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Maghreb, les économies en recomposition
Publié dans Les ECO le 05 - 03 - 2013

Diversification et sophistication des exportations : les nouvelles voies de croissance pour les économies nord-africaines. Le Comité intergouvernemental des experts (CIE) du bureau Afrique du Nord de la Commission économique pour l'Afrique, vient de tenir sa 28e session annuelle à Rabat. L'organisme régional livre sa recette pour la croissance des économies de la région. Décryptage.
S'adapter, se transformer...ou s'enliser dans une croissance qui a toutes ses chances de perdurer dans son ralentissement, le choix est vite fait pour les économies nord-africaines. Le Bureau régional de la Commission économique pour l'Afrique (CEA-AN), est en tout cas bien convaincu de la nécessité pour les économies de la région, de procéder à un changement structurel afin de rester dans la course aux croissances. Sur une bonne partie de la semaine dernière – du mardi au vendredi – les experts du Comité intergouvernemental (CIE) se sont en effet penchés sur les éventuelles voies de concrétisation de cette transformation. Le CIE est l'organe décisionnel du bureau de la CEA-AN.
Il regroupe les représentants des sept gouvernements de la sous-région (Le Maroc, l'Algérie, l'Egypte, la Libye, la Mauritanie, le Soudan et la Tunisie). Ce comité tenait ainsi sa 28e session annuelle à Rabat, sous le thème très évocateur de «Promouvoir la diversification et la sophistication pour la transformation structurelle des économies en Afrique du Nord». «L'idée est de passer à des activités économiques à plus forte valeur ajoutée et de multiplier les secteurs porteurs», explique Karima Bounemra Ben Soltane, la directrice de la CEA-NA. «Cette stratégie devrait permettre aux pays de la région de mieux soutenir leur croissance et de limiter leur vulnérabilité aux chocs exogènes contre un certain nombre d'aléas sur lesquels ces pays n'ont souvent pas beaucoup de contrôle», explique la diplomate. Dans le détail, le menu de la CEA pour le relèvement et le maintien d'un bon rythme de croissance des économies africaines, repose sur deux principaux ingrédients.
Solutions en duo
Pour l'organisme régional, la corrélation entre la structure des exportations et le développement économique, s'établit via deux indicateurs : la diversification et la sophistication de ces exportations. Concernant le premier, plusieurs canaux permettent d'expliquer en quoi une grande diversification des exportations permet d'accroître les possibilités de croissance. Les experts de la CEA-NA citent, par exemple, la réduction de la dépendance à certains produits dont les prix et les volumes sont volatils et peuvent engendrer une détérioration de l'échange. L'organisme régional constate, de fait, que les économies nord-africaines enregistrent un niveau de diversification de leurs exportations, beaucoup plus faible que celui enregistré dans d'autres groupements régionaux.
Pour la comparaison, le nombre de produits moyens exportés par la région ne dépasse pas les 252 produits en 2011, contre 260 pour l'ALENA, par exemple, sur la même année. Il faut également savoir que les pays de la région sont loin de partager les mêmes réalités. D'un côté, nous avons des pays moins diversifiés et riches en ressources naturelles (Algérie, Libye, Soudan, Mauritanie), là où, de l'autre, certains sont relativement plus diversifiés (Tunisie, Maroc et Egypte). Par ailleurs, selon le même rapport, des études empiriques récentes ont également mis en évidence le rôle de la «sophistication» de ces exportations dans le processus de croissance. Il semble que le faible niveau de sophistication des offres commerciales des pays de la région, adressées à la demande extérieure, «constitue un frein à la croissance économique». Par sophistication, il faut comprendre tous les nouveaux métiers en croissance du monde, tels les TICs, l'offshoring, l'aéronautique et l'automobile.
Acquis fragiles
Il faut dire que le diagnostic est peu enthousiasmant. Les économies nord-africaines ont connu durant la dernière décennie des taux de croissance modérés de l'ordre de 4%, contrastant avec ceux des pays de l'est asiatique et du Pacifique (8,5%) et les pays du sud de l'Asie (6,5%).
Dans son rapport provisoire émis en marge de cette rencontre, le bureau de la CEA considère la croissance des économies régionales comme «insuffisantes» face aux nombreuses problématiques socio-économiques auxquelles doivent faire face les modèles économiques en vigueur dans les pays de la sous-région (Chômage et emploi des jeunes). Ces phénomènes ont d'ailleurs joué un rôle important dans les derniers bouleversements politiques qui ont éclaté dans la région, en 2011.
Karima Bounemra
Ben Soltane, directrice de la CEA-NA
Les ECO : Pensez-vous que le challenge de la croissance puisse réussir sans une meilleure intégration économique et commerciale en Afrique du Nord ?
Karima Bounemra Ben Soltane :
Il est certain que l'intégration régionale est aussi parmi les problématiques du moment, pour les économies qui composent cette région. Nous voyons cependant, cela, davantage comme une opportunité, qu'un obstacle en tant que tel. Cette intégration reste certes encore à créer et elle est très balbutiante. Mais je pense qu'il faudrait la promouvoir, l'encourager et lui donner les moyens de contribuer à cette sophistication des échanges des pays de la région, et à cette recherche de la valeur ajoutée.
Est-ce que l'on peut également dire que l'effet «Printemps arabe» est désormais derrière nous ?
Oui et non à la fois... Il faudrait peut-être d'abord que l'on sache sous quel angle ces bouleversements politiques, auxquels vous faites allusions, ont impacté l'économie de la région. Nous constatons d'abord que ces impacts économiques se sont manifestés de manière très différente d'un pays à l'autre, des plus violentes aux plus douces. Toutefois, des transitions sont actuellement en cours dans plusieurs de ces économies. Je pense qu'il est important que les pays concernés arrivent à limiter dans le temps ces transitions, afin que nous puissions avoir une bonne visibilité sur leurs nouveaux objectifs économiques. Cela, parce que nous ne pouvons pas continuer à rester dans le flou. Je pense que nous sommes sur la bonne voie, pourvu que les gouvernants de la région analysent bien les indicateurs économiques et fassent preuve d'écoute.
D'autant plus que ces gouvernants ont beaucoup changé... ?
s ont changé, en effet et nous sommes dans la dynamique politico-économique que je viens de vous décrire. Il donc est important que nous saisissions l'opportunité du «Printemps arabe »pour éliminer un certain nombre de barrières entre les pays, pour permettre une réelle efficience commerciale, une meilleure intégration et optimiser la circulation des personnes, des biens et des capitaux. Tout cela fait donc que nous somme dans une dynamique très positive pour notre région.


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