Les obligations perpétuelles, émises par OCP et Attijariwafa bank, en cette fin d'année, semblent intéresser les investisseurs particuliers. C'est ce qui ressort du sondage réalisé par notre partenaire Flm. 80% des 532 internautes qui ont répondu à la question hebdomadaire de Flm, se sont montrés disponibles à investir dans une obligation perpétuelle. De l'autre côté, 20% seulement des internautes sont opposés à investir dans cet instrument. En effet, l'obligation subordonnée perpétuelle se distingue de l'obligation classique par sa durée indéterminée. De plus, quand l'obligation est subordonnée en cas de liquidation de l'émetteur, le remboursement de l'emprunt (capital et intérêts) est lié au désintéressement de toutes les autres dettes. En outre, souvent, le paiement des intérêts peut être différé lorsque la situation financière de l'emprunteur l'exige. Enfin, parfois des émetteurs font assortir les obligations perpétuelles de mécanismes d'absorption des pertes et d'annulation ou de différé du paiement des coupons. Il s'agit en gros de mesures prévues de non-paiement de coupon ou de réduction du nominal, en cas de difficultés financières. Quand la situation financière de l'émetteur ayant nécessité cette dépréciation s'améliore, celui-ci peut déclencher immédiatement, le mécanisme d'appréciation en totalité ou en partie du nominal ayant fait l'objet de dépréciation. Au Maroc, BMCE Bank avait déjà émis, en 2008 et en 2009, deux emprunts obligataires subordonnés perpétuels d'un montant unitaire de 1 MMDH chacun. Pour les caractéristiques de ces emprunts, BMCE prévoyait qu'au-delà des 10 premières années et en cas de non-remboursement, le taux sera majoré d'une surprime de 100 points de base. Pour cette fin d'année, l'OCP a inauguré le bal en visant par l'AMMC une note d'information préliminaire puis définitive relative à l'émission d'un emprunt obligataire subordonné perpétuel. Le montant maximum de l'opération, s'élève à 5 MMDH. Une option de rachat existe après 10 ans à défaut de quoi, le taux d'intérêt sera majoré de 25 points de base. De même, à compter du 23 décembre 2016, un deuxième step-up additionnel de 75 points de base, est prévu. Dans la foulée, Attijariwafa bank a visé par l'AMMC une note d'information relative à l'émission d'un emprunt obligataire subordonné perpétuel avec mécanismes d'absorption des pertes et d'annulation du paiement des coupons. Le montant à lever est de 500 MDH avec une tranche à taux révisable chaque 20 ans. À l'international, ce genre d'obligations sans échéance théorique de remboursement, est usuel surtout en environnement bas de taux. Surtout, pour l'émetteur, il s'agit d'un moyen de renforcer les fonds propres sans effet de dilution pour les actionnaires. En effet, une obligation perpétuelle est quasiment similaire dans les faits à une action sans droit de vote mais à dividende prioritaire. Quant à l'investisseur, celui-ci accepte ces contraintes, grâce au taux d'intérêt intéressant et à la prime de risque souvent élevée. À titre d'exemple, Attijariwafa bank offre entre 5,53% et 5,73% pour les 20 premières années, soit entre 180 et 200 points de base de plus que le Bon du Trésor. Aussi, certains institutionnels, comme les assureurs ou les gérants d'OPCVM monétaire de grande taille (dans le cas d'un taux révisable annuellement), ont besoin d'adosser une partie du passif pour éviter le risque de réinvestissement et/ou d'adossement actif-passif. De plus, le caractère perpétuel est nuancé par l'existence d'un marché secondaire en sus de la grande probabilité de remboursement, vu la prime de risque supplémentaire payée par l'émetteur qui dispose souvent d'une possibilité de remboursement anticipé. Farid Mezouar DG de FL Market Les Inspirations ECO : Faut-il saluer les initiatives récentes d'émissions perpétuelles ? Farid Mezouar : Oui, car avec trois émetteurs, les investisseurs auront le choix et pourront comparer les offres et les opportunités. De même, le marché secondaire sera plus animé, ce qui peut ouvrir la voie à d'autres émetteurs potentiels. Aussi, après les Green Bonds, c'est un nouveau segment obligataire qui pourra animer le marché de la dette privée et, pourquoi pas, donner des idées au Trésor. Peut-on hésiter à investir dans une perpétuité ? Dans l'absolu, il s'agit d'un arbitrage risque-rendement à optimiser. Ainsi, si le risque est appréhendé par l'étude de solvabilité et par l'échéance la plus longue possible, le rendement est à cerner par la prime de risque proposée, ainsi que le contexte absolu des taux et les perspectives de hausse ou de baisse. Au Maroc, si les finances publiques sont équilibrées, le risque de hausse des taux, n'est pas nul notamment à cause du retard pris par l'approbation de la loi des finances. Aussi, il faudra bien modéliser le passage en taux de change flexible et son impact sur les taux.