Les télévisions marocaines ont-elles vraiment besoin de revoir leur programmation ou de changer de positionnement ? Alors que le débat – très houleux – sur les nouveaux cahiers des charges des télévisions publiques s'est estompé, une étude fraîchement publiée par Marocmétrie remet en question les arguments présentés par les détracteurs des actuelles grilles de programmes : concurrence des chaînes internationales, manque de cohérence des programmes, migration des téléspectateurs... Il s'agit, en l'occurrence, de l'étude Intermétrie février 2012, réalisée une à deux fois par an. Pour ceux qui ne la connaissent pas, l'intermétrie est une étude de mesure d'audience qui comprend toutes les chaînes de télévision diffusées au Maroc, aussi bien nationales qu'internationales. Le trio national prend le devant Près d'un mois donc après la publication des nouveaux cahiers des charges, encore en cours de révision d'ailleurs, les résultats obtenus à l'issue de cette enquête sont pour le moins édifiants. Sur plus de 3.380 personnes de 15 ans et plus, interrogées pendant 14 jours sur leurs habitudes télévisuelles, un constat : sur les centaines de chaînes disponibles au bout de nos télécommandes, les télés nationales sont, ont ne peut plus, bien placées. C'est simple, 2M (y compris 2M monde) arrive en tête du top 20 avec plus de 10,7 millions de personnes en audience cumulée sur l'ensemble de la journée, soit une part d'audience de 27,6%. Al Oula n'est pas moins bien lotie puisque la chaîne de la rue El Bhiri arrive juste derrière, avec près de 6,7 millions de téléspectateurs, soit une part d'audience de 9,9%. En septième position, c'est la chaîne tangeroise Medi1TV qui décroche une part d'audience de 2,1% pour près de 1,4 million de téléspectateurs. La programmation des chaînes marocaines ne serait donc pas si «terrible » que cela, puisqu'elles concurrencent des chaînes aux moyens beaucoup plus importants, telles que Al-Jazira Sport, deuxième du top 20 avec près de 6,7 millions de téléspectateurs ou encore MBC4 et Al-Jazeera, respectivement cinquième et sixième avec des parts d'audience de 2,6 et 2,4%. Mieux, les résultats de l'enquête Intermétrique révèlent que même les chaînes nationales les plus «délaissées » de nos télécommandes, en l'occurrence Arryadia, Assadissa ou Arrabia... autrement dit, les chaînes thématiques de la SNRT, séduisent - contrairement aux idées reçues - grâce aux yeux des téléspectateurs locaux. Ce que le cabinet d'audience nomme comme, «autres chaînes marocaines» arrivent, en effet, en quatrième position du classement avec un total de plus 1,4 million de personnes, soit une part d'audience de 2,6%. Bien que le groupe de chaînes thématiques ait perdu quelques points par rapport à octobre 2011 - date de la dernière étude Intermétrique - les «autres chaînes marocaines» sont tout de même parvenues à grimper d'une place, devançant ainsi MBC4. Le prime change (pas) la donne Néanmoins, entre garder la télé allumée toute la journée et regarder une chaîne, il y a tout de même une nuance. C'est bien connu, l'audience du prime time ne trompe jamais. À ce niveau, l'observation des habitudes télévisuelles entre 20h45 et 22h30 ne semble pas changer grand chose. Au contraire, à en juger les résultats de l'enquête périodique, les trois chaînes nationales les plus en vue, autrement dit, 2M, Al Oula et Medi1TV occupent le top 5 du classement intermétrique. Sur le podium on y retrouve sans grande surprise, 2M et Al Oula avec des parts d'audience respectives de 24 et 19,4% aux côtés d'Al-Jazeera Sport. Même la chaîne Qatarie qui est parvenue à mettre la main sur les plus importants rendezvous sportifs internationaux, arrive loin derrière avec une part d'audience de 3,5%. Ces résultats tendent donc à soutenir ceux observés par Marocmétrie quelques mois plus tôt, lors de l'étude Intermétrique de juin et octobre 2011. C'est confirmé, le trio de chaînes 100% marocaines (ou presque) est aujourd'hui – aux yeux des téléspectateurs locaux – au même niveau, si ce n'est mieux, que les chaînes étrangères. Face à un tel constat, chiffré, il est évident que la concurrence - tant crainte - des chaînes étrangères et particulièrement arabes, s'estompe à force d'une programmation qui pour le coup, adopte une stratégie de diversification axée justement sur «les produits du monde». C'est bien connu, la première de la classe, 2M, est «la» chaîne de la production étrangère par excellence et particulièrement en fiction. Al Oula et Medi1 TV s'y sont également mises, probablement moins intensément, ce qui expliquerait leurs positions. À croire, finalement, que les téléspectateurs ont fini par (re)trouver ce qu'ils cherchaient ailleurs... ici même. S'il y a lieu d'examiner ces constats à la lumière des fameux cahiers des charges, qui tendent à métamorphoser nos chaînes, reste à savoir, ce qui prime. En effet, lorsqu'il s'agit de médias audiovisuels et particulièrement publics, est-ce «l'intérêt général» ou les penchants de «la généralité des téléspectateurs » qui tranchent ? En attendant les décisions de la commission mandatée par le gouvernement et présidée par l'ancien ministre de la Communication, Nabil Benabdellah, afin de «réviser» lesdites feuilles de routes, les chiffres d'audience ont également leur mot à dire