La référence grecque originaire, réactualisée par la philosophe Hannah Arendt, fait de la participation directe à la vie politique et à la gestion de la chose publique un attribut essentiel de la citoyenneté. Force est de constater que le patriotisme et la citoyenneté connaissent d'incessantes évolutions. Cela est vrai pour de nombreux pays, dont le nôtre. Certes, du fait que le monde est globalisé, inter-impliqué, que le citoyen est devenu «extra-territorialisé», atteignable et influençable par les changements et événements de ses environnements, mais aussi défiant par rapport à la «surpuissance traditionnelle» de l'Etat. De surcroît, par manque de «projet de société» fédérateur et inclusif, les individus se délient ou ont tendance à se regrouper par des alliances idéologiques ou affinitaires par-delà les frontières et ce, pour «se prémunir» ou faire face aux chocs et mutations, parfois imprévisibles dans un contexte de crise économique, de bouleversements sociopolitiques et géostratégiques inédits. L'aboutissement de nombreux projets structurels dans le domaine du développement atteste du préalable de la revitalisation de la citoyenneté. Loin d'être éphémère, l'idéal participatif citoyen se fonde sur un faisceau de références particulièrement puissantes et influentes, qui fondent et consolident la stabilité et l'essor d'un pays. Il y a une notion du collectif citoyen à préserver car le développement ne peut s'édifier que collectivement. Notre pays gagnera à maintenir le cap des réformes pour accélérer sa convergence et se préparer aux diverses mutations dictées par les exigences nationales et internationales. Sous les effets de la crise économique, le monde est conscient de la nécessité d'instaurer de nouvelles règles et pratiques tant sur les plans économique, politique que géostratégique. Il est opportun pour nous de les intégrer et de les prendre en compte. L'option d'un développement axé sur l'investissement dans le capital humain s'avère décisive afin de faire émerger les conditions favorables à la promotion d'une croissance socio-économique inclusive et pérenne. L'accélération et l'approfondissement des réformes au niveau de l'éducation sont cruciaux car comme le disait le philosophe américain John Dewey, une société n'est réellement démocratique que si son système éducatif forme réellement des démocrates. C'est pourquoi, l'enseignement doit se fonder autant que possible sur les exigences de la contemporanéité et des défis socio-économiques à relever. Ceci est nécessaire pour consolider l'édification d'un Maroc moderne et compétitif, apte à maîtriser le développement et à ne pas le subir. Quant à la santé, secteur crucial, outre le relèvement des dépenses pour remédier à l'insuffisance des infrastructures de base et au manque de personnel qualifié, une attention particulière devrait être accordée à l'amélioration de la qualité de l'offre de soins et à la généralisation de la couverture médicale. À la consolidation de l'Etat de droit, l'ancrage dans la culture des droits de l'homme est fondamental. D'autre part, la substantialisation des partis politiques, leur modernisation et la poursuite de la réforme de la justice ne peuvent que contribuer vigoureusement à cette consolidation. Le lien et la cohésion sociale, à travers une lutte contre les inégalités et l'exclusion sont à renforcer dans le but de raffermir la stabilité du pays moyennant l'élargissement de la classe moyenne, la mise en place d'une politique économique favorisant le développement du marché local et l'épanouissement des régions et ceci dans le cadre de la régionalisation avancée voulue par le pays. L'organisation du champ associatif et médiatique, son implication assidue ainsi que la généralisation de la pratique de la gouvernance sont des leviers importants à affermir pour l'émergence d'une société moderne. Une société imprégnée de la culture d'évaluation, de la reddition des comptes et débarrassée du phénomène de la corruption. Les potentialités en matière de citoyenneté active ne sont d'ailleurs favorisées que par un climat de confiance dans le sens d'une plus grande réflexivité des populations, une plus grande capacité à analyser, à critiquer «lucidement» et à intervenir dans les choix politiques en intégrant les exigences d'intérêt général. Ainsi il est possible de faire de chaque citoyen un créateur, un producteur de valeurs, d'engagement et de solidarités. Mounir Ferram Docteur de l'Université Paris VII Diplômé d'Arts et Métiers Paris