Elhoussine Elyamani, syndicaliste, accuse le PJD d'une volte-face présomptueux. «Ceux qui ont démantelé les outils de contrôle et livré le marché à la dérégulation se présentent aujourd'hui en défenseurs du consommateur», fustige-t-il, rappelant que la libéralisation des hydrocarbures, décidée sous l'égide du PJD, a entraîné une envolée des prix et affaibli les équilibres économiques. Une décennie après avoir acté la libéralisation du marché des hydrocarbures, le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste, opposition) réclame un contrôle plus strict des pratiques commerciales. Son groupe parlementaire a saisi la présidente de la commission des finances et du développement économique afin de solliciter une évaluation approfondie de l'application de la loi 104.12 sur la liberté des prix et la concurrence, adoptée en 2014 sous son propre gouvernement. Présentée à l'époque comme un levier de relance économique, cette réforme devait favoriser un marché plus fluide, soutenir l'investissement et garantir une meilleure allocation des ressources. Mais en l'absence de garde-fous efficaces, elle a entraîné une concentration croissante du pouvoir économique entre les mains d'un nombre restreint d'opérateurs, favorisant des ententes tacites et des pratiques spéculatives. Loin d'aboutir à une saine émulation, cette libéralisation a, selon ses détracteurs, consolidé des positions oligopolistiques, réduisant la marge de manœuvre des petites et moyennes entreprises et limitant les bénéfices escomptés pour le consommateur. Dans leur requête, les députés du PJD pointent du doigt l'érosion du pouvoir d'achat, attribuée à une hausse incontrôlée des prix et à une répercussion disproportionnée des fluctuations internationales sur les coûts domestiques. Ils dénoncent également un manque de transparence dans la formation des prix et appellent à une analyse rigoureuse des mécanismes de régulation, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre des sanctions contre les abus de position dominante et les pratiques anticoncurrentielles. Mais cette démarche soulève de vives critiques. Elhoussine Elyamani, syndicaliste, accuse le PJD d'une posture contradictoire. «Ceux qui ont démantelé les instruments de régulation publique et livré le marché à des logiques spéculatives s'émeuvent aujourd'hui des effets de leur propre politique», assène-t-il. Il rappelle que la fermeture de la raffinerie Samir et l'abandon du contrôle des prix, décidés sous l'égide du PJD, ont laissé le pays vulnérable face aux fluctuations du marché international, rendant toute régulation ultérieure particulièrement complexe. Au-delà de la controverse politique, M. Elyamani rappelle une problématique plus large : celle de l'efficacité des dispositifs institutionnels censés garantir un fonctionnement équitable du marché. Le Conseil de la concurrence, pourtant doté de prérogatives étendues, peine à imposer son autorité face aux grandes enseignes et aux acteurs dominants. L'interconnexion entre pouvoir économique et sphère décisionnelle freine l'application des sanctions et limite l'ampleurdes réformes structurelles sur la réalité du terrain. Alors que l'inflation continue d'alimenter les tensions sociales, l'évaluation de la loi 104.12 pourrait servir de test grandeur nature pour mesurer la capacité des institutions marocaines à réguler un marché soumis à des influences multiples.