Un nouveau pas vient d'être franchi dans le méga projet de la fusion ONA-SNI. Après trois semaines de suspension, la cotation des titres des holdings SNI et ONA a repris le 16 avril. Le même jour, la société gestionnaire de la place casablancaise publie les grandes lignes des projets d'offres publiques de retrait (OPR) afférent à chacun des deux groupes royaux. Cette publication vient confirmer un constat que le marché avait en partie évoqué. En effet, c'est un consortium d'investissement mené par Copropar et composé, en plus de ce holding d'investissement déjà actionnaire de référence de SNI, de Groupe Invest, un véhicule d'investissement destiné à participer au rachat des minoritaires, et Lafarge SA, qui a déposé l'offre de retrait pour les titres SNI. Ce dernier absorbera pour sa part le groupe ONA, via le consortium composé de la SNI, en tant que meneur, Siger, Compagnie Gervais Danone, Banco Santander, Axa Assurance Maroc, Société Générale Marocaine de Banques (SGMB), Investima et FIII. «Cette configuration se justifie par le fait que Copropar et SNI sont respectivement les actionnaires de référence de SNI et ONA. Ils sont naturellement les meneurs respectifs des deux consortiums constitués dans le cadre de cette opération», précise d'emblée Aymane Taud, Directeur à la SNI. Le niveau de participation que permettra ce montage financier à Copropar dans la SNI et SNI dans ONA ne sera connu que lorsque les offres publiques de retraits seront bouclées. Cela dépendra en effet de la proportion des porteurs d'actions qui choisiront de vendre leurs titres par rapport à ceux qui préfèreront les garder, même s'il s'agira d'actions d'une société non cotée. En effet, les actions SNI concernées par l'OPR se chiffrent à 4 millions de titres dont le prix de reprise est fixé, pour rappel, à 1.900 DH. Le portefeuille cible de l'OPR de l'ONA compte 8,66 millions de titres à un prix unitaire de référence de 1.650 DH. Les initiateurs de l'OPR prennent un engagement ferme et irrévocable à racheter ces actions, sans seuil de renonciation. Le message que les gestionnaires des holdings royaux chercheront à véhiculer s'orientera-t-il vers la vente ou la garde des titres ? «Le message que nous véhiculons aux porteurs d'actions est de faire ce qui est le mieux pour eux : s'ils souhaitent sortir, ils peuvent bénéficier d'un prix attractif et s'ils souhaitent rester, ils sont les bienvenus dans une structure qui ne sera plus cotée», lance Taud, qui nous confie que les remontées d'informations montrent que bon nombre d'actionnaires veulent rester actionnaires même avec des titres non cotés. D'ailleurs, Taud souligne l'engagement des groupes internationaux dans les consortiums constitués pour les OPR. «Cela témoigne de l'adhésion des actionnaires à la reconfiguration de l'ensemble SNI/ONA et au nouveau mode de gouvernance qui en découle», note-t-il. Néanmoins, cet engagement est naturel puisque des opérateurs comme Lafarge, Danone sont actionnaires soit dans SNI soit dans ONA. «Naturel certes mais pas obligatoire. Le métier de Lafarge ou Danone est d'abord d'investir dans leurs métiers respectifs ; leur participation aux consortiums initiateurs des offres marque leur confiance par rapport au projet de reconfiguration, par rapport à leur partenaire marocain et par rapport à l'économie marocaine dans son ensemble», précise-t-il. Et d'ajouter, «Nous n'avons rien négocié. Nous avons simplement lancé une invitation à nos partenaires internationaux qui ont tous répondu présents». Les OPR devraient être bouclées d'ici juin prochain. Combien coûtera l'opération ? Taud annonce un montant maximal de 22 milliards de DH correspondant à la taille cumulée des offres mais précise que le montant final sera bien inférieur du fait que de nombreux actionnaires devraient rester dans le capital. Comme le marché l'avait prévu, la cession des titres suite à l'augmentation du flottant en bourse des trois filiales agroalimentaires cotées de l'ONA (Cosumar, Centrale Laitière et Lesieur Cristal) est censée fournir assez de fonds pour couvrir le rachat des titres qui seront présentés par les actionnaires dans les cadre des OPR. Néanmoins, cette augmentation de flottant n'interviendra que plusieurs mois après le bouclage de l'OPR. «L'augmentation des flottants n'est pas prévue pour les prochaines semaines. Elle interviendra postérieurement à la réalisation de la fusion entre SNI et ONA», précise Taud. Les managers de l'ensemble SNI ONA ont déjà pris leurs précautions. «Nous avons prévu, d'une part, un financement à court terme adossé aux cessions d'actions des filiales agroalimentaires et, d'autre part, un financement à moyen long terme adossé aux cash-flows futurs. La structuration de ce financement, impliquant des banques locales et éventuellement un appel au marché, est en cours de finalisation», explique-t-il. Qu'en est-il du calendrier de réalisation des deux OPR ? «Le processus est en cours avec un visa du CDVM attendu pour la première semaine du mois de mai», réplique le haut cadre de SNI. Mais en principe les opérations devraient être bouclées d'ici juin prochain. Reste à savoir si les membres des deux consortiums garderont leurs titres ONA ou SNI après le bouclage des deux OPR. Ce qui est sûr c'est que le montage des participations issu des deux OPR (contrôle de l'ONA par SNI et de SNI par Copropar) n'est pas figé. «La configuration finale du capital de l'entité issue de la fusion dépendra du nombre d'actions apportées aux offres ; ce qui est certain c'est que Copropar sera le principal actionnaire du nouvel ensemble», note Taud. Décidément, le processus de fusion ONA- SNI est loin d'avoir livré tous ses secrets. Les détails de l'opération étant connus, quel sera le comportement des titres ONA et SNI après leur réintroduction à la cote ? «Les cours des deux actions devraient se stabiliser à un niveau proche des prix d'offres, car personne n'acceptera de vendre ses actions à un prix significativement inférieur sachant qu'il peut les apporter à l'offre. Maintenant, des personnes qui ont un besoin de cash ou de meilleures opportunités de placement pourront accepter de vendre leur titre avant les offres avec une légère décote reflétant le coût d'opportunité sur quelques semaines», explique le haut cadre de SNI. Les deux titres peuvent-il faire l'objet de spéculation en perspectives de leurs prochaines annonces stratégiques ? «Il ne peut y avoir de spéculation sachant que les prix d'offres ont été communiqués dès le premier jour. Tous ceux qui achèteront ou vendront des titres d'ici jusqu'aux offres le feront en toute connaissance de cause», conclut-il.