La ruée du Trésor vers le marché intérieur n'est pas prête de s'essouffler. C'est du moins ce que l'on pourrait déduire des prévisions réalisées par BMCE Capital markets pour le marché obligataire sur les mois à venir. Le Trésor devrait en effet maintenir le rythme de son recours massif aux emprunts internes pendant le deuxième semestre de l'année 2012, sur fond d'incertitudes qui pèsent aujourd'hui sur une éventuelle levée à l'international. À ce sujet, les analystes de BMCE Capital Makets ne manquent pas de relever que le Trésor, qui avait prévu dans la loi de finances un financement extérieur de 16,5 MMDH, s'est finalement retrouvé dans une situation de désendettement de 2,2 MMDH. Cette situation pourrait laisser «présager un recours important à ce canal de financement dans les prochains mois», considèrent les analystes. Pour ces derniers, d'une part, l'argentier de l'Etat pourrait procéder à de nombreux tirages bilatéraux faisant appel à des créanciers internationaux pour pallier à ce déficit. D'autre part, une sortie à l'international pourrait soulager les caisses de l'Etat. Cependant, au vu des dernières déclarations des représentants du ministère de l'Economie et des finances, rien n'est encore décidé concernant le recours à cette option. La question qui se pose alors est de savoir jusqu'à quand le Maroc pourra-t-il éviter une sortie à l'international ? Pour répondre à cette question, il faut d'abord souligner que le Trésor doit faire face à d'importantes tombées en capital consécutives à des levées antérieures. En d'autres termes, l'Etat devra rembourser l'équivalent de 5,6 MMDH par mois (33,9 MMDH de tombées prévues durant ce semestre). À ces montants, il faut rajouter les lignes budgétisées dans la loi de finances 2012 et non encore concrétisées. À ce titre, rappelons que, durant le premier semestre 2011, seul 46% du montant des emprunts prévus ont été levés, ce qui laisse un reliquat de plus de 32 MMDH. En tout, l'Etat devra donc emprunter en moyenne 11,5 MMDH par mois durant le semestre en cours. Or, le marché intérieur ne semble plus aujourd'hui en état d'absorber toute cette offre de titres de dette. L'assèchement des liquidités dont souffre le marché a engendré un déficit moyen de plus de 60 MMDH durant le premier semestre. À cela, il faudra ajouter les effets des sorties de devises consécutifs au paiement des dividendes par les filiales de groupes étrangers. Selon les analystes, durant la période juin-juillet, le Maroc devrait enregistrer une sortie de plus de 9 MMDH qui viendrait alourdir davantage la sous-liquidité du marché local. «Cette pénurie de cash a eu un impact majeur sur la demande des bons du Trésor».«Cette situation pourrait pénaliser les finances publiques et donnerait lieu à une tension sur les taux», prévoit-on chez BMCE Capital Market. Cela veut dire que le financement local, en plus de se resserrer, risque également de devenir plus cher. Au même moment, les conditions sur les marchés internationaux semblent devenir des plus propices, comme en témoignent deux des dernières levées, l'une concrétisée par la France et l'autre par un grand fonds d'investissement (FESF). Les deux emprunteurs ont en effet levé ces derniers jours, pour la première fois de leur histoire, à des taux négatifs. En d'autres termes, les prêteurs ont payé la France et le fonds d'investissement pour accepter de s'endetter auprès d'eux. Cette situation, assez rare témoigne, selon les analystes internationaux, de la volonté des investisseurs étrangers (particulièrement européens) de sécuriser au mieux leurs placements dans un contexte où les titres de dette émis, surtout par les pays européens, deviennent de plus en plus risqués. Le Maroc qui, malgré quelques difficultés économiques, reste selon les experts un pays dont la dette souveraine est globalement bien appréciée par les investisseurs, ce qui lui permettrait (certainement pas d'obtenir également des taux négatifs) mais des conditions intéressantes en cas de levée internationale.