Les replis vont de 47 points de base à plus d'un point sur toutes les maturités depuis début janvier. Les taux ont consommé leur potentiel de baisse et les investisseurs n'accompagnent plus les levées du Trésor. Ils devraient se maintenir à leur niveau actuel au moins au cours des trois prochains mois. Le marché des bons du Trésor amorce une nouvelle phase. En effet, les taux ont rompu le cycle baissier entamé au cours des derniers mois. Pour rappel, après la progression ininterrompue de 2013, les taux ont significativement reculé depuis le début de cette année. La baisse a touché toutes les maturités avec une ampleur plus significative sur la partie long terme. Une situation qui s'explique par les rentrées de liquidités des pays du Golfe à la fin 2013 qui ont permis au Trésor de limiter son financement sur le marché domestique. De plus, la situation des finances publiques ne cesse de s'améliorer grâce à la reprise progressive de l'activité économique, mais surtout aux mesures de décompensation de certains produits pétroliers. Dans ce contexte, les investisseurs, auparavant exigeants tant en termes de liquidité que de rendement, ont revu leurs exigences à la baisse. Ce qui a poussé les taux à prendre cette trajectoire baissière. «Il faut dire aussi que la hausse de l'année précédente peut être considérée comme exagérée par certains aspects; les investisseurs réclamants des rendements élevés dans une situation de tension sur les liquidités et de déficit budgétaire élevé», explique Karim El Hnot, administrateur directeur général de CDG Capital Gestion. Les taux de rendement des titres de l'Etat ont atteint 3,11% pour la maturité 26 semaines, en baisse de 47 points de base par rapport à début janvier ; 3,45% pour la maturité 2 ans, en recul de 94 points de base ; et à 4,45% pour les bons à 10 ans, en repli de 1,17 point. Actuellement, le marché est marqué par une stabilité, que ce soit au niveau des taux ou des transactions, et ce, depuis près de 3 semaines. Les besoins du Trésor de plus en plus réduits ne semblent plus tirer les taux à la baisse, surtout avec l'allègement continu du déficit budgétaire. A la dernière séance d'adjudication, l'argentier de l'Etat a levé seulement 300 MDH sur la maturité 13 semaines. Le montant de ses levées durant le mois de mai s'est élevé à 4,5 milliards de DH, en phase avec le programme des levées qu'il a établi. C'est dire que les investisseurs qui, habituellement, accompagnaient le Trésor dans ses levées, s'abstiennent actuellement de le faire. Ils préfèrent orienter leurs placements vers le marché monétaire, argumentant ce choix par le caractère stable et certain du rendement. Pour sa part, un analyste du marché des taux souligne que «le potentiel de baisse de la partie courte de la courbe des taux a été entièrement consommé depuis un mois». Et d'ajouter: «Sur la partie moyen et long terme, le marché est plutôt calme avec peu de transactions. En cause, les investisseurs avaient déjà prévu la baisse et avaient donc implémenté leurs stratégies de placement. Du coup, ils se placent actuellement en tant qu'observateurs et attendent un éventuel changement de situation». Par ailleurs, le marché monétaire tire profit d'une situation plus confortable. En effet, la récente baisse du taux de la réserve obligatoire a permis l'injection de 7 milliards de DH dans le circuit monétaire. Parallèlement, la sortie de l'OCP sur le marché international pour un financement de 13 milliards de DH devrait permettre d'alléger le déficit de liquidité. D'ailleurs, il s'est situé à 51 milliards de DH à fin avril alors qu'au premier trimestre il était à 71 milliards de DH. Vu cette conjoncture, les professionnels tablent sur une poursuite de la stabilité des taux obligataires. Notre analyste estime qu'«en l'absence d'éléments majeurs qui pourraient changer la donne, les taux devraient rester stables jusqu'à fin 2014». M. El Hnot abonde dans le même sens, mais se limite à un horizon de prévision plus court. Pour lui, «on devrait assister à cette stabilité sur les 3 à 4 prochains mois, surtout que le marché se fait écho d'un probable tirage de la dette externe qui devrait s'effectuer prochainement». Cela dit, le responsable n'exclut pas une légère hausse au terme de cette période car «le déficit budgétaire reste relativement encore élevé, à près de 5% du PIB pour 2014, malgré les efforts fournis pour le contenir. De ce fait, le Trésor devrait maintenir une présence régulière en terme de levées sur le marché interne». Par ailleurs, les taux pourraient être affectés par deux évènements. Le premier concerne un mouvement de vente des titres de la part d'investisseurs spéculateurs. Le second est en rapport avec la reprise escomptée du marché de la dette privée avec des taux plus intéressants que ceux du marché de la dette de l'Etat. Si reprise il y a, elle pousserait les investisseurs à diriger leur épargne vers ce segment. Du coup, les taux devraient rester au moins à leurs niveaux actuels.