Un mois après la polémique qui a éclaté entre le ministère de la Culture et les professionnels du théâtre lors de la 13e édition du festival national du théâtre de Meknès, la Coordination nationale des troupes de théâtre et l'association des lauréats de l'Institut supérieur d'art dramatique et d'animation culturelle (ISADAC) -les deux entités qui ont boycotté le festival meknassi, en protestation contre la politique adoptée par le ministre de la Culture, Bensalem Himmich-, ont mis en place une manifestation dédiée au théâtre à Casablanca. Ouvert samedi soir sur une représentation de la pièce «Le mur», du Centre méditerranéen Al Kasaba pour les arts du spectacle, le premier forum du théâtre de Casablanca a rassemblé, le temps d'une soirée, les figures emblématiques du théâtre de la cité blanche. Naïma Lemcherqui, Ahmed Saâri, Naïma Ilyasse, Mohamed Tsouli, Zhour Slimani... qui ont tous assisté à l'ouverture de ce «nouveau-né». «Le choix de Casablanca n'est pas anodin. La métropole a toujours joué un rôle prépondérant dans le développement de la culture en général et du théâtre en particulier. Son infrastructure culturelle, ainsi que la présence d'organismes économiques, ne peuvent que créer une certaine interactivité entre la culture et l'économie», a précisé Bousserhane Zitouni, membre du comité d'organisation. Pour ce premier coup d'essai, les organisateurs, soutenus par le Conseil de la ville, ont programmé des représentations de plusieurs compagnies appartenant à différentes villes du Maroc. Des pièces de théâtre en arabe, en amazigh, ainsi que d'autres destinées au jeune public, font l'ossature de la programmation de cette édition. Les salles de théâtre Mohammed VI, Sidi Belyout, Moulay Rachid, Mohamed Zefzaf et Kamal Zebdi sont donc investies par les troupes participantes depuis samedi dernier et jusqu'au 28 juillet. «À travers ce forum, nous envisageons d'ouvrir le débat sur la situation du théâtre au Maroc. L'ère de colmater les brèches est bel et bien révolue. Nous avons besoin aujourd'hui d'un arsenal juridique capable de redorer le blason du théâtre national», ajoute Zitouni. La place de la culture dans la Constitution Voulant faire de ce forum un véritable carrefour culturel, le comité d'organisation a initié dimanche une conférence sur la place de la culture et des arts dans la nouvelle Constitution. Cette rencontre a été animée par des acteurs politiques et des intellectuels, notamment Abdelouahed Souhaïl, membre du bureau politique du PPS et Abdessalam Khalfi de l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM). Les différents intervenants étaient tous d'accord sur le fait que les intellectuels et les artistes sont des acteurs majeurs et influents dans la société et contribuent d'une manière conséquente dans la consolidation des acquis démocratiques dans le pays et la promotion des valeurs d'humanité et de tolérance. Mettant l'accent sur l'article 5 de la nouvelle Constitution, qui consolide la diversité culturelle et linguistique au Maroc, Souhaïl a estimé, par ailleurs, que la régionalisation élargie «offre de vastes perspectives pour la création et la promotion de tous les genres culturels». Il a appelé ainsi les intellectuels et les artistes à s'inscrire dans ce mouvement de changement et à tirer grand profit de ce nouveau souffle de liberté. Ces avancées ne peuvent être acquises sans un soutien financier, moral et logistique des artistes. De son côté, le représentant de l'IRCAM a mis en avant les nouveaux acquis en faveur de la culture et de la langue amazighe, érigée dans la nouvelle Constitution en langue officielle, à l'égal de la langue arabe. Bref, les participants à cette rencontre ont insisté sur l'absolue nécessité de promouvoir la culture dans tous ses états et dans toutes les régions du Maroc. Le bras de fer créé entre le ministère de la Culture et les professionnels a permis donc aux Casablancais de renouer avec leur passé théâtral glorieux (rappelez-vous du célèbre théâtre municipal qui a abrité des pièces mémorables) et surtout de discuter de sujets qui touchent de près l'avenir de cet art dans notre pays.