Les parlementaires de la majorité et de l'opposition sont prédisposés, à quelques exceptions près, à voter pour l'ensemble des lois électorales lors de la session extraordinaire du Parlement. La Chambre des représentants tiendra, aujourd'hui, une séance plénière consacrée à l'ouverture de la session extraordinaire et à l'examen et au vote des textes législatifs finalisés. Décidément, cette session, qui se tient près de deux mois et demi après l'adoption de la nouvelle Constitution, s'annonce sans grands enjeux. Pour les lois électorales qui devraient, en principe, être à l'ordre du jour de cette session, les dés sont jetés. L'essentiel du travail a été fait au niveau des réunions de concertation tenues entre le ministère de l'intérieur et les partis politiques. Le département de Taib Cherkaoui a réussi, au bout de plusieurs réunions, à obtenir un accord entre les partis au sujet de ces lois. De ce fait, les parlementaires de la majorité et de l'opposition sont pratiquement prédisposés, à quelques exceptions près, à voter pour la loi organique sur la Chambre des représentants, la loi organique sur les partis, la loi sur l'observation des élections, la loi sur la révision des listes électorales et fort probablement la loi organique sur les collectivités locales. A préciser que ces projets de lois devront également être examinés dans le cadre de la Chambre des conseillers. Les observateurs de la scène politique ne s'attendent pas, ainsi, à des surprises. Seul le groupe du PJD composé de 46 parlementaires a déclaré son intention de mettre les bâtons dans les roues. Pour lui, les lois électorales n'apporteraient rien de nouveau et ne permettraient pas, de ce fait, de garantir la crédibilité des institutions. Une position que tous les autres partis ne partagent pas, à l'exception, bien évidemment, des partis de gauche qui ont boycotté le processus d'élaboration des lois électorales. Mais, au-delà des positions des islamistes, c'est la «logique numérique» qui triomphera en dernier lieu. Les lois électorales, fruit d'un consensus parrainé par le département de l'intérieur, devraient être adoptées à la majorité écrasante. A noter que le président de la Chambre des représentants devait tenir hier, lundi 12 septembre, en fin d'après-midi, une réunion avec les chefs des groupes parlementaires pour établir un ordre du jour précis de cette session extraordinaire conformément à la loi. «Le Parlement peut être réuni en session extraordinaire, soit par décret, soit à la demande du tiers des membres de la Chambre des représentants ou de la majorité de ceux de la Chambre des conseillers. Les sessions extraordinaires du Parlement se tiennent sur la base d'un ordre du jour déterminé», dispose l'article 66 de la nouvelle Constitution. Certains parlementaires et observateurs n'écartent pas la possibilité de prévoir l'examen du projet de loi de Finances à l'ordre du jour de cette session. Notons que la Loi fondamentale ne prévoit pas de durée pour la session extraordinaire. L'article 66 de la Constitution dispose que lorsque l'ordre du jour de la session extraordinaire est épuisé «la session est close par décret». Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que la session extraordinaire se tient sous le signe d'un nouveau visage du Parlement. Désormais, ce n'est plus la majorité, gouvernementale qui compose avec une opposition. Un changement est intervenu au niveau du positionnement des partis dans le cadre du processus d'élaboration des textes encadrant l'opération électorale. Le MP et le RNI, deux composantes de la majorité se sont rangés du côté de leurs alliés de l'opposition, le PAM et l'UC. Une situation peu confortable pour l'USFP, le parti de l'Istiqlal et le PPS, le trio formant la Koutla. Alors que le PJD, qui promet de mener une bataille contre les lois électorales, fait cavalier seul. Ces positions prises par les différents partis se font remarquer clairement dans leurs réactions, recueillies par ALM, au sujet de l'examen des lois lors de cette session extraordinaire du Parlement. «Le groupe parlementaire du MP se conforme à deux principales conditions pour ce qui est de l'adoption des lois électorales. La première c'est que nous attachons aux positions de notre parti et la deuxième c'est que nous coordonnons notre action avec nos alliés, à savoir le PAM, le RNI et l'UC», précise Mohamed Moubdi, chef du groupe parlementaire du MP. «Nous allons voter pour ces projets de lois à partir du moment où elles constituent le fruit d'un consensus entre tous les partis. Certes, ces lois ne prennent pas en considération toutes nos propositions, mais il fallait faire des concessions», ajoute-t-il. Le MP indique que la coordination avec les composantes de l'Alliance des quatre constitue une priorité. «Certainement, nous sommes obligés de coordonner dans un premier pas avec nos alliés. La majorité vient au second rang. Nous donnons la priorité à nos alliés», indique M. Moubdi. Une position que n'apprécie guère les autres composantes de la majorité gouvernementale. «Les lois électorales actuellement à l'étude sont le fruit d'un consensus. Tous les partis ont donné leur accord et c'est pour cette raison que nous allons voter pour», indique Mustapha El Ghazoui, député PPS et chef du groupe parlementaire de l'Alliance des forces progressistes et démocratiques. «Nous espérons bien que les rangs de la majorité restent serrés du moins jusqu'à la fin de l'actuelle législature. La démarche du RNI et du MP est de nature à fragiliser la majorité», souligne M. El Ghazoui. Selon les observateurs, la position prise par le RNI et le MP ne change pas grand-chose pour les lois électorales à partir du moment où ces dernières sont le fruit d'un consensus. Cette position devrait, par ailleurs, peser lourd sur la majorité gouvernementale au cas où le projet de loi de Finances serait à l'ordre du jour de cette session extraordinaire du Parlement. Le parti islamiste a choisi, quant à lui, de se positionner contre les positions de ces deux blocs, bien qu'il sait qu'il ne sera pas en mesure d'imposer sa vision. «Nous n'avons pas la majorité au Parlement mais nous allons prendre une position claire pour que le citoyen sait qui défend quoi. Certes, nous ne sommes pas contre toutes les lois électorales. Notre approche consistera à traiter cas par cas», souligne Lahcen Daoudi, chef du groupe parlementaire du PJD. «Nous n'allons pas voter contre la loi sur l'observation des élections, par exemple. Mais, pour ce qui est de la loi sur la révision des listes, nous demandons à ce que les citoyens soient inscrits à la source à travers la CIN», signale M. Daoudi. Et d'ajouter : «On a fini par accepter le seuil de 3% au niveau national mais nous refusons à ce que les villes soient divisées en deux pour que le seuil de 6% ait un sens». Selon les observateurs de la scène politique, et au-delà des lois électorales, ce nouveau positionnement des partis au niveau du Parlement donne l'avant-goût de la prochaine étape post-électorale. L'Alliance PAM-RNI-UC-MP se met peu à peu sur pied et conforte sa position en prévision des prochaines élections prévues le 25 novembre. Les partis de la Koutla se trouvent contraints, à défaut de mieux, à coordonner leurs actions pour pouvoir tenir tête au nouveau pôle libéral. Le PJD se trouve, pour sa part, de plus en plus isolé.