consensus, a le profil idéal pour y parvenir. Elu par la jeunesse, les libéraux, les modernistes orphelins d'un candidat réformateur, ce mollah qui fût autrefois proche de l'ayatollah Khomeiny (il était à Neauphle le Château, en France), est un homme du sérail. Conservateur modéré et pragmatique, c'est dès le lendemain de la révolution en 1979, que Ali Khamenei dont il était déjà proche, l'avait désigné pour organiser la cellule idéologique de l'armée, normaliser la situation dans les casernes, y faire déposer les armes... Hassan Rohani a longtemps joué les hommes de liaisons entre les mollahs et l'armée. Rien d'étonnant qu'il soit depuis seize ans, secrétaire général du Conseil suprême de la sécurité nationale. Un organisme important sous la houlette du Guide suprême. C'est ce Conseil qui a géré la répression impitoyable contre les étudiants à la fin des années 90. C'est lui aussi qui a fait arrêter les deux leaders réformateurs, Mir Hussein Moussavi et Mehdi Karoubi, après l'élection présidentielle contestée de 2009. Ils sont toujours emprisonnés. Les réformateurs demandent leur libération. Ce sera le premier test de la volonté du nouveau président de se démarquer de son prédécesseur. Mais Hassan Rohani, le modéré, a aussi collaboré avec les réformateurs. De 2003 à 2005, il était responsable des négociations sur le nucléaire avec les Occidentaux, sous la présidence de Mohamed Khatami. Un dossier ultra-sensible qui est, comme celui de la sécurité, entre les mains du Guide. A l'époque, l'Iran avait suspendu ses recherches sur l'enrichissement de l'uranium. Dans sa première conférence de presse, Rohani a annoncé son programme. D'une part, pas question de revenir sur le principe de l'enrichissement de l'uranium. L'Iran y a droit dans la mesure où celui-ci a un objectif civil. Mais le nouveau président a promis la « transparence » afin que les Occidentaux sachent qu'il n'y a pas, à Téhéran, d'agenda caché. Reste à savoir si cette volonté affichée sera suffisante pour restaurer la confiance avec la communauté internationale ? D'autre part, il a annoncé vouloir gérer le pays dans un esprit d'ouverture. C'est apparemment dans l'immédiat ce que les Iraniens attendent. Après la révolte de la jeunesse de 2009, durement réprimée, ils savent que les changements n'auront lieu, en Iran, que pas à pas. Ils sont prêts à s'accommoder de ce nouveau rythme