«L'oeil est un mauvais instrument de mesure», disent les mathématiciens et souvent ce que l'opinion croit est en total déphasage avec la réalité à la lecture des résultats que les enquêtes révèlent. ■ Le commun des mortels ne s'attendait pas à de pareilles conclusions livrées en toute transparence et exactitude par les premiers sondages effectués dans la mesure médiatique du champ audiovisuel national. premier essai transformé par les opérateurs audiométriques est réussi. Il faut saluer, au passage, fiabilité et la crédibilité des outils scientifiques en oeuvre dans l'évaluation audiométrique des performances des opérateurs audiovisuels nationaux avec un investissement conséquent de 25 Millions dont la moitié supportée par les annonceurs. Le donneur d'ordre CIAUMED (Centre interprofessionnel d'audience médiatique) tient dans ces premières réalisations sa première banque de données en confiant les sondages à Marocmétrie dont les résultats la propriété intellectuelle du premier nommé. première des conclusions des sondages effectués d'avril à août dernier et pendant le Ramadan, montre que les Marocains sont assis devant leur poste TV pendant 3 h 17 mn chaque jour en période normale. Cette durée se rallonge de 50 mn au cours du mois de Ramadan. Mais c'est dans l'allumage des postes TV que le Maroc bat des records en laissant la télé en marche pendant plus de 8 heures (plus de 9 heures au Ramadan). Ce qui donne une durée d'écoute par foyer, estimée à 5h 16 mn et par individu âgé de 5 ans et plus, de 3h10mn. Le «nationalisme télévisé» des Marocains En général, l'audience est forte sur toute la journée avec des pics situés à la mi-journée (13h40) et le soir (22h et 23h). Seconde conclusion : la part d'audience des chaînes publiques marocaines monopolise l'offre télévisuelle toutes chaînes confondues. Al Oula et 2M totalisent 50% de cette part d'audience (60% pendant le Ramadan). C'est 2M qui vient en tête des préférences des téléspectateurs marocains en s'accaparant une part d'audience sur toute la journée de 25,1% contre 15,4% à Al Oula. L'écart se creuse du simple au triple dans la plage horaire entre 19h et 21h en scorant respectivement à 31,1% et 13,5%. Pour les chaînes étrangères, la part d'audience demeure assez faible dans les foyers, sans arriver à atteindre pour le plus performant d'entre elles, la barre des 8%. Et ce sont les deux chaînes MBC 2 et 4 qui sont les plus regardées (7,5% et 5,6%) devant El Jazeera qui score à 5% seulement. L'ensemble des chaînes françaises (TF1, France 2, France 5, Canal +, M6 et ARTE) totalisent 0,5%, ce qui signifie que leur audience individuelle-ment considérée est quasiment inexistante. Enfin, Medi1 Sat ferme la marche des lanternes rouges au classement général avec un taux d'audience de 0,4%. Au chapitre des émissions les plus regardées, incontestablement c'est la série «Mbarek ou Messaoud » sur la deuxième chaîne qui a pulvérisé tous les records d'audience en drainant près de 5 millions de téléspectateurs, comme mesurée durant la première semaine de Ramadan. Sur Al Oula, c'est le programme Naghmawatay qui caracole en tête avec 2 785 000 téléspectateurs qui s'accaparent une part d'audience de 34,1%. Il faut se résoudre à l'évidence des faits chiffrés et vérifiés qui apportent un cinglant démenti aux allégations répandues, virant au dénigrement systématique et à l'exagération pathologique. Sinon, comment expliquer que les programmes les plus suivis sont ceux qui sont, étrangement, les plus éreintés? L'irrationnel individuel ou collectif ne résiste pas à la réalité expérimentale et prouvée par la métrologie audiométrique entamée cette année dans le Royaume. Un exemple du fossé entre la pertinence de la mesure audiométrique et les croyances collectives: le discours Royal du 20 août dernier avait été crédité, dans un premier temps, d'une part d'audience «médiocre » à moins de 5% avant que l'affront ne soit lavé par les outils scientifi- ques concluant à un score plus conforme à la réalité de plus de 35%. Ce qui est un excellent score, tous pays confondus dans la même rubrique comparée. Mais la leçon magistralement administrée par l'enquête de Marocmétrie, c'est que les Marocains sont des «nationalistes télévisuels» en continuant massivement à regarder leurs chaînes publiques nationales dans les foyers. Ils apprécient les programmes de ces chaînes, ce qui témoigne de leur crédibilité auprès d'un grand nombre de téléspectateurs demeurés fidèles à 2M et Al Oula. Quant aux chaînes étrangères, elles sont vraiment loin d'avoir encore, du moins pour l'instant, leur préférence. ■ 3Questions à Fayçal Laâraïchi, président du pôle audiovisuel public et de la SNRT «Marocmétrie constitue un très bon outil» La Gazette du Maroc : Quelle est votre lecture des résultats de la dernière mesure d'audience qui positionne Al Oula comme dauphin de 2M? Fayçal Laâraïchi : Ce qui est important de savoir, c'est que les deux chaînes télévisées 2M et Al Oula font partie du même pôle audiovisuel public marocain et le taux consolidé d'audience est supérieur à 50%. Ce qui signifie que les Marocains préfèrent regarder leurs TV publiques. Naturellement, le pôle audiovisuel public s'applique à investir un gros effort dans la qualité de ses émissions et l'attractivité de ses programmations. Que pensez-vous de l'apport de Marocmétrie et comment voyez-vous l'impact de ses mesures d'audience sur la qualité des programmes télévisuels des chaînes publiques? Il est certain que Marocmétrie constitue un