C'est parti pour le vote de confiance. Les trois prochains jours seront en effet consacrés au verdict final des députés sur la déclaration de Benkirane, qui a besoin de la majorité absolue pour bénéficier de l'investiture constitutionnelle. À la veille de la séance qui sera consacrée à l'intervention des présidents des 8 groupes parlementaires, la majorité parlementaire n'a pas de quoi s'inquiéter sérieusement sur le sort du sauf-conduit sollicité. Certains députés pensent même que les partis de l'opposition ont été quelque part acculés à partager les ambitions politiques et sociales du président du gouvernement. «Le programme propose une perspective de changement, en engageant la responsabilité du gouvernement», note Jamila Mossali, députée du PJD, qui ajoute : «certes, le programme est peu chiffré, mais c'est à l'occasion de la loi de finances qu'il sera traduit en budgets». Pour certains représentants de l'opposition, il n'y a pas lieu de s'alarmer, car le programme ne fait que reprendre «une série de réformes préconisées depuis une vingtaine d'années déjà. «Nous souhaitons qu'au cours des discussions, les mécanismes de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption soient clarifiés», souhaite pour sa part Ahmed Touizi, député du PAM. L'examen du programme gouvernemental sera aussi l'occasion de découvrir enfin la stratégie des partis de l'opposition. Si le RNI et l'USFP ont laissé entendre que le programme de Benkirane manquait d'audace, l'attitude du PAM et de l'UC sera à surveiller durant cette semaine parlementaire très chargée. «Une rencontre entre le leader du PJD et celui du PAM a eu lieu au siège du parti de la lampe», indique un député du PJD, sans indiquer le deal qui aurait été conclu entre les deux partis. Au sein de la 2e Chambre et même privés du droit de vote, les conseillers vont eux aussi procéder à l'examen du programme. La coordination des positions entre les groupes du même parti au sein des deux Chambres reste pour l'instant très faible, ce qui laisse présager un débat d'une toute autre nature, qui s'annonce très difficile pour la majorité, laquelle ne pourra pas compter sur le soutien de l'instance présidée par Mohamed Cheikh Biadillah. Les conseillers ne pourront par ailleurs être de la partie que pour quelques jours seulement, vu que de la session d'automne, toujours ouverte, interviendra début février. Parallèlement à l'entame de l'examen du projet, les présidents des groupes des partis de la majorité restent confiants sur l'obtention de la majorité absolue requise. La coalition parlementaire, composée de 221 députés, cherchera à réitérer le même «exploit» que lors du vote du règlement intérieur du Parlement, obtenu à l'unanimité. «Au cas où les 395 députés seraient présents le jour du vote, il faudrait que 263 députés s'expriment en faveur de la nouvelle politique de l'Exécutif». Pour l'instant, la majorité parlementaire préfère d'abord boucler la phase des discussions et mesurer le ton qui sera adopté par les présidents des groupes lors de leur évaluation de la feuille de route de Benkirane. Dixit... «C'est la première fois que les deux Chambres examinent ensemble le programme du gouvernement. Le président du gouvernement a donné un signal fort à l'occasion de la présentation de ce programme, qui renvoie au changement. Le programme parle d'une manière claire de la lutte contre la corruption, de la bonne gouvernance et de la composante identitaire de la société marocaine, qui sont des objectifs que tout le monde ne peut que partager avec ce gouvernement». Abdelaziz El Omari, Président du groupe parlementairedu PJD. «L'évaluation du programme permet de constater qu'il répond aux attentes sociales des Marocains. Nous allons entamer des discussions au sein du groupe pour prendre une décision et au cas où nous serions convaincus, il n'y a aucune raison pour nous de ne pas soutenir le gouvernement». Rachid Roukbane, Président du groupe du Progrès démocratique. Une session extraordinaire en vue C'est une véritable course contre la montre que les députés devront mener au cours de cette session. Malgré l'augmentation du nombre de commissions parlementaires à 8, l'agenda de Karim Ghellab sera particulièrement chargé. Passée cette semaine, qui sera consacrée au vote du programme, l'étape de l'élection des présidents des groupes parlementaires, la présentation et le vote de la loi des finances, ainsi que la préparation des premières lois organiques, ne pourront se faire dans le laps de temps de la session ordinaire. Une autre session extraordinaire n'est pas une hypothèse à écarter, selon plusieurs députés. Le prolongement du travail de l'instance parlementaire sera également imposé par le vote d'autres lois qui demeurent urgentes pour la bonne marche du gouvernement et que la Cour constitutionnelle devra valider. Outre la loi organique du gouvernement, Benkirane cherchera le soutien de sa majorité parlementaire, pour adopter la loi organique des régions - dont le renouvellement est prévu en mars -, avant la fin du premier semestre 2012. Le consensus qui doit être trouvé autour du découpage régional et du statut des nouveaux présidents des conseils régionaux ne sera pas facile à trouver, tout comme les modalités de l'activation de la solidarité entre les régions nanties et celles plus défavorisées. Les nouvelles dispositions du règlement intérieur retracent le droit à l'information des députés d'une manière qui allonge les délais d'examen des textes.