« Nous avons manifesté afin de revendiquer des réparations individuelles et la réintégration des victimes des années de plomb dans le monde professionnel ». Mustapha Manouzi, président du Forum vérité et justice (FMVJ), n'a jamais renoncé à cette période de l'histoire du pays de la fin des années soixante jusqu'aux années 1980, marquée par une répression violente contre les opposants de feu Hassan II, les victimes auraient subis toutes formes de tortures. Mis en place il y a 8 ans par Mohammed VI pour réconcilier les victimes des années de plomb avec leur passé, l'Instance Equité et Réconciliation (IER) n'a pas encore réparer tout le mal enduré. Le président du Forum marocain vérité et justice est mécontent d'un gouvernement qui n'a toujours pas exprimé de volonté à traiter sérieusement le dossier du Maroc des années 1960-1980. Une amnésie gouvernementale D'après les associations des droits humains et les organismes non gouvernementaux qui ont fait l'observation et le suivi des années de plombs, les dossiers des victimes de cette noire période seraient au nombre de 21 000. « Seuls 1 019 dossiers sont prêt pour la réintégration. Ils sont complets, à jour et prêts pour être traité par le gouvernement. Mais ce dernier n'en fait point du tout une priorité et c'est pourquoi nous avons manifesté. C'est complètement injuste. », nous révèle Manouzi. Même si la loi de Finances avait prévu un budget d'indemnisation et de réintégration des victimes, le président du FMVJ estime que le montant n'est pas du tout suffisant. Il estime aussi que les recommandations de l'IER ne sont pas prises suffisamment au sérieux par le nouveau gouvernement. « C'est vrai que globalement, dans le secteur de l'enseignement, l'intégration se fait petit à petit, mais le gouvernement ne progresse pas du tout dans les autres secteurs professionnels. L'intégration professionnelle des victimes des années de plomb ne semble pas être prioritaire pour le nouveau gouvernement. », constate Manouzi. Mais, ce dernier reste optimiste. Pour lui la nouvelle constitution, assure clairement le champ des libertés et des droits individuels et adhère aux accords mettant fin aux disparitions forcées et à la détention arbitraire ou secrète considérées comme de graves crimes dans l'article 23. Des acquis, mais encore… Le gouvernement a encore du pain sur la planche concernant le dossier des victimes des années de plomb. Si dimanche, le FMVJ est sorti manifester pour attirer l'attention sur cette partie sombre de l'histoire du Maroc, le gouvernement Benkirane, même après 100 jours au pouvoir, semble être préoccupé par d'autres besognes. « La peine de mort n'a pas encore été aboli. Nous n'avons toujours pas une bonne gouvernance sécuritaire. Le conseil supérieur de la sécurité n'a toujours pas été constitué. La justice n'a pas encore été réformé. Aucun dossier sur la vérité des événements des années de plomb n'a été publié. L'Etat ne s'est toujours pas excusé pour le mal de ces années noires et n'a encore exprimé aucun regret. », énumère Manouzi. Et d'enchaîner : « Nous avons manifesté ce dimanche. Si le gouvernement ne réagit pas à cet appel, nous serons obligés de ressortir et de faire une campagne réclamant la restitution des dépouilles des corps des victimes des années de plombs qui doivent être remises à leur famille. ». Le FMVJ compte notamment organiser une conférence le 17 mai sur la bonne gouvernance sécuritaire, une journée symbolique, au lendemain du 16 mai, date qui remémore la fondation de la Direction générale de la sûreté nationale en 1956 par feu Mohamed V. Côté justice, Manouzi estime que la cadre professionnel des juges et des magistrats n'est pas assez réglementé. Aussi, « dans la nouvelle constitution, un conseil supérieur du pouvoir juridique est prévu mais n'a toujours pas encore vu le jour. », conclut Manouzi.