L'accélération de la cadence s'impose pour concrétiser les objectifs tracés en matière d'efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment qui est le deuxième consommateur d'énergie. Des solutions innovantes et durables sont à mettre en place pour répondre aux défis de l'urbanisation. L'amélioration de l'efficacité énergétique dans les bâtiments est un enjeu fondamental en raison de l'urbanisation croissante. Le taux d'urbanisation est en effet passé au Maroc de 29% à 60% actuellement. Selon les prévisions, la population urbaine constituera les deux tiers de la population totale en 2020. Les enjeux sont de taille sur le plan tant économique qu'environnemental. Le bâtiment est le deuxième consommateur d'énergie avec une part de 25% de la consommation énergétique totale du pays dont 18% réservés au résidentiel et le reste pour le tertiaire. Cette consommation énergétique est appelée à augmenter rapidement dans les années à venir en raison de l'augmentation sensible du taux d'équipement des ménages en appareils électroménagers et de l'évolution importante du parc de bâtiments, selon l'Agence marocaine de l'efficacité énergétique (ex-ADEREE). Pour faire face à ces défis, des actions ont été mises en place par les pouvoirs publics. Il s'agit entre autres de l'adoption de la loi sur l'efficacité énergétique, l'établissement d'un guide des bonnes pratiques de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables dans l'aménagement urbain et dans l'habitat (2010), la promotion de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables dans le bâtiment et l'élaboration de normes techniques portant sur les performances thermiques des matériaux de construction et sur le concept de la durabilité des bâtiments, mais le rythme est encore lent. Il est temps de s'atteler sur la sensibilisation et surtout de mettre en place des solutions innovantes. «À la veille de la COP22 à Marrakech, il faut répondre à la question : comment contribuer à ancrer le principe de la durabilité dans la construction ainsi que l'exploitation du bâtiment afin de préserver les ressources et le climat ?», souligne Badr Ikken, directeur général de l'Institut de recherche en énergie solaire et en énergies nouvelles (IRESEN) lors du premier colloque national sur la construction durable et les villes vertes, organisé par son organisme hier à Rabat. Il estime que la recherche, le développement et l'innovation pourront accompagner fortement cette dynamique. Suite à la mise en place de la nouvelle plateforme Research to Innovation, le Green Energy Park, en partenariat avec le groupe OCP et l'université Mohammed VI polytechnique, qui traite des technologies solaires thermiques et photovoltaïques, l'IRESEN a décidé de mettre en place une nouvelle plateforme, nommée le Green et Smart Building Park visant à accompagner les chercheurs, les architectes et les entreprises du secteur, en mettant à leur disposition différents instruments et équipements pour concevoir, développer et innover. Il ne s'agira pas d'un regroupement de laboratoires technologiques mais cette plateforme «devra être aussi une forte source d'inspiration par rapport à l'architecture verte et durable». Pour concrétiser les objectifs escomptés, le partenariat est indispensable. L'IRESEN est en effet à la recherche de partenaires tant du côté académique qu'au niveau du monde socio-économique. Le financement de la coopération internationale s'avère d'une grande utilité. Le coordinateur du secteur énergie à GIZ, Philippe Simonis rappelle «une bonne nouvelle annoncée» dans le cadre des négociations bilatérales entre le Maroc et l'Allemagne qui a décidé de mettre en place une ligne de crédit de 45 millions d'euros dédiés aux PME pour promouvoir tout particulièrement l'efficacité énergétique. Said Mouline Directeur de l'Agence marocaine de l'efficacité énergétique (AMEE) Les ECO : Où en est le Maroc en matière de construction durable ? Said Mouline : Le processus a commencé par la réglementation thermique du bâtiment. On ne peut plus construire n'importe où et sans règles de sécurité. Il faut prendre en considération les règles thermiques pour que le bâtiment consomme moins d'énergie et pour diminuer la pollution. La concrétisation des objectifs fixés passe par des formations et aussi de la sensibilisation. La réglementation est en place, mais quid de la situation sur le terrain ? On ne peut pas du jour au lendemain concrétiser tous les objectifs. Le secteur du bâtiment évolue. La réglementation est déjà mise en place. La formation n'est pas en reste. Nous avons une convention avec l'ordre des architectes pour former les architectes et mettre en place des outils techniques. Un logiciel du calcul thermique du bâtiment est téléchargeable sur le site de l'agence gratuitement pour tous les architectes qui sont formés et savent utiliser les logiciels liés à l'architecture. Quels sont les principaux enjeux ? Notre pays ne peut plus gaspiller de l'énergie pour des raisons économiques et environnementales. Le volet de l'efficacité énergétique constitue 20 à 30% de la réduction des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Il faut mettre en place des projets pas uniquement dans le bâtiment, mais aussi dans d'autres secteurs comme le transport et l'industrie. Ne pensez-vous pas que le rythme est encore lent ? Dans certains secteurs, il est difficile d'opérer le changement du jour au lendemain et de mettre en place les réflexes nécessaires. La réglementation doit être alliée à la formation. La généralisation se fait petit à petit. Quelque huit projets de logements sociaux ont été accompagnés et réalisés avec les règles thermiques du bâtiment. Dans toutes les régions, on peut mettre en œuvre l'efficacité énergétique dans le bâtiment. L'objectif est d'arriver à la généralisation le plus vite possible.