L'ambiance était tendue hier sous la coupole. Mais ce n'est rien à côté de ce qui attend le gouvernement Benkirane durant la session qui va s'ouvrir vendredi prochain. On peut avancer avec certitude, rien qu'à voir le menu et les délais qui s'annoncent, que ce sera la session test, grandeur nature, pour l'équipe Benkirane. Partant du fait que les ardeurs de l'opposition durant la session extraordinaire qui s'achève demain, ont été surtout tempérés de par l'héritage du gouvernement sortant, de la période de grâce et de la transition, il est clair que le prochain match s'annonce très serré. Plus que de faire passer une loi des finances ou des lois organiques, l'enjeu pour Benkirane et compagnie sera de pouvoir consolider sa majorité dans l'objectif de pouvoir donner un signal fort à ces électeurs. En ligne de mire, en effet, les élections communales qui s'annoncent ainsi que le dialogue social qui démarre cette semaine en attendant le très symbolique 1er mai où le gouvernement aura l'obligation d'annoncer des mesures concrètes. En attendant, Nizar Baraka avait ces derniers jours, la lourde mission, de donner un avant-goût de tout cela à travers l'adoption des amendements de la loi de finances, en mettant l'accent particulièrement sur les mesures à caractère social. Hier, la commission des Finances et du développement économique livrait en plénière son rapport à l'issue de l'étude du projet de loi de finances. Une étape décisive avant le vote final du document, prévu ce mercredi. Verdict: sur les 45 amendements présentés par la majorité, 18 ont été retenus. Ce qui n'est pas pour déplaire aux membres de la commission. «Le gouvernement a répondu favorablement à plusieurs amendements proposés par les députés de la majorité et relatifs au renforcement du volet social», commente Said Khaïroune, président de la commission. Pour les autres éléments non retenus, c'est le principe constitutionnel de l'irrecevabilité des amendements, entraînant une baisse des recettes, qui a eu gain de cause. Ersatz d'amendements Le rapport de la commission des Finances note que «151 MMDH ont été réservés au maintien de la cohésion sociale, qui englobe les budgets de l'Education nationale, le logement, la santé et l'INDH». Dans la foulée des amendements retenus, on retiendra notamment celles ciblant les catégories à bas revenus, notamment l'exonération de la TVA pour le traitement de certaines maladies chroniques qui priveront le budget de 600 millions de dirhams, ou encore la hausse des bourses des étudiants de divers cycles universitaires, qui coûteront annuellement 300 millions de dirhams. Par ailleurs, la commission a également obtenu que l'assise financière du Fonds de cohésion sociale soit évaluée à la hausse passant de 2 à 4 milliards de DH. Une mesure contre laquelle le patronat s'est accroché, car elle suppose une implication financière plus forte du tissu entrepreneurial. Et même si elle reste à valider lors du vote de la deuxième partie du budget, demain mercredi, cette mesure semble acquise si l'on en croit les pronostics de plusieurs députés. D'autres amendements à valider lors du vote de la première partie du budget prévu aujourd'hui dans la matinée sont à chercher dans l'un des rares nouveaux programmes introduits à la mouture léguée par le gouvernement sortant et concernent la nouvelle politique de l'aménagement des zones enclavées. L'enveloppe de 2,3MMDH de dotations réservées aux 3.300 douars qui se répartissent sur 22 provinces semble au dessous des objectifs tracés par le programme. Or, les débats ne s'arrêtent pas forcément aux amendements et touchent même à l'approche adoptée par le gouvernement pour l'établissement de l'ordre des priorités des mesures tracées. Les inquiétudes pèsent également sur la majorité. Noureddine Madiane, président du groupe de l'Istiqlal, estime que le plus grand problème à résoudre sera celui de la réduction des dépenses d'investissement. La hausse de 20% constatée sur cette rubrique va à l'encontre des nouvelles orientations du gouvernement, souligne ainsi le député istiqlalien, qui appelle également le gouvernement à ne pas laisser tomber le fonds de la «Zakat». Retard, l'éternelle brèche Comme attendu, la question du retard enregistré par le projet de budget sur son circuit de validation est revenue même en dernière ligne droite d'adoption. En ligne de mire, le fait que le gouvernement n'aura que 8 mois pour la liquidation de l'ensemble des investissements prévus par le texte. «La crainte est bien celle du taux d'exécution, à cause de la lenteur des procédures. Nous attendons le nouveau décret relatif aux marchés publics», explique le président de la commission des Finances. D'aucuns jugent également que «la rationalisation des dépenses a été prise en otage durant toute l'étape de la préparation du budget, tout comme la réforme de la Caisse de compensation». Abdelaziz El Omari, Président du groupe parlementaire du PJD. «Ce projet est celui de la restauration de la confiance» Les Echos quotidien : Est ce que le groupe parlementaire est convaincu par la mouture actuelle du projet ? Abelaziz El Omari : Le projet est l'expression budgétaire du programme gouvernemental. Avant de s'arrêter sur les mesures financières et douanières, il faut retenir les indicateurs politiques forts que le projet met en avant. Au sein du groupe du PJD, nous pensons que le projet est celui de «la restauration de la confiance». Comment vous comptez exercer votre rôle de contrôle ? Nous allons remplir notre devoir de contrôle à tous les niveaux. Je cite la nécessaire opérationnalité du pacte sur la gouvernance des établissements publics. Nous avons noté avec satisfaction l'ensemble des plans sectoriels prévus par le projet, qui a malgré les contraintes, réussi à garder sa vocation volontariste et son empreinte sociale. Nous appelons le gouvernement surtout à utiliser l'argent qui dort au sein des communes et d'activer la mise en place des produits bancaires islamiques. Les débats au sein de la commission ont-ils permis à l'opposition de faire entendre sa voix ? Nous avons pu aboutir à des formules concertées à propos des amendements qui ont été acceptés par le gouvernement. Il faut avoir en esprit que ce projet a une dimension transitoire, qui a été accentuée par les nouvelles données climatiques et la crise au sein de l'UE, qui ont obligé à revoir certaines hypothèses.