A l'image de la Tunisie, l'après-Moubarak en Egypte est loin de tenir ses promesses. Dans la nuit de mardi à mercredi, la place Tahrir au Caire a été le théâtre de heurts violents entre manifestants et policiers. L'armée, ciblée, est de plus en plus contestée par les Egyptiens. Les Cairotes sont descendus mardi soir dans la rue, principalement place Tahrir, pour demander des comptes à l'armée. Dans la nuit de mardi à mercredi, des centaines de jeunes ont affronté des forces de l'ordre munis de gaz lacrymogène. Leurs revendications vont à l'encontre de la lenteur dans la mise en place des réformes ; d'un niveau de vie plus bas que jamais (les Egyptiens vivent en moyenne avec moins de deux dollars par jour) ; des méthodes des autorités de transition qui ressemblent, à s'y méprendre, à l'ancien régime, avec des arrestations et des condamnations d'opposants à la pelle, de la répression, etc. Mais surtout, les manifestants soulèvent la question du transfert de pouvoir de l'armée vers la société civile qui tarde toujours. Le bilan, après cinq mois de transition en Egypte est affligeant ! C'est peut-être même encore pire qu'avant. Du coup, les Egyptiens les plus démunis, au bout du rouleau, avec le sentiment de n'avoir plus rien à perdre, demandent, exigent un changement. Maintenant. Quittes à semer le chaos place Tahrir. L'armée a pris les commandes de l'Etat après la révolution du peuple égyptien qui s'est soldée, il y a cinq mois, par la fin du règne de Hosni Moubarak, après trente années aux commandes. C'est grâce à l'armée que Hosni Moubarak a quitté le pouvoir. Elle n'avait, de toute façon, d'autre choix que lui montrer la porte de sortie, vu l'ampleur de la contestation fin janvier. Mais, c'est en même temps l'armée qui dirige le pays depuis plus d'un demi-siècle, les généraux se succédant aux plus hauts postes de l'Etat. Aujourd'hui, à l'heure où la crise poste-Moubarak bat son plein, les Egyptiens veulent en finir avec les hommes d'Etat corrompus toujours présents dans le landernau du pouvoir, issus principalement de l'armée. Mardi soir, les slogans de la rue place Tahrir demandaient aussi le départ du Maréchal Mohamed Hussein Tantaoui. Agé de 75 ans, il est actuellement le chef du Conseil militaire suprême. C'est cette instance qui dirige le pays en transition. Il est de facto le chef d'Etat actuel. Le Maréchal Tantaoui fut aussi le ministre de la défense sous Moubarak et commandant en chef des forces armées égyptiennes. Lui aussi est accusé, par beaucoup, comme étant au cœur du système de corruption de l'ancien régime. C'est donc la transition post-révolution et ceux qui en ont la charge, qui ont été pris pour cible par les manifestants. Pour justifier ces heurts, l'armée a publié un communiqué sur la page Facebook officielle de l'armée égyptienne, qui se passe de tout commentaire : «Les regrettables incidents qui se sont déroulés à Tahrir, dans la nuit du mardi au mercredi, n'ont pas d'autre raison que de tenter de déstabiliser la sécurité de l'Egypte»