Le Chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, met à exécution ses menaces. La semaine dernière, les forces de l'ordre ont réprimé la manifestation pacifique des étudiants des classes préparatoires aux grandes écoles d'ingénieurs du lycée Moulay Youssef, filière PSI (Physique-sciences de l'ingénieur), qui protestaient devant le ministère de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieur contre ce qu'ils qualifient de « discrimination ». Tout a commencé après la publication de la note d'information sur le concours national commun d'admission aux grandes écoles d'ingénieurs (CNC) marocaines ou étrangères. « Nous étions surpris de voir que le nombre de places accordées à notre filière dans les grandes écoles d'ingénieurs comme l'EHTP (Ecole Hassania des travaux publics) ou encore l'EMI (Ecole Mohammadia d'ingénieurs) a été revu à la baisse. Or, le nombre de candidats au concours a augmenté et ne cesse d'augmenter chaque année », s'indigne une jeune étudiante. Et de poursuivre : « Nous exigeons alors de revoir cette décision, qui est une discrimination à l'égard de notre filière. Nous voulons que le ministère nous réserve plus de places dans les écoles supérieures d'ingénieurs ». Attaque-surprise Une revendication jugée « légitime » par ces étudiants, qui disent avoir soumis leurs doléances au ministre de l'Enseignement supérieur Lahcen Daoudi. « Nous avons envoyé une lettre au ministère de l'Enseignement supérieur pour résoudre notre problème. Nous n'avons pas reçu d'écho. Nous avons alors décidé de manifester devant la tutelle pour qu'ils entendent notre voix », poursuit la jeune fille. Ils sont venus de Tanger, Casablanca, Fès… pour défendre leur avenir. En guise de solidarité, des étudiants d'autres filières ont également manifesté avec leurs camarades. Cependant, les manifestants, dont la plupart sont à leur première sortie dans la rue pour faire valoir leurs droits, ont été surpris par l'intervention musclée des forces de l'ordre. « Une fois devant le ministère, nous avons exigé de rencontrer un haut responsable. Le chef de cabinet du ministre ainsi que d'autres personnes nous ont accueilli à l'intérieur du bâtiment. Nous étions une dizaine d'étudiants. Nous avons exposé notre problème. La discussion était calme. Soudain, on entendit des cris de filles. Quel fut notre surprise de voir les policiers armés de leurs matraques frappés violemment les étudiants. Les forces de l'ordre visaient surtout les filles. Il y a eu plusieurs blessés. Ils souffrent de fractures, desbleus…. Nous n'avons pas compris cette réaction alors que notre manifestation était pacifique et a pour but de défendre notre avenir professionnel », déplore une autre étudiante. La violence inouïe avec laquelle les forces de l'ordre ont réprimé la manifestation a suscité la colère de la Fédération nationale de l'enseignement affiliée à l'UMT (Union marocain du travail). La centrale syndicale a dénoncé dans un communiqué l'intervention des forces de l'ordre et a appelé à l'ouverture d'une enquête juste et transparente sur cette répression policière et la poursuite des responsables de cette « agression ». L'UMT, qui affirme son soutien aux étudiants, appelle également la tutelle à privilégier le dialogue avec les concernés pour répondre à leurs revendications « légitimes ». Manifestations : le mot d'ordre de Benkirane « Le droit de manifester et d'exprimer des revendications sociales est légitime, mais doit obéir aux dispositions de la loi ». Les propos sont du chef du gouvernement. Abdelilah Benkirane s'exprimait lors d'un point de presse, organisé il y a quelques jours à l'issue du Conseil de gouvernement. « Des actions de protestation ont connu ces derniers temps des dépassements qui ne sauraient perdurer, comme l'occupation du domaine public », a-t-il fait savoir d'une manière ferme, précisant au passage que le gouvernement, qui « reste toujours ouvert au dialogue, assumera ses obligations pour faire respecter la loi ».