La transhumance est sur le point de disparaître. Le projet de la Constitution a consacré l'article 61 à ce sport national. La transhumance est bannie. C'est l'une des mesures phares du projet de la Constitution qui sera soumis le 1er juillet à la consultation populaire. «Tout membre de l'une des deux Chambres qui renonce à son appartenance politique au nom de laquelle il s'est porté candidat aux élections ou le groupe ou groupement parlementaire auquel il appartient, est déchu de son mandat», met en garde l'article 61. Un avertissement accompagné par l'adoption de mesures concrètes afin de dépasser le stade des bonnes intentions pour passer aux actes. Ainsi «la Cour constitutionnelle, saisie par le président de la Chambre concernée, déclare la vacance du siège, et ce, conformément aux dispositions du règlement intérieur de la Chambre concernée, qui fixe également les délais et la procédure de saisine de la Cour constitutionnelle». C'est la première fois que le législateur marocain s'attaque de façon aussi claire à ce mal qui rongeait, et continue encore, de miner la vie politique nationale. A quelques jours du referendum, des informations font état de députés ou de conseillers qui reniaient leurs couleurs politiques et font allégeance à d'autres structures partisanes. Avant le début des sessions orales hebdomadaires dans les deux Chambres, les questeurs annoncent toujours des départs. Les précédentes tentatives se sont révélées vaines face à l'ampleur de la transhumance, à l'image du code des partis, voté fin 2005. Fruit d'un consensus des partis, cette loi a vite montré ses limites. L'article 5, véritable pièce maîtresse de cet arsenal juridique, érigé en rempart contre le nomadisme n'a pu l'arrêter. Les assauts ont repris de plus bel. L'avènement du PAM sur l'échiquier politique en 2008 a constitué l'âge d'or de la transhumance. Sous l'effet de Fouad Ali El Himma, et notamment sa proximité avec le roi, il a réussi à battre tous les records de la scène parlementaire : de trois députés au lendemain des législatives de septembre 2007, il a réussi à monter un groupe de plus de 36 sièges. Une «prouesse» qui restera dans les annales de la vie parlementaire au Maroc mais également ailleurs. Ce score, important soit-il, ne le satisfaisait visiblement pas pour autant, de nouveaux adhérents rejoignaient le groupe au point qu'il dépassait celui du Premier ministre, Abbas El Fassi, pourtant arrivé premier en 2007 avec 54 députés. Les communales du 12 juin 2009 ont donné l'occasion pour le groupe de Fouad Ali El Himma, devenu PAM, de rééditer son «exploit» avec l'arrivée de nouveaux adhérents dans ses rangs. Là aussi, la fameuse circulaire de l'ancien ministre de l'Intérieur, Chakib Benmoussa, s'était révélée inutile. Le tribunal administratif a débouté le ministre et donnait raison aux transhumants pour inconstitutionnaliser l'article 5 du code des partis. Le projet de Constitution a nettement réduit le champ d'action de l'immunité parlementaire. L'article 64 stipule qu' «aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi ou recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion d'une opinion ou d'un vote émis par lui dans l'exercice de ses fonctions, hormis le cas de l'opinion exprimée qui met en cause la forme monarchique de l'Etat, la religion musulmane ou constitue une atteinte au respect du roi». En dehors de cette condition, tout député ou conseiller peut être poursuivi en justice pour des agissements non conformes à la loi. Cet article pourrait, ainsi, ouvrir la voie aux jugements de plusieurs parlementaires mis en cause dans des affaires de droit commun. Certains sources avancent qu'une trentaine de personnes pourraient être concernées par cette réduction de l'immunité parlementaire.