très bon outil d'audiométrie qui permet une meilleure connaissance des performances télévisuelles et des goûts et penchants des téléspectateurs. Ces mesures d'audience permettent, aussi, une meilleure appréhension dans la conception de notre activité pour affiner l'offre des chaînes publiques et dégager une meilleure visibilité. Ces mesures favorisent des analyses plus affûtées et plus rapides fondées sur la connaissance quantifiée des réalités du terrain. Quels sont les modes de financement de chacune des deux chaînes publiques en rapport avec le marché publicitaire et que pensez-vous du projet de suppression des écrans publicitaires dans les chaînes publiques en France ? Les modes de financement des chaînes télévisées publiques sont multiples de par le monde et le Maroc ne peut en constituer une exception. Au sein du pôle audiovisuel public national, les dispositifs mis en œuvre veillent à ce que les chaînes qui la composent soient financées de la même manière. Quant au projet en cours de débat en France sur la suppression de la publicité des chaînes publiques, il est difficile dans les conditions actuelles d'envisager sa transposition dans le Royaume. Disons que ce n'est pas à l'ordre du jour, pour l'instant. 3Questions à Younès Alami, directeur exécutif de Marocmétrie 3 «La mesure audiométrique est l'avenir» La Gazette du Maroc : Quelle est la mission de Marocmétrie et quels partenariats développe-t-elle au Maroc et à l'étranger ? Younès Alami : Marocmétrie a été adjudicataire de l'AO lancé en 2005 par le CIAUMED pour la mesure d'audience audimétrique de la TV au Maroc. Sa mission consiste à mesurer l'audience TV 24H/24 et 7j/7 des chaînes objet du contrat avec le CIAUMED.Marocmétrie se base sur le savoirfaire de plus de 25 ans de Médiamétrie qui est la référence en France de la mesure d'audience audiovisuelle et Internet, sur la technologie de Watermarking développée par Thomson et sur la maîtrise du travail sur le terrain de l'Institut de sondage marocain LMS-CSA. Quels outils fiables de mesure d'audience médiatique vous attachez- vous à mettre en œuvre ? Conformément au contrat nous liant au CIAUMED, nous avons sélectionné un panel de 750 foyers représentatifs de la population marocaine. Ces foyers ont été équipés d'un ou de plusieurs audimètres permettant de déterminer automatiquement si la TV est ON/OFF et la chaîne regardée. Les membres du foyer déclarent leur présence grâce à une télécommande. Toutes ces informations sont collectées selon des horaires bien ciblés dans la journée et la nuit. Aussi, Marocmétrie réalise une étude annuelle de cadrage auprès de 10 000 foyers pour maintenir le panel à niveau avec l'évolution des équipements domestiques marocains. Quel message souhaitez-vous véhiculer sur la valeur ajoutée de votre activité dans le cadre de la libéralisation et de la modernisation du champ audiovisuel marocain ? La mesure d'audience est vitale pour le marché de l'audiovisuel. La mesure audiométrique est l'avenir. La mesure d'audience est indispensable pour appréhender en toute transparence la libéralisation et la modernisation du champ audiovisuel marocain. Questions à Hassan Berrannoun, président du CIAUMED La mesure des audiences radiophoniques en 2009» La Gazette du Maroc : Pouvez-vous présenter à nos lecteurs le Centre interprofessionnel d'audience médiatique (CIAUMED) que vous pilotez? Hassan Berrannoun : Le Centre interprofessionnel d'audience médiatique (CIAUMED) est un GIE (Groupement d'intérêt économique) constitué de membres représentant les 4 collèges de professionnels que sont les annonceurs, les régies publicitaires, les agences Conseil en communication et les opérateurs médias audiovisuels. La composition du CIAUMED fort de ses 14 membres tient compte de l'équilibre dans la représentativité de toutes les professions y siégeant à parts égales : 7 agences et annonceurs et 7 chaînes et régies publicitaires. La mission globale du Centre consiste à ordonner la mesure d'audience des opérateurs et à veiller sur la véracité et la régularité de ses résultats, car les membres professionnels souhaitent connaître leurs performances, en mettant ainsi les prérogatives attribuées à la CIAUMED par la HACA. Les mesures télévisuelles sont opérationnelles en attendant d'en étendre la règle aux autres types de médias. Un appel d'offres international a été lancé et a permis de retenir Marocmétrie pour diligenter ces mesures. Quelle lecture êtes-vous en mesure de faire des résultats des mesures d'audience réalisées ces derniers mois et pendant le Ramadan ? Deux approches sont possibles en affirmant à la lecture des résultats de ces sondages que toutes les chaînes nationales qui scorent pour une part d'audience de 50% est à la fois bon et insuffisant. La véritable question, est de savoir ce que doivent faire les chaînes marocaines pour accroître leur part d'audience en s'attachant à réaliser plus de proximité et de s'appliquer à répondre aux attentes d'un plus grand nombre de téléspectateurs ? Où en sont les préparatifs pour le lancement de la première campagne de mesure radiophonique dans le Royaume ? Maintenant que la mesure d'audience des chaînes télévisées est opérationnelle, nous nous attelons à préparer le lancement des audiences radiophoniques avec la mise en place d'un Comité entièrement dédié à cette mission et dont les travaux avancent très bien. Les résultats de cette première campagne de mesure des radios devraient être disponibles dans le courant du deuxième trimestre 2009.