En sollicitant une audience par visioconférence, le clan Ghali et ses parrains jouent la carte de l'apaisement pour rectifier le tir après les déclarations faisant état de sa non comparution. La balle est désormais dans le camp du juge d'instruction. L'étau se resserre autour du chef du front polisario, Brahim Ghali, hospitalisé à Logroño, en Espagne. Dans la nuit de mardi à mercredi, le polisario a indiqué aux principaux médias espagnols la décision des séparatistes : Brahim Ghali comparaitra via visioconférence, mardi 1er juin à 10h30. C'est au représentant du polisario, Abdellah El Arabi, qu'a été confiée la mission de «redorer l'image» des séparatistes auprès de l'opinion publique espagnole. Exit les paroles de Salem Lebsir aux micros du pure-Player espagnol OK Diario lorsqu'il jurait que son patron n'a pas de compte à rendre à quiconque, ni quoique que ce soit à se reprocher. Lebsir avait même déclaré ouvertement que Ghali rebrousserait chemin dès que son état de santé le permettrait. À présent, le front cherche à dédouaner son patron et distille son tissu de mensonges : «Son état de santé ne lui permettait pas de ratifier la convocation (...) ce n'est que vendredi dernier qu'il a retrouvé ses esprits», avance le représentant du front polisario. N'avait-il pourtant pas déclaré aux agents espagnols qu'il devrait consulter ses supérieurs algériens comme l'ont bien noté les policiers chargés de l'identifier ? Qu'à cela ne tienne ! Le polisario vire sa cuti et adopte un ton conciliateur: Ghali ne compte pas prendre la poudre d'escampette et comparaîtra devant le juge d'instruction espagnol, a finalement lâché l'organisation séparatiste. Celle-ci a souligné que Ghali, étant toujours convalescent, demandera la permission au juge de se présenter par visioconférence. S'agit-il d'une pression du gouvernement espagnol au vu des lourdes conséquences, sur les relations bilatérales, d'une éventuelle fuite ? En tout cas, la décision a été communiquée par le front, ce qui implique qu'elle est mûrement réfléchie et jouit de la bénédiction des «parrains» de l'organisation. L'on s'interroge aussi si l'organisation a décidé de lâcher cet encombrant leader, dont l'image est sacrément écornée après les lourdes accusations qui pèsent sur lui et le scandale de ses tentatives de soustraire à la justice, comme l'attestent les déclarations de son bras droit. Que risque-t-il à présent? Contacté par Les Inspirations ECO, Hilal Tarkou, président des avocats d'origine marocaine exerçant en Espagne, ne cache pas son soulagement face à cette décision. Il rappelle tout de même que le juge d'instruction a refusé d'adopter des mesures conservatoires car tout prévenu demeure innocent tant que le verdict n'est pas prononcé et ce, en conformité avec l'article 17 de la Constitution espagnole, lequel porte sur la liberté de circulation. Il n'en demeure pas moins qu'il reste possible que «Ghali adopte une stratégie basée sur le silence et refuse de répondre aux accusations qui pèsent sur lui, comme le lui garantit la loi», met en garde notre interlocuteur. Toutefois, cette étape est nécessaire pour que le juge décide du cours à donner à l'instruction. C'est au terme de cette audition, ajoute Me Tarkou, que le chargé de la chambre no 5 à l'Audience nationale, décidera du sort de chef du polisario. Les plaignants, et en conformité avec l'article 505 du Code pénal, réclameront la détention provisoire du prévenu en se basant sur l'une des quatre circonstances qui justifient cette mesure. Dans cette affaire, c'est le risque de fuite, bien concret, qui sera le motif brandi pour réclamer son placement en détention provisoire. L'avocat de la partie plaignante peut s'appuyer sur deux antécédents pour soutenir sa demande. En effet, Ghali a pris la fuite en 2013 et a décidé d'annuler un déplacement le 9 novembre 2016 à Barcelone, pour éviter de comparaître devant le tribunal. Et les circonstances de son entrée sur le sol espagnol, par le biais d'une identité montée de toute pièce, peuvent-être un élément aggravant. Que risque-t-il à présent? «Selon le code 604, il risque la prison permanente», équivalent en espagnol à perpétuité, témoigne le membre du barreau espagnol. Le juge devrait prendre en considération la situation politique, car la loi est régie par la réalité, rappelle l'avocat marocain. Or, il faut s'armer de patience car la procédure sera longue. «Ils sont plus de 100 plaignants à convoquer, auditionner… examiner les preuves à charge, et elles sont nombreuses et irréfutables», témoigne Me Tarkou qui a pu accéder à quelques dossiers des victimes du tortionnaire en chef du polisario. Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations Eco