vL'artisanat ne s'est pas incliné devant le renouveau du design et ce dernier n'a pas ôté la modernité à laquelle les artisans prétendent déjà, depuis des années. Artisanat et design font bon ménage, alliant travail manuel des artisans dépositaires d'un patrimoine culturel et versions originales et inédites venus du monde du design. Ce duo, qui fait déjà l'objet de programmes de l'UNESCO et de l'ONU, retient même depuis deux ans une attention particulière de la part du secrétariat d'Etat chargé de l'Artisanat. En l'intégrant dans la stratégie de promotion de l'artisanat du Maroc, c'est une deuxième édition qui a débuté lundi 29 mars dernier à la cathédrale du Sacré cœur de Casablanca. Ouverte au public, l'exposition des objets en thuya, de maroquinerie, de céramique, de bijoux de Laâyoune et d'Essaouira, des tenues d'Orient et de la poterie de Safi sont montrés tel que jamais modélisés avant. Motivés, riches en savoir les uns comme les autres, artisans et designers se sont associés pour créer avec talent, ensemble ou individuellement, des œuvres-objets inédits tant par leurs formes que par le choix des matières. Et dans un style particulièrement nouveau ou simplement inscrit dans le renouveau, ils ont poussé les limites de la création banale pour donner vie à une collection qui constitue aujourd'hui le fonds du secrétariat chargé de l'Artisanat. «C'est susciter le désir de se rencontrer chez les artistes. L'envie de créer, de se dépasser, de pousser les limites de la création a été également une occasion de rendre aux maîtres artisans l'orgueil de leur métier et le respect de la matière première», a déclaré Amina Agueznay, architecte et designer. C'est elle qui est partie à la rencontre des mâallems ébénistes et des bijoutiers d'Essaouira, un voyage rencontre qui a offert une série d'échanges sur l'éveil écologique, mais surtout des chefs d'œuvre en thuya et des bijoux inédits. Un peu plus loin de la ville des vents, le voyage, s'il n'a pas été physique s'est matérialisé en effet par le transport des collections de tissage de Laâyoune, des collections de maroquinerie de Marrakech, des collections de ferronnerie de la même ville ocre, des collections de bijoux de Tiznit ou encore de vannerie de Taza et bien d'autres vers Casablanca, pour y rester jusqu'au 4 avril. Le principe de l'unicité dans la création artistique n'est que fable devant la résultante de onze jours de résidence entre Amina Agueznay et 23 artisans issus de Laâyoune et fervents du monde de la bijouterie et de la maroquinerie. De jolis bracelets, à base de cuir et de bois, d'autres en sedoua et formica dégagent encore les effluves de la matière comme principal témoin de son attachement et du respect qui lui a été voué par la manipulation des artistes. Parmi le panel de designers qui ont réalisé ce voyage dans le temps par la matière, on cite Hicham El Madi pour la céramique de Safi, Hicham Lahlou pour la dinanderie de Fès, Marga Crespo et Antonio Cezon pour les bijoux de Tanger, Fatima Quesada pour la poterie d'El Hoceima, Nade Favreau pour la collection de tissage de Ouezzane ou encore Soumiya Jalal Mikou pour la collection de tissage de Laâyoune. Si l'un ou les autres étaient inconnus ou inatteignables jusque là dans le petit monde des artisans, aujourd'hui, ils ont réussi ensemble la mixité et la richesse des contrastes. Le sacre d'une ascension en couleurs à la cathédrale du Sacré cœur !