Dimanche, à l'occasion de la Journée mondiale du livre et du droit d'auteur célébrée le 23 avril, le collectif « Nod T9ra » (Tous pour la lecture) a organisé une séance de lecture spontanée dans plusieurs villes du royaume. Contre vents et marées, le message est passé. A Casablanca, le collectif s'est rassemblé le 23 avril, Place de la Poste, pour une séance de lecture, non loin de manifestants qui battaient le pavé. « Je sortirai dimanche à 17h, avec un livre entre mes mains… ». La phrase de l'affiche du collectif Nod Teqra (Tous pour la lecture) en dit long sur l'ambition de ce groupe de jeunes. Initiée à la base par Hamza Mahfoud, un jeune du Mouvement 20 février (M20F), l'idée, comme l'avoue ce dernier, ne date pas d'hier. « Il y a cinq ans, nous avons initié le collectif Moroccanbookclub dans un café à Casablanca. On se mettait mensuellement d'accord sur un livre qu'on lisait tous et qu'on analysait et discutait ensemble. On s'est lié d'une belle relation humaine et on voulait que cette «aura» enveloppe tout le monde. Avec l'avènement du M20F, nous avons remarqué que beaucoup de personnes ont une idée incomplète de ce que peut être la démocratie, l'égalité, la modernité, le despotisme, à cause d'un manque de connaissances, de culture générale, en lecture, plus précisément. Et cette initiative a été lancée justement pour pallier à cela ». L'ire de la police Au pied d'un arbre, dans un jardin, sur un banc ou près d'une fontaine ou encore assis par terre, le collectif a réussi sa première sortie, dimanche, malgré les pluies instables et la présence des forces de l'ordre. « Tout s'est très bien passé, à Casablanca, Tanger, Oujda, M'diq, Errachidia… Il n'y a qu'à Rabat où la police s'est mal comportée avec les lecteurs du collectif », nous apprend Mahfoud. A Casablanca, le collectif s'est rassemblé à la Place de la Poste pour la séance de lecture, non loin de manifestants qui battaient le pavé pour demander leur réinsertion dans le monde du travail. Sauf que ces derniers allaient être dispersés par les membres des forces de l'ordre qui par la suite s'en sont pris au collectif avec menaces et insultes, affirme une source au Soir échos. « Va-t-en ! Si tu veux lire, rentre chez toi. Il n'est pas permis de se rassembler sur la voie publique pour lire. Reste en dehors de tout ça, tu as l'air d'une fille respectable », avait lancé un policier à une blogueuse. « Non seulement je me trouvais privée de mon droit de lire, mais également insultée et écrasée par un agent d'autorité qui me refusait mon droit au savoir », avait-elle avoué dans un billet qu'elle a rédigé. La lecture est une urgence Le 25 avril, deux jours après la commémoration de la Journée mondiale du livre et du droit d'auteur, un journal arabophone avait titré l'un de ces articles, parlant d'un événement similaire : « Benkirane interdit la lecture sur la voie publique »…. Dans une dizaine de villes du royaume, plusieurs personnes ont répondu présent à l'appel du collectif Nod Teqra. Des écrivains, des journalistes, des éditeurs, des acteurs et des enfants. « Nous avons échangé nos livres, nous avons découvert de nouveaux écrivains, dans toutes les langues. Un atelier « Lis-moi pour voir » a même été prévu pour les non-voyants. », nous explique Hamza Mahfoud. D'après Mustapha Raqi, un activiste de la section du collectif à Errachidia, l'événement a connu un énorme succès et le conseil de la ville aurait décidé de rendre officielle la lecture sur la voie publique tous les dimanches à 17h. « Les statistiques sur la lecture au Maroc sont désolantes», constate Mahfoud. La Journée mondiale du livre et du droit d'auteur commémore cette année, la mort de trois célèbres auteurs à savoir, Miguel de Cervantès, Inca Garcilaso de la Vega et William Shakespeare.