Concevoir une réforme de la Caisse de compensation sans toucher au prix du gaz. Apparemment il s'agirait là, selon les observateurs, d'une mesure difficilement réalisable vue le coût global supporté par l'Etat sur la subvention du gaz qui a atteint 13 MMDH en 2011, soit plus de 25% de la charge globale de tous les produits subventionnés. Au regard de ces données, le gouvernement pourrait éventuellement prendre une décision des plus difficiles dans l'histoire du Maroc en titillant le compartiment du prix du gaz. Et pour cause, c'est le produit dont la part de subvention dans le prix de vente final est la plus élevée. Le prix de la bonbonne de gaz est en effet resté inchangé depuis 2000, alors qu'en même temps, les prix à l'importation ont atteint des sommets. La situation est donc telle que l'Etat se doit de débourser pour chaque bouteille de 40 DH, une subvention de plus de 83 DH. En d'autres termes, le citoyen marocain paie à peine 32% du prix réel d'une bouteille de gaz. En tout, les Marocains ont consommé 1.794.152 tonnes de gaz butane en 2011, soit près de 400.000 tonnes de plus qu'en 2006. La suppression de la subvention du gaz reviendrait donc à faire payer aux citoyens trois fois le prix qu'ils paient aujourd'hui pour une bombonne de gaz. Quel que soit le système de reversement de cette subvention aux populations démunies, la suppression de la subvention risque donc d'être la décision la plus houleuse qu'aura à prendre le gouvernement dans le cadre de cette réforme de la compensation. En attendant, force est de constater qu'au niveau du gaz aussi, à l'instar des produits pétroliers liquides, ce sont bien entendu les catégories sociales les plus aisées qui coûtent le plus à l'Etat. Si l'on se fie aux estimations calculées par le conseil de la concurrence, 5,2% seulement de ceux qui bénéficient de la subvention sur le gaz appartiennent à la catégorie des pauvres. Pis encore, pour le premier quintile de la population, soit celui dont les revenus sont les plus faibles, le bénéfice de la subvention ne dépasse pas 257 DH par personne et par an, alors que le cinquième quintile, soit celui des populations les plus aisées bénéficie de 585 DH. C'est dire l'ampleur de la problématique du ciblage dans le gaz. Qu'adviendra-t-il donc si on libéralisait totalement les prix de cette matière ? D'emblée, la bouteille de gaz coûterait l'équivalent de 210% de son prix actuel. Les populations pauvres devraient dans ce contexte subir un surcoût de 229 DH par personne et par an, soit quasiment plus du double de ce qu'elles subiraient si l'Etat décidait la libéralisation conjointe des prix du sucre et de la farine. Pour limiter ces effets inflationnistes sur le prix de vente, et partant l'altération du pouvoir d'achat des ménages, l'option d'une modulation fiscale, via la suppression de la TIC et de la TVA sur le gaz permettrait de contenir le prix de vente final à 94,54 DH, en contrepartie d'un manque à gagner par l'Etat au niveau des recettes fiscales. Comment marche la subvention dans le gaz. En attendant, il y a lieu de souligner qu'aujourd'hui «la filière gazière est administrée de bout en bout», selon le Conseil de la concurrence qui souligne par ailleurs que ceci se traduit, entre autres, par un manque de concurrence sur les prix de la part des 14 opérateurs présents sur le marché national. Le prix de reprise, sur la base duquel estcalculée la subvention, est indexé sur le cours moyen mensuel de Rotterdam (cours de référence international). Deux différences majeures sont constatées pour le gaz comparativement avec les produits pétroliers liquides, faisant ainsi intervenir deux formes de subventions supplémentaires pour le gaz Butane. Il s'agit dans un premier temps du fait que le différentiel entre le prix d'acquisition réel et le prix de reprise est régularisé auprès de la Caisse de compensation. Si celui-ci est supérieur au prix de reprise, cela donne lieu à une subvention. En revanche, s'il est inférieur, il est prévu la restitution de la différence au profit de la Caisse de compensation. «Ce dernier cas est très rare au Maroc» précise-t-on auprès du Conseil de la concurrence. Dans un deuxième temps, le prix de reprise étant assuré pour toutes les sociétés dedistribution, cela implique la prise en charge des frais de transport des ports vers les centres emplisseurs qui se chiffrent à prés de 200 MDH. Notons parailleurs que la pression fiscale est moins élevée sur le gaz butane que ce n'est le cas pour les autres produits pétroliers. Les prélèvements au titre de la TIC par exemple représentent à peine 82 MDH contre plus du double pour le fuel industrie.