Je suis sûr que vous l'avez déjà constaté sur le terrain, les Marocains, entre autres spécificités originales et exclusives, possèdent, presque tous, 2 têtes. Je présume, chères lectrices et chers lecteurs, que ce n'est pas votre cas, parce que vous, comme moi d'ailleurs, nous faisons partie des gens «bien», des gens «normaux». Personnellement, en tant que tel, je veux dire en tant que «mono-tête», je suis plus à même d'en parler tout à mon aise. Tout d'abord, mettons les choses au clair : je ne suis pas ici pour faire la leçon à qui que ce soit, n'étant pas moi-même, loin s'en faut, un être tout à fait sans défaut. Parfait ! Ceci étant clarifié, je reviens à mon propos. Je voulais vous parler donc, des «double-tête» qu'il faut distinguer des «trouble-fête» qui, eux, n'en font qu'à leur tête (c'est un peu facile, je sais, mais il fallait que je le lâche celui-là pour qu'il me lâche). Avant tout, je dois expliquer qu'un «double-tête» c'est quelqu'un qui n'a pas, comme on pourrait le croire, deux cerveaux et qui serait, par conséquent, doublement intelligent. Il ne faut pas non plus confondre avec la théorie dite, justement, des «2 cerveaux» si chère aux psys et aux pubeurs, et qui voudrait – je synthétise - que l'hémisphère gauche gèrerait la raison et la réflexion, et l'hémisphère droit, l'instinctif et l'émotionnel. Quoique, en réfléchissant bien, on pourrait peut-être trouver un petit rapport. En attendant, revenons maintenant à nos têtes stéréophoniques, et essayons, si on y arrive, de les analyser un peu. En fait, comment ça se présente ? C'est très simple, et je suis certain que vous avez dû remarquer ça plusieurs fois. Vous êtes, par exemple, dans la rue, et vous rencontrez un ami ou une amie et vous lui dites : «Où vas-tu ?». Vous avez une chance - ou un risque, c'est selon – qu'il ou qu'elle vous réponde plus ou moins ceci : «Il y a une tête qui me dit d'aller au café et une autre qui me dit de retourner à la maison». (J'ai parlé de café et de maison, mais ça pourrait être aussi le boulot ou le hammam, le coiffeur ou le stade de foot, chez sa mère ou sa belle-mère, voire, même, dans des cas extrêmes, chez sa femme ou chez sa maîtresse, ou, plus rarement, je le suppose, chez son mari ou chez son amant...). En général, quand on vous répond comme ça, vous ne dites rien, et vous avez raison, car ça peut être pour vous une vraie prise de tête. La meilleure anecdote à ce propos m'a été racontée récemment par un ami. Lors d'une réunion de parents d'élèves d'une école primaire privée, plusieurs mamans ont protesté contre la direction et exigé qu'on augmente le nombre d'heures d'arabe par semaine pour leurs chers chérubins, car, ont-elles rappelé énergiquement, «Nous sommes quand même au Maroc !». Ah ! J'avais oublié de vous préciser qu'il s'agissait d'une école homologuée «Mission française». Pigé, maintenant ? Après vous avoir raconté ça, je ne sais plus quoi faire : il y a une tête qui me dit d'écrire un autre billet, et l'autre de retourner roupiller. Mon Dieu, j'ai mal à mes têtes !