Le nouvel holding issu de la fusion ONA-SNI investira selon plusieurs modes : minoritaire, en joint-venture ou majoritaire. L'opération est de grande envergure. Les deux holdings les plus influents au Maroc chambouleront leur tour de table et leurs portefeuilles. Sur le plan pratique, ONA et SNI se retireront d'abord de la cote. Sur le plan stratégique, les deux groupes souhaitent se défaire de la filière agroalimentaire. Centrale laitière, Cosumar et Lesieur Cristal feront l'objet d'offres publiques de vente à la Bourse de Casablanca. La mise en vente de ces filiales compenserait la sortie des holdings de la cotation, on estime le montant de cette cession à 19 milliards de dirhams. Les deux groupes entendent évoluer avec un portefeuille de relais de croissance comme les télécommunications et les énergies renouvelables. Trois scénarios Un nouveau schéma d'investissement a été élaboré. Celui-ci comporte trois scénarios définis en fonction du degré d'implication dans le capital et la gouvernance. Les métiers de distribution, télécommunications, mines et énergies renouvelables resteront sous le contrôle majoritaire de la nouvelle entité. Un second mode de détention prévoit le contrôle à travers des joint-ventures avec des partenaires métiers, internationaux pour la plupart : Lafarge Maroc, Sonasid, Somed, etc. Le dernier mode de participation prévoit la sortie du groupe des aspects de la gestion, et le maintien d'une position minoritaire, à moins de 30% du capital, en cédant le contrôle au marché financier. Les filiales agro-industrielles rentrent dans cette dernière optique. Outre cette réorganisation, la nouvelle entité opèrera sur un large spectre de modes d'investissement. Le holding se veut incubateur de projets nouveaux, c'est-à-dire capital-risqueur accompagnant le développement des nouvelles entités avant de les céder sur le marché lorsqu'elles auront atteint un stade de développement «pérenne». ONA et SNI profiteront également des avantages fiscaux que confère la Loi de finances de 2010, la fusion par apports d'actifs est défiscalisée cette année. Puis encore, la remontée de profit et le processus de prise de décision seront allégés et simplifiés, puisque le nouvel ensemble procèdera à l'absorption des holdings intermédiaires, ce qui consolidera la détention conjointe de la plupart des participations, ainsi que la capacité d'endettement du groupe. L'annonce a eu un impact immédiat sur le marché boursier. Les indices de la place ont enregistré des hausses considérables. L'intention de recapitaliser la Bourse via plusieurs offres de vente de certaines filiales aurait insufflé au marché un nouvel élan. Si le rythme actuel est maintenu, on pourrait assister à un retour en force de la dynamique d'investissement. Pourvu que ce ne soit pas qu'un effet d'annonce. M.A. «Nous ciblons des entreprises de taille significative» Quelle est la dimension stratégique de la fusion SNI-ONA ? La dimension stratégique de cette fusion repose sur la mise en commun des ressources de deux groupes de taille, au service d'une vocation de holding d'investissement, gérant de manière dynamique des participations minoritaires mais stratégiques. Elle jouera un rôle actif d'actionnaire professionnel au sein des organes de gouvernance, véritable catalyseur de projets de taille, structurants pour notre économie et créateurs de valeur. Quelles seront les missions du nouvel holding ? Le holding d'investissement articulera son action autour de plusieurs axes. En premier lieu, l'investissement dans les actifs cotés et non cotés structurants pour l'économie marocaine, à fort potentiel de création de valeur et/ou de rendement. Le holding entend aussi remplir son rôle d'actionnaire de référence actif dans les organes de gouvernance tout en confiant la gestion opérationnelle à un management responsabilisé devant le marché, et en insufflant l'expérience d'actionnaire professionnel pour favoriser le développement des actifs et l'émergence de champions nationaux ou régionaux. Autres axes de travail, l'autonomisation des participations une fois qu'elles ont atteint leur rythme de croisière et la pérennisation du retour aux actionnaires sous forme de dividendes et d'accroissement de la valeur patrimoniale. Ainsi, le holding ciblera les projets et sociétés de taille significative, sur des secteurs attractifs, présentant de fortes barrières à l'entrée, et des niveaux de rentabilité satisfaisants pour les actionnaires. Ceci se fera par ailleurs dans un souci d'équilibre de portefeuille aussi bien en termes d'exposition sectorielle et géographique, qu'en terme de répartition actifs cotés/non cotés. Avez-vous déjà un calendrier du retrait de la Bourse et de l'introduction des filiales ? A priori, le déploiement des OPR de ONA et SNI devrait probablement nous mobiliser jusqu'en juillet. Au lendemain de leur radiation s'enclenchera la fusion proprement dite des deux entités, ce qui devrait vraisemblablement mener à la fin de l'année, le temps d'effectuer les démarches juridiques et la réorganisation de l'ensemble. Dans la foulée, la cession du contrôle en bourse des sociétés matures se mettra en place. Quid des actionnaires minoritaires des deux titres ONA et SNI ? Dans le cadre de ce qui est prévu par la loi pour ce genre d'opérations, les actionnaires minoritaires se verront proposer deux options : apporter leurs titres aux offres de retrait qui les concernent, à un prix prévoyant une prime attractive (ce prix fait, comme l'exige la loi, l'objet d'un rapport d'expertise indépendant), ou alors, conserver leurs actions. Ils continueront alors de percevoir les dividendes de la nouvelle entité fusionnée, qui par contre ne sera pas cotée. Quels sont les nouveaux secteurs où le futur holding compte se redéployer? La cession du contrôle des métiers matures (agro-industries) nous permettra de mobiliser notre attention sur les métiers en développement : télécoms, énergie, immobilier, grande distribution et mines. A ce stade, et au vu de la complexité de ces métiers, il n'est pas d'actualité d'investir à court terme dans de nouveaux métiers. Propos recueillis par Abdelkhalek Zyne