115 000 fonctionnaires classés dans les échelles 1 à 4 passeront à l'échelle 5, il en coûtera à l'Etat 415 MDH. 2 400 DH de salaire minimal et 44 000 DH comme maximum pour un professeur de médecine en fin de carrière. Une étude sur la question des rémunérations dans le public est en cours de finalisation. C'est désormais quasi-officiel : la suppression des échelles de rémunération de 1 à 4 de la fonction publique, qui est un engagement pris par le gouvernement dans le cadre du dialogue social, a été entérinée par le conseil de gouvernement réuni le 25 février. Le recrutement dans ces échelles, il faut le rappeler, a été stoppé depuis déjà trois ans. Il s'agit maintenant de régulariser, administrativement, les fonctionnaires qui étaient classés dans ces échelles et qui passent à l'échelle 5 à partir du 1er janvier 2010, avec effet rétroactif suivant la situation administrative de chacun (voir encadré). La mesure concerne à la fois les fonctionnaires de l'administration étatique (47 500 personnes) et ceux des collectivités locales (67 500 personnes). Son coût financier est estimé à 415 millions de DH. Un autre projet a été adopté le jeudi 25 février ; il vise à augmenter de 25 à 28% annuellement le quota de promotion interne. Précisons toutefois que cette augmentation profite surtout, et même exclusivement, au reclassement après inscription au tableau d'avancement, c'est-à-dire, pour simplifier, au reclassement par ancienneté : 17% au lieu de 11% précédemment. Quant au reclassement (ou promotion) par examen professionnel, son quota stagne à 11% (11% + 17% = 28%). Ainsi, avec la suppression des échelles 1 à 4, la situation financière des concernés se trouve mécaniquement améliorée. Le salaire minimum dans la fonction publique passe en effet, après cette opération, de 1 560 DH à 2 400 DH par mois. Cela veut dire que, avant ce reclassement, il existait bien des fonctionnaires qui percevaient moins que le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), contrairement à ce qu'affirmait, mordicus, un ministre, il y a deux ans, dans ces colonnes mêmes… Qu'on le veuille ou non, la problématique des salaires est au cœur de toutes les batailles syndicales, de toutes les réformes passées ou à venir. Et cette problématique, chacun la perçoit suivant le côté de la barrière où il se trouve. Pour le gouvernement, il s'agit de réduire le poids de la masse salariale dans le PIB (ce qui n'est pas forcément synonyme de stagnation des rémunérations), pour les fonctionnaires et les syndicats qui les encadrent, l'enjeu est d'améliorer le niveau des salaires, constamment rongés par l'inflation, comme ils disent. Le ministère de la modernisation des secteurs publics (MMSP), pour y voir plus clair, a commandé une étude sur les rémunérations, elle devrait être finalisée cette année. Près de 100 000 fonctionnaires de l'Education nationale perçoivent moins de 4 000 DH par mois En attendant, quels sont les salaires distribués dans la fonction publique ? Les fonctionnaires sont-ils bien payés, pas assez ou mal payés ? La réponse n'est jamais univoque, on s'en doute bien. Mais les chiffres sont là, à chacun de les interpréter. Selon les statistiques de la Trésorerie générale du royaume (TGR), arrêtées à fin 2008, le salaire moyen dans la fonction publique était de 7 150 DH par mois ; ce qui représentait une hausse de 23% par rapport à 2004, soit une augmentation annuelle moyenne de 4,6%, un niveau très largement supérieur à celui de l'inflation. Avec les baisses successives de l'IR et la suppression des échelle 1 à 4, cette moyenne doit avoir augmenté certes, mais pas de beaucoup s'agissant de près de 700 000 fonctionnaires (personnel des collectivités locales compris). Si bien que l'on se situe à un niveau de salaire moyen compris entre 7 400 et 7 500 DH (estimations La Vie éco). Mais une moyenne, on le sait bien, ne signifie pas grand-chose dans les situations où les écarts de salaires sont importants. Et c'est le cas au Maroc : 2 400 DH pour le salaire minimum (et encore, seulement après suppression des échelles 1 à 4) et 44 000 DH pour le plus haut salaire, celui que perçoit un professeur de médecine. Le rapport, on le voit, est de 1 à 18. Et si on ne tient pas compte du projet de reclassement des fonctionnaires des basses échelles, le rapport, encore en vigueur, est de 1 à 22,4. Selon un document de la Primature, qui fait ressortir l'impact cumulé de la revalorisation des rémunérations des fonctionnaires (à hauteur de 10,4%) et de la baisse de l'impôt sur le revenu (IR), 93 048 fonctionnaires du ministère de l'éducation nationale classés à l'échelle 9 et percevant 3 588 DH par mois en 2008 devaient voir leur salaire passer à 3 938 DH, soit un gain de 351 DH après les améliorations décidées. Dans l'absolu, ce n'est évidemment pas rien 4 000 DH par mois, mais en pratique tout le monde sait que cela suffit à peine à faire vivre une personne. A la DGSN, c'est encore moins que cela : le même document a recensé 23 426 fonctionnaires classés à l'échelle 5 qui devaient toucher, après les améliorations introduites (hausse + retombées de la baisse de l'IR), 3 256 DH par mois. Les 16 051 fonctionnaires de la DGSN classés à l'échelle 6 gagneront à peine 300 DH de plus, soit 3 552 DH par mois. Pour simplifier, tous ceux qui sont classés dans des échelles inférieures à 10, n'atteignent même pas 5 000 DH par mois. Et ils sont encore nombreux à être classés dans ces échelles (4 à 9), même si leur part dans l'effectif global n'est plus que de 45%, contre 54% en 2004. Cette baisse de la proportion des fonctionnaires des «petites» échelles au profit des fonctionnaires des échelles 10 et plus (55% désormais) résultant à la fois des promotions (normales et exceptionnelles) et des recrutements ciblant de plus en plus les cadres ayant les diplômes et les qualifications requis pour être classés à l'échelle 10 et plus. D'où donc la hausse du taux d'encadrement dans la fonction publique. Un mouvement qui ira sans doute en s'améliorant en considérant que, progressivement, les fonctionnaires sans diplôme ou faiblement diplômés, finiront, avec le temps, par ne représenter qu'une part marginale dans l'effectif global de la fonction publique. 40 000 DH pour un secrétaire général de ministère Nonobstant cette considération liée à l'augmentation du niveau d'encadrement et, partant du niveau de rémunération qui en découle, il est difficile de soutenir que les fonctionnaires, sur le plan strictement financier, sont des privilégiés. Un secrétaire général de ministère percevant 40 000 DH par mois, ce n'est franchement pas excessif par rapport aux responsabilités qui sont les siennes. Idem pour un directeur qui touche quelque 25 000 DH quand il doit apposer sa signature sur des marchés de plusieurs milliards de DH parfois. A ceci près que, partout dans le monde, la fonction publique n'est pas ce qu'il y a de mieux pour gagner de l'argent. Mais si la fonction publique n'enrichit pas, elle offre en revanche la sécurité de l'emploi. Sans doute, est-ce là la contrepartie de la relative modestie des rémunérations servies. Sans oublier les autres avantages en nature attachés à certains postes et qui constituent autant de rémunérations non monétaires. Mais cela reste bien inférieur à ce qui se pratique dans le privé où les salaires, à compétence égale, peuvent atteindre des niveaux très élevés. Cela est bien connu. Un ingénieur débutant dans la fonction publique touche moins de 5000 DH ; il peut facilement doubler son salaire dans le privé. En fait, comme ne cessent de le souligner les organisations syndicales des fonctionnaires, le problème dans la fonction publique se pose au niveau des échelles subalternes. Si l'on devait représenter par une pyramide l'effectif des fonctionnaires par tranche de salaire, on obtiendrait une pyramide complètement affaissée sur sa base ; tant il est patent que le gros de la troupe se trouve à des niveaux de rémunérations que beaucoup peuvent trouver peu…rémunérateurs. A fin 2008, 61% des fonctionnaires percevaient entre 1 000 DH et 5 000 DH et 76% entre 1000 DH et 6 000 DH. Bien sûr, depuis, il y eut les améliorations déjà citées, mais cela ne représente pas un changement substantiel du niveau des traitements ; en particulier pour les échelles intermédiaires et inférieures justement. Et ceci malgré les efforts réels déployés ces dernières années pour améliorer leur sort. Peut-être cela est-il dû au retard qui s'accumule en matière de promotion et d'avancement, de sorte que quand une régularisation est décidée, elle vient en fait rattraper…le retard